Cette fois-ci, c’est au tour de François Perreault, ancien vice-président chez Genivar (rebaptisée WSP en 2014) de subir les foudres du conseil de discipline de l’Ordre des ingénieurs du Québec pour son implication de 2002 à 2009 dans le partage de contrats publics alors érigés en système à Laval comme à Montréal.
Fait plutôt inusité, durant toutes ces années, M. Perreault siégeait au conseil de discipline de l’Ordre qui le radie aujourd’hui pour une période de 3 ans en raison de ses «inconduites continues et répétées», qui ont «porté ombrage» et «fait perdre au public la confiance en la profession et la libre concurrence dans le domaine de la construction municipale».
Le 27 juin, on apprenait également qu’il écopait d’une amende de 10 000 $ qu’il devra acquitter dans les 12 prochains mois.
Des 14 sanctions prononcées à ce jour – liées au cartel lavallois des firmes de génie-conseil qui, avec la complicité de l’administration Vaillancourt, permettait de court-circuiter le processus d’appels d’offres -, il s’agit de la 5e plus importante radiation après celles imposées à l’ex-vp chez Dessau Serges Duplessis, radié à vie, Claude Asselin et Claude De Guise, anciennement directeur général et directeur du Service d’ingénierie de la Ville tous deux radiés pour 10 ans, et Yves Théberge, ex-vice-président de CIMA+ exclu de l’Ordre pour 42 mois.
Amende honorable
À l’origine de la plainte disciplinaire, le syndic adjoint de l’Ordre a qualifié de «hors norme» la collaboration de François Perreault à chacune des sept rencontres tenues avec lui. «Le plaignant informe le Conseil que n’eût été cette collaboration à plusieurs niveaux, les sanctions recommandées auraient été beaucoup plus sévères», peut-on lire dans la décision qui tient sur 21 pages.
Rappelant que l’intimé avait collaboré avec les enquêteurs de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) et de la commission Charbonneau, le bureau du syndic soutient que M. Perreault a permis de faire progresser d’autres enquêtes à l’interne et qu’il poursuit sa collaboration, laquelle «lui permet de faire amende honorable».
Comme autres facteurs atténuants à ses «infractions graves», le syndic souligne que l’ex-ingénieur a «plaidé coupable» aux huit chefs portés contre lui, «manifesté des regrets et remords sincères» et n’a pas d’antécédent disciplinaire, jugeant ainsi «comme inexistant le risque de récidive».
Le conseil de discipline s’est finalement rallié à la recommandation conjointe des parties, considérant la sanction proposée comme raisonnable, servant bien l’intérêt public et non de nature à déconsidérer l’administration de la justice.
Condamnation criminelle
Sans emploi depuis 2013, François Perreault, qui affirme n’avoir tiré aucun bénéfice ou avantage personnel de ses agissements, avait également plaidé coupable à l’été 2017 devant la Cour criminelle, cette fois à des accusations de corruption dans les affaires municipales, fraude et complot dans la foulée du scandale lavallois.
Devant le juge de la Cour supérieure James Brunton, qui venait de le condamner à une peine d’emprisonnement avec sursis, M. Perreault avait reconnu le tort énorme causé à la profession d’ingénieurs-conseils. «Je paie cher pour mes gestes impardonnables […] On aurait dû dire non [au système de Laval], quitte à réorienter nos efforts vers d’autres marchés. Bien sûr, on aurait perdu des contrats, mais on aurait préservé notre dignité.»