Les résultats de la dernière enquête sur les effectifs de l’Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec (A.P.E.S.) témoignent des répercussions du manque de pharmaciens sur les soins pharmaceutiques dans les établissements de santé partout au Québec, notamment à Laval.
Selon, l’A.P.E.S., il ne suffit pas de pourvoir les postes vacants; des centaines de pharmaciens supplémentaires sont nécessaires afin d’assurer une couverture juste et équitable en soins pharmaceutiques aux patients du Québec.
Résultats
Dans la région de Laval, voici le taux de découverture recensé au 1er avril 2023, pour les quatre secteurs de soins suivants:
- Dans les urgences, 73% des besoins en pharmaciens pour prodiguer des soins pharmaceutiques sont non comblés, bien que ces soins y soient névralgiques et que des études démontrent qu’un nombre considérable de visites sont attribuables à des problèmes liés aux médicaments;
- En oncologie, 21% des besoins en pharmaciens sont non comblés, alors qu’il s’agit de traitements essentiels à la survie de certains patients;
- Aux unités de soins intensifs et coronariens, auprès des patients hospitalisés, 57% des besoins en pharmaciens pour donner des soins pharmaceutiques sont non couverts, malgré un secteur de soins aigus et l’usage de médicaments complexes pour lesquels le pharmacien détient l’expertise;
- En dialyse rénale, 50% des besoins en pharmaciens sont non comblés, en dépit de la vulnérabilité aux médicaments des patients dialysés dont la capacité de filtration des reins est diminuée.
L’offre de soins pharmaceutiques consiste dans la prise en charge de la médication par un pharmacien présent à l’unité de soins ou à la clinique ambulatoire où sont soignés les patients.
À noter que le pharmacien d’établissement peut travailler au cœur de différents secteurs ambulatoires et unités de soins. Toutefois, dans le cadre de l’enquête sur les effectifs, certains secteurs ont été ciblés.
Besoins
Les besoins en pharmaciens pour offrir des soins pharmaceutiques dans les secteurs ciblés ont été calculés à partir de ratios émanant soit de l’A.P.E.S., soit du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS).
«Les besoins en soins pharmaceutiques ne cessent de croître avec le vieillissement rapide de la population, la multiplication des maladies chroniques ainsi que la complexité et le coût considérable des médicaments, déclare Julie Racicot, pharmacienne et présidente de l’A.P.E.S., par voie de communiqué. L’ensemble de ces facteurs exercent une pression non négligeable sur notre réseau de santé. En l’absence de recrutement suffisant de pharmaciens, la capacité des équipes à offrir aux patients les soins pharmaceutiques nécessaires et à assurer un usage optimal des médicaments est forcément moindre. Le manque de pharmaciens nuit à l’efficience des visites dans les salles d’urgence, notamment en augmentant le temps d’attente, les risques d’incidents et d’accidents médicamenteux ainsi que d’effets indésirables liés aux médicaments, et la durée moyenne des séjours.»
Actions
L’A.P.E.S. demande au gouvernement de valoriser la profession par des gestes concrets, soit d’investir dans le recrutement de personnel et dans des conditions de travail et salaires attrayants pour les pharmaciens d’établissement.
La valorisation de la profession inclut aussi la reconnaissance de la maîtrise en pharmacothérapie avancée, qui prépare à la pratique en milieux de soins aigus et complexes. Pour l’organisation, un titre de spécialiste et une plus grande autonomie doivent être accordés aux pharmaciens diplômés de ce programme.
L’A.P.E.S. demande également au gouvernement de réaliser un nouvel exercice de planification de la main-d’œuvre en pharmacie au Québec compte tenu de l’ampleur des besoins anticipés et de la concurrence croissante entre le réseau public et les pharmacies privées pour le recrutement de pharmaciens.
Enfin, le gouvernement doit travailler de concert avec les facultés de pharmacie afin de rendre le programme de maîtrise plus accessible aux étudiants, par exemple en leur permettant de suivre le bloc de cours à distance. En offrant plus de flexibilité, une telle mesure faciliterait la formation de nouveaux pharmaciens, particulièrement en région.
«À l’automne 2023, le taux d’inscription en pharmacie d’établissement se trouvait parmi les plus bas enregistrés depuis 10 ans, avec à peine quelque 57 pharmaciens qui ont commencé le programme, malgré 114 bourses d’études disponibles, déplore Linda Vaillant, pharmacienne et directrice générale de l’A.P.E.S., dans la même communication aux médias. Il est essentiel de redoubler d’efforts pour attirer et retenir des pharmaciens en établissement. Il est primordial que les établissements de santé soient dotés des professionnels nécessaires pour offrir des soins de qualité et sécuritaires aux patients.» (C.P./IJL)