(Dernière mise à jour: 7 février 22h05)
Pour le maire Stéphane Boyer, les Municipalités n’ont pas à faire les frais d’une mauvaise planification des besoins en électricité au Québec.
En entrevue au Courrier Laval, le 1er février, il réagissait à l’annonce du ministre de l’Environnement Benoît Charette, dont l’intention est de venir encadrer l’utilisation du gaz naturel dans le secteur des bâtiments – prioritairement les nouvelles constructions – alors que plusieurs Villes cherchent à l’interdire dans les nouveaux développements résidentiels.
Le gouvernement veut ainsi assurer «une transition cohérente et ordonnée vers les énergies vertes, en tenant compte des capacités d’Hydro-Québec».
«Je trouve dommage qu’on soit rendu à freiner certains développements domiciliaires comme on voit sur la Rive-Sud ou à empêcher les Villes de faire un virage plus écologique alors que ça semble être une mauvaise planification du développement de l’énergie au Québec; ça, ce n’est pas la faute des Villes.»
La veille de cette sortie publique du ministre Charette, le 29 janvier, Radio-Canada révélait qu’un projet d’écoquartier de 3800 unités d’habitation à Saint-Bruno-de-Montarville, qu’on souhaite exempt de gaz naturel, avait valu à la Municipalité un avis défavorable d’Hydro-Québec.
Biénergie, le mode privilégié
La société d’État encourage plutôt la biénergie pour lutter contre les changements climatiques. Le même message avait d’ailleurs été passé à la Ville de Laval en avril 2023 après que le conseil municipal a manifesté son intention d’interdire le gaz naturel, source d’énergie d’origine fossile, dans les nouvelles constructions résidentielles.
«Dans un objectif de décarboner, la biénergie est un outil intelligent», faisait alors valoir le porte-parole d’Hydro-Québec tout en rappelant la forte pression que la transition énergétique exerce sur la production d’électricité. Par exemple, le recours au gaz naturel comme source d’appoint permet à Hydro-Québec de suffire à la demande lors des périodes de pointes hivernales, rappelait-il.
Des priorités à revoir
S’il veut réduire de 37,5 % les émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2030 et à atteindre la carboneutralité en 2050 comme il s’y est engagé, le gouvernement devra revoir ses priorités laisse entendre le maire Boyer.
«On a fait le choix de vendre notre énergie à plusieurs États américains et à plusieurs grandes entreprisses pour les attirer chez-nous, c’est correct, mais visiblement on a mal planifié la consommation énergétique au Québec, observe le premier magistrat de Laval. Je ne veux pas que ce soient les Villes qui paient le prix de ça ni que ça vienne empêcher le développement résidentiel ni freiner le verdissement de nos bâtiments».
À cet égard, Stéphane Boyer rappelle l’octroi de 65 M$ obtenu de Québec, il y a à peine un an, en soutien à son Plan climat qui prévoit, entre autres, la décarbonation des bâtiments.
«C’est un peu ironique, d’un côté, de donner de l’argent aux Villes pour électrifier les bâtiments et, de l’autre côté, de les empêcher [d’électrifier à 100 %]», soutient-il.
Rappelons que d’ici 2035, Laval s’est engagée à réduire ses émissions de GES de 33 % sous le niveau de 2018.
Laval aux barricades
Pas plus tard que le 5 décembre dernier, le conseil municipal de Laval avait unanimement dénoncé la procédure intentée par Énergir contre la Ville de Prévost pour faire invalider son règlement sur la décarbonation (le distributeur gazier allait finalement retirer son recours en justice moyennant certains ajustements à la réglementation municipale aujourd’hui en vigueur). D’autant plus que, huit mois plus tôt, les élus lavallois avaient mandaté la direction générale de plancher sur un règlement qui allait dans le même sens.
Dans une résolution qui fut notamment transmise aux ministres de l’Environnement Benoît Charette, de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie Pierre Fitzgibbon et des Affaires municipales et de l’Habitation Andrée Laforest, la Ville de Laval réaffirmait du coup «que les Municipalités sont reconnues comme des gouvernements de proximité au sens de la loi et qu’il est impératif de respecter leur champ de compétences et leur autonomie, y compris en matière de lutte contre les changements climatiques».