Acquis par la famille Boivin il y a plus de 35 ans, le restaurant Au Biniou a fermé ses portes en pleine pandémie, septembre dernier, sur son emplacement bien connu situé sur le boulevard de la Concorde, à Pont-Viau.
Acheté par leurs parents en 1986, ce n’est qu’une dizaine d’année plus tard que Mélanie et Steve Boivin sont devenus les co-propriétaires du restaurant.
D’abord axé sur les crêpes bretonnes, celui-ci a évolué au fil du temps afin d’offrir aux visiteurs un menu de spécialité de cuisine française.
Pendant la période prépandémique, le Biniou pouvait accueillir près de 35 000 personnes par année, soit de 600 à 700 personnes chaque semaine.
Lors du temps des fêtes, les employés pouvaient servir jusqu’à 1000 couverts de manière hebdomadaire.
«Ce qui était bien Au Biniou, c’était la constance, souligne Steve Boivin, co-propriétaire des lieux pendant 25 ans. Les gens revenaient parce qu’ils savaient à quoi s’attendre sur la qualité et la rigueur de notre service.»
Un savoir-faire ainsi qu’une connaissance du domaine s’étaient bien établi au restaurant.
Toutefois, avec un manque de main-d’œuvre présent depuis plusieurs années, l’arrivée de la pandémie en a achevé la destinée.
L’équipe a tenté de survivre en offrant un service pour emporter, mais cette tentative n’a pas suffi pour passer à travers la crise sanitaire.
«Le Biniou paraissait inébranlable, mais ma sœur et moi prenions tout sur notre dos pour continuer à avancer», explique M. Boivin.
Problème de personnel
Bien que la pandémie fut le coup fatal, le restaurant subissait déjà quelques difficultés, notamment sur le plan de la main-d’oeuvre.
«On l’entend souvent que les entreprises ont un problème de personnel, affirme le co-propriétaire. On était en plein dedans.»
Ce dernier ajoute qu’il était aussi difficile de suivre les hausses de salaire minimum que le gouvernement annonçait.
La dynamique de la restauration est plus fragile, mais certains restaurants ont une marge plus permissive dans l’augmentation de la rémunération, pouvant donc attirer du personnel d’ailleurs.
Les employés peuvent être sollicités dans un autre domaine qui offre un horaire de jour, alors que la restauration comprend les soirs de semaine et les jours de fin de semaine.
C’est ce qui est arrivé Au Biniou. Après avoir travaillé d’arrache-pied pour que l’endroit convienne aux mesures sanitaires, l’homme de 48 ans a reçu la démission d’un de ses gérants et celle d’un employé à temps plein.
«Ils ont voulu améliorer leur sort et on ne peut pas être amer de leur décision», de comprendre Steve Boivin.
Également, ça devenait récurrent de remplacer constamment un poste, ce qui ne permettait plus de gérer un commerce avec le recul.
Idée de repartir
Mélanie Boivin et son frère ont décidé de fermer le restaurant en mai 2021 pour réfléchir aux options qui s’offraient à eux.
Ils ont d’abord voulu le vendre pour qu’il y ait une continuité du commerce. En revanche, ils ont reçu qu’une offre, soit celle de n’acheter que la bâtisse.
Sa sœur ne voulant plus continuer, M. Boivin a donc respecté son choix et ensemble, ils ont accepté la proposition d’affaires.
Cela n’a pas empêché ce dernier d’évaluer la possibilité de rouvrir le restaurant ailleurs, dans un local plus petit.
Il a cependant vite réalisé qu’il ne voulait pas mettre le reste de ses économies dans un domaine aussi incertain.
«J’ai décidé que l’histoire du Biniou s’arrêterait là. Tu peux aimer tes clients très fort, mais parfois, il faut penser à soi aussi», avoue-t-il.
Aller de l’avant
«Je me souviens, lorsque j’avais 16 ans et je travaillais dans la salle, une famille venait manger. Plusieurs années plus tard, un des enfants est revenu avec sa conjointe», raconte Steve Boivin.
Quand ils ont fait l’annonce de la fermeture définitive, les propriétaires ont reçu de nombreux messages d’amour dont plusieurs mentionnaient le désir de les revoir.
Bien que cette histoire soit déchirante pour celui qui y a travaillé pendant 25 ans, il en ressort avec un sentiment d’accomplissement.
Les aspects négatifs pesaient trop dans la balance pour continuer. «On veut aspirer à une vie plus saine et meilleure», souligne M. Boivin.
Ce dernier souhaite remercier les clients qui ont été au rendez-vous toutes ces années et les employés qui ont contribué au succès du Biniou. Sans eux, celui-ci n’aurait pas perdurer pendant tout ce temps.
«On souhaite aux restaurateurs qu’ils réussissent à s’en sortir et que le marché s’améliore pour eux. Qu’ils trouvent le courage de continuer à nous servir malgré les difficultés du domaine», de conclure Steve Boivin avec optimisme.