Aux propriétaires fonciers qui se disent lésés depuis l’entrée en force du Code de l’urbanisme (CDU), le maire Stéphane Boyer a été très clair: «La Ville est pleinement légitime de modifier le zonage pour décider de l’usage, soit commercial, industriel ou résidentiel, et définir ce qui peut être construit sur un terrain.»
En vigueur depuis le 11 novembre dernier, le nouveau Règlement d’urbanisme a entraîné son lot de changements de zonage à la défaveur de certains propriétaires qui ne peuvent plus disposer de leur terrain comme ils le projetaient.
Les Municipalités ont plein pouvoir en matière d’aménagement du territoire, c’est leur «mission première», a rappelé le maire lors de la dernière séance régulière du conseil municipal, où le sujet a retenu l’attention à la période de questions réservée aux citoyens.
«Évidemment, quand on investit pour acheter un terrain, ça vient avec un risque; c’est un gamble» – le maire Boyer
Le droit acquis reconnu par la loi se limite aux seuls usages des bâtiments existants, en chantier ou en voie de l’être en vertu d’un permis dûment délivré par la Ville avant l’entrée en vigueur d’un nouveau règlement de zonage. Pour tous les autres terrains vacants, les propriétaire n’ont aucun recours légal.
Pas sans risque
«Évidemment, quand on investit pour acheter un terrain, ça vient avec un risque; c’est un gamble», a fait remarquer Stéphane Boyer au citoyen qui déplorait que le terrain dont il s’est porté acquéreur en novembre 2021 soit soudainement passé d’un zonage résidentiel unifamilial à un zonage différé. Ce faisant, il n’est plus constructible à court ni à moyen terme.
À l’instar de l’usage, la valeur d’un terrain demeure tributaire des orientations prises par les administrations municipales, fait valoir le premier magistrat.
Par exemple, un lot vacant dans une zone où la hauteur maximale des tours serait revue à la baisse perdrait en valeur. À l’inverse, le maire évoque ceux qui avaient acquis une terre agricole à 10 cents le pied carré dans l’est de Laval et dont la valeur a centuplé le jour où le zonage a changé.
«Je comprends que ça peut être frustrant quand on achète un terrain et qu’un jour le zonage change et […] qu’on ne peut pas construire ce qu’on souhaitait construire au départ, mais ça reste un droit fondamental de la Ville», a-t-il poursuivi.
Zéro compensation
Une heure plus tôt, Alain Boilard, qui possède un lot dans le prolongement de la rue Teasdale dans le quartier Auteuil, expliquait qu’il a dû faire le deuil de son projet d’auto-construction.
«Depuis l’adoption du nouveau CDU, notre terrain est désormais zoné protection, malgré le fait qu’il fasse partie du TOD [Transit-oriented development] près de la gare Sainte-Rose», a-t-il indiqué. À l’époque, le Service de l’ingénierie lui avait confirmé que les études environnementales menées par Québec autorisaient la Ville à ouvrir de nouvelles rues.
«J’aimerais savoir si la Ville a l’intention d’offrir une compensation financière aux propriétaires touchés par le changement de zonage puisqu’on ne peut plus rien faire avec notre terrain acheté de bonne foi pour construire une nouvelle maison?»
Les Municipalités ne compensent pas les propriétaires lésés, lui a répondu le maire. Cela dit, la Ville rachète parfois des terrains lorsque ceux-ci se trouvent dans un milieu naturel d’intérêt, a-t-il enchaîné tout en invitant M. Boilard à prendre contact avec le Bureau municipal des transactions immobilières.
De fait, la présence de milieux humides au nord de la rue Thibault justifierait l’attribution d’un zonage protection. «C’est pour ça qu’on demande de construire sur de plus grands lots, pour laisser plus de place à la nature. La Ville est dans ses droits; on l’a fait dans plusieurs endroits.»
Cette contrainte force les propriétaires de petits lots à vendre à un promoteur ou à racheter leurs voisins afin de respecter les nouvelles dispositions au règlement d’urbanisme.
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