Capturer le présent, apprendre sur soi, transformer le négatif en positif: ce sont toutes des fins qui ont été rendues possibles grâce au projet d’arts visuels Diagnostik.
Pour aider ses élèves à traverser «une double crise, sanitaire et identitaire», Mélissa Nadeau, enseignante d’arts plastiques à l’école secondaire Curé-Antoine-Labelle, leur a proposé de réaliser un autoportrait symbolique.
Le projet, qui est né d’une conversation de salon, s’est rapidement développé pour prendre des proportions importantes.
Au total, ce sont 65 membres enseignants provenant de 50 écoles de 15 pays à travers le globe qui ont participé à l’initiative.
Parmi ces derniers, on compte notamment le Japon, le Nigéria, l’Allemagne, la France, l’Argentine et la Roumanie.
«C’est une période tellement incertaine et insécurisante, partage Mélissa Nadeau. En discutant avec des profs d’ailleurs dans le monde, j’ai constaté que les enseignants et les élèves ont vécu pas mal les mêmes émotions partout.»
Introspection
À travers ce projet, les élèves participants ont été amenés à s’interroger sur le positif qu’ils ont retiré de cette année pandémique.
Que ce soit sur le plan personnel ou collectif, les réponses à cette question sont multiples.
«Avec tout ce qui s’est passé, […] il a fallu se remettre en question et je pense qu’on a vraiment évolué en tant que société», soutient Lyna Sidki, étudiante à Curé-Antoine-Labelle.
Dans ce même ordre d’idée, Dajianne Mitchell-Bouchard constate que les mouvements qui ont «éclaté» comme Black Lives Matter ont permis à la population d’en ressortir «plus éduquée».
Pour Syd Picard, également étudiant dans la classe de Mélissa Nadeau, la pandémie a été l’occasion de se découvrir.
«Une des raisons pour laquelle je n’étais pas heureux, c’est que je ne me connaissais pas encore bien, confie-t-il. Cette année, j’en ai profité pour penser à moi et j’ai réalisé que je m’identifiais comme non-binaire et trans. C’est un peu ça que j’ai voulu représenter dans mon œuvre.»
À travers le monde
Le 22 mai, Éloïse Gasteuil, enseignante à la Cité Pierre et Marie Curie, en France, a perdu son père aux mains de la COVID-19.
Afin d’extérioriser les différentes étapes de son deuil, elle a notamment eu recours à sa pratique de la photographie.
À travers Diagnostik, l’enseignante avait «envie d’offrir la même opportunité d’expression de l’inconscient en abordant l’autoportrait» et «de catharsis à travers l’art» à ses élèves.
«Comme je l’ai dit à Mélissa, je pense qu’aucun autre projet n’aurait fait assez de sens pour y consacrer mon énergie lors de cette année», confie Éloïse Gasteuil.
«Diagnostik était notre « vaccin », partage pour sa part Rita Badulescu, enseignante au Collège d’Art Camen Sylva, en Roumanie. Je ne sais pas si nous avons été immunisés de façon permanente, mais ça nous a aidés à avancer.»
Le projet est arrivé à point alors qu’elle cherchait désespérément une façon de sortir ses élèves de leur état de passivité et à motiver les adolescents qu’elle connaissait.
«J’ai vu dans leurs œuvres la tristesse, la peur, les angoisses regoulées, la colère vis-à-vis la façon dont les autorités ont géré la pandémie», confie l’enseignante.
Suite
Pour Mélissa Nadeau, l’archivage de ce projet «significatif et symbolique» est un incontournable pour la suite.
Des pourparlers sont également en cours avec certaines institutions muséales afin d’exposer et d’immortaliser Diagnostik.
«On compte aussi faire une phase deux au projet, question de tourner la page sur la pandémie», explique l’enseignante. Pour l’occasion, elle espère que la grande majorité des enseignants s’investiront.
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