Conseiller municipal de Vimont, Michel Poissant n’a commis aucun des manquements allégués dans la citation déontologique déposée au printemps dernier par la Direction du contentieux et des enquêtes (DCE) de la Commission municipale du Québec (CMQ).
Voilà la décision à laquelle en est arrivé le juge administratif Me Denis Michaud, également vice-président de la CMQ.
Dans sa décision rendue le 13 octobre, Me Michaud rejette les 36 manquements au Code d’éthique et de déontologie des élus de la Ville de Laval et de leurs employés politiques dont on accusait Michel Poissant.
En clair, on lui reprochait d’avoir transgressé trois articles du Code, et ce, à 12 reprises entre novembre 2019 et janvier 2021. En cause: le fait d’avoir réclamé à la Ville le remboursement des honoraires de Nathalie Hotte à titre de dépense de recherche et de soutien, alors que M. Poissant et Mme Hotte débutaient une relation amoureuse en novembre 2019. En vertu d’un contrat de service, Nathalie Hotte effectuait, entre autres, depuis septembre 2018 la rédaction de publications et la gestion de la page Facebook du conseiller municipal.
Acte d’influence
À la première journée d’audience, le 14 septembre, le Tribunal a disposé sur-le-champ de la troisième question en litige, affirmant que M. Poissant ne s’était pas prévalu de sa fonction pour influencer la décision des employés du Service des Finances de la Ville afin de favoriser son intérêt personnel ou celui de sa compagne.
«[…] interpréter la présentation d’une demande de remboursement à la Ville comme étant un acte d’influence ou une tentative d’influence auprès d’un fonctionnaire est déraisonnable», écrit le juge Michaud, précisant que cela «reviendrait à le priver de ses droits, ce qui est un non-sens». Il rappelle au passage que la Ville met à la disposition de tous les conseillers un budget de recherche et de soutien à hauteur de 40 000 $ par année, qu’ils utilisent comme ils veulent dans la mesure où les dépenses effectuées sont autorisées par le Règlement.
«Nous ne sommes pas dans la situation d’un élu qui utilise son statut de conseiller pour exercer une pression indue sur un fonctionnaire ou pour le menacer dans le but de favoriser son intérêt ou celui d’un proche», peut-on également lire dans la décision.
Conflit d’intérêt
Autre litige à trancher: le fait pour un élu de donner un contrat à un proche et d’en demander le remboursement à la Ville peut-il entrer en conflit avec les devoirs de sa fonction?
«Puisque le contrat de service avec Mme Hotte n’est pas un contrat municipal, qu’il ne lie pas la Ville, il n’interfère pas avec les devoirs de sa fonction, note le juge en parlant de Michel Poissant. L’utilisation de son budget de recherche et de soutien est discrétionnaire, la seule obligation étant de ne réclamer le remboursement de dépenses que pour ce qui est autorisé par le Règlement.»
Cela dit, le magistrat apporte cette nuance: «En règle générale, le fait qu’un élu accorde un contrat à un proche et qu’il se fait rembourser par la Ville est éthiquement questionnable. Mais, il faut rappeler que ce sont les règles déontologiques, et non les principes ou les valeurs éthiques, qui lient l’élu municipal.»
À cet égard, il signale que le Règlement municipal n’interdit pas la conclusion d’un contrat de service ou d’un contrat de mandataire entre un élu et un proche et qu’il n’appartient pas au Tribunal de se substituer au conseil municipal et de légiférer à sa place.
Par ailleurs, Me Michaud fait valoir que selon les prétentions de la poursuite, tous les élus municipaux de Laval ayant confié à leur parti politique un contrat de gestion ou un contrat de service contreviennent au Code, même s’ils respectent le Règlement.
Pour les mêmes motifs, le Tribunal en arrive à la même conclusion quant à savoir si l’élu de Vimont a, dans l’exercice de ses fonctions, favorisé son intérêt personnel ou celui de sa conjointe de fait en demandant le remboursement des honoraires de cette dernière à la Ville de Laval.
Réputation rétablie
À moins d’un mois du scrutin municipal, cette décision arrive à point nommé pour Michel Poissant, lui qui brigue la mairie à la tête de Laval citoyens, parti qu’il a fondé en décembre 2020. «L’intégrité pour moi, ce n’est pas négociable», a-t-il réitéré au Courrier Laval, pleinement satisfait de la décision qui rétablit aujourd’hui sa réputation.
Dans un communiqué publié le lendemain, 19 octobre, M. Poissant revient sur les dénonciations qui ont conduit, en mai dernier, à sa citation à comparaître, les qualifiant d’«attaque à caractère politique en pleine campagne électorale».
Il enchaîne aussitôt en rappelant, d’abord, la double condamnation du maire sortant Marc Demers en 2018 à la suite de procès en lien avec le financement politique intenté par le Directeur général des élections du Québec (DGEQ) et en diffamation dans la cause portée devant les tribunaux par l’ex-élu Pierre Anthian, aujourd’hui chef du parti Ma ville maintenant et candidat à la mairie.
Puis, Michel Poissant souligne que le DGEQ poursuit l’élue sortante et candidate d’Action Laval Isabella Tassoni à qui il reproche d’avoir transgressé la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités (LERQ) à l’automne 2017 alors qu’elle faisait équipe avec le Mouvement lavallois.
Enfin, l’aspirant maire termine sur une enquête en cours du DGEQ dont le Mouvement lavallois fait l’objet. Les faits remontent à la campagne électorale de l’automne 2019 lors de l’élection partielle dans le district Marc-Aurèle-Fortin. Selon l’opposition officielle, le plaignant dans cette affaire, le parti au pouvoir aurait fait paraître des «publicités partisanes» dans des journaux régionaux – dont le Courrier Laval – payées à même les fonds publics, ce qui aurait eu pour effet de dépasser le plafond des dépenses autorisées.