Le Conseil régional de l’environnement (CRE) de Laval demeure sur ses positions, réitérant son opposition à l’emplacement retenu pour l’implantation du mégaprojet révisé de Cité du cinéma porté par Trudel Studios, dont le sort sera scellé mardi prochain, 30 janvier.
Dans un mémoire de 25 pages, l’organisme – dont la mission est de protéger l’environnement et de promouvoir la transition socioécologique – déplore d’emblée le processus de consultation qui «n’est pas à la hauteur de l’ampleur du projet et des enjeux qu’il soulève».
Quant aux questions du public laissées en suspens lors de l’assemblée du 13 décembre, la Ville a mis un mois avant d’y répondre. Les réponses «promises» n’ont été partagées sur la page Web dédiée au projet que la veille de la clôture de la consultation écrite, ce qui «laisse planer le doute sur la réelle volonté de transparence à l’égard du projet», écrit le CRE.
Le CDU «bafoué»
Co-auteurs du mémoire, la directrice générale du CRE, Élodie Morandini, et le responsable des milieux naturels, Alexandre Choquet, reprochent à la Ville d’avoir transgressé à la première occasion les nouvelles règles qu’elle s’est donnée, visant à encadrer le processus de changement de zonage inhérent à l’introduction des Secteurs de zonage différé (SZD) au Code de l’urbanisme (CDU).
«Deux ans à peine après l’adoption de l’ambitieux et novateur Code de l’urbanisme, voilà qu’on bafoue sa portée et sa vision, discréditant l’important travail de consultation et de concertation ayant permis l’adoption de ce document. Le CRE de Laval comprend très mal qu’un secteur initialement voué à devenir un écoquartier, dont le développement serait soumis à l’approbation d’un Plan d’aménagement d’ensemble (PAE) et à la consultation publique, puisse soudainement être construit de plein droit par un simple changement au Schéma d’aménagement et de développement révisé (SADR) de la Ville de Laval.»
Ce constat amène l’organisme à se «questionner sur la réelle volonté de l’administration lavalloise de se conformer aux orientations de son propre CDU dans les autres secteurs de zonage différé (SZD) présents sur l’île Jésus, comme le secteur du Parc de Lyon (rue Cyrille-Delage, à Vimont) ou les différents golfs de l’ouest de l’île Jésus».
Pour une révision en profondeur du projet
Dénonçant «l’absence d’amélioration réelle» dans la seconde mouture du projet par rapport à sa version initiale – que le Service de l’urbanisme avait torpillée dans un rapport accablant en 2022 –, le CRE en appelle à une révision en profondeur du projet à la faveur d’un processus de cocréation impliquant les élus, les citoyens et les parties prenantes du développement social et culturel lavallois.
«Il est difficile de conclure à une amélioration du projet, les gains véritables se limitant à une réduction de 3 % de la surface minéralisée du site, passant de 47 à 44 % de surface carrossable. Ces retouches esthétiques n’améliorent en rien l’intégration du complexe dans le milieu environnant et ne donnent certainement pas l’impression que le promoteur ou la Ville de Laval [a] pris au sérieux les inquiétudes soulevées lors de la consultation de 2022 pour le même projet. Ces modifications ne sont pas à la hauteur des ambitions de la Ville de Laval, qui ne cesse de promouvoir des normes urbanistiques innovantes», peut-on lire.
Le mémoire cite, entre autres écueils, l’impact sur le déploiement d’une rue collectrice (avenue Huguette-Gaulin) projetée dans l’axe nord-sud devant relier le boulevard Lévesque à l’avenue Marcel-Villeneuve de même que sur la construction d’une école de quartier, dont le Centre de services scolaire de Laval espérait la livraison en 2024. «Cet aspect est pourtant toujours absent de la nouvelle proposition de Trudel Studios», se désole le CRE.
Gestion des eaux pluviales
Le Conseil régional de l’environnement souligne à nouveau sa «profonde inquiétude quant à la volonté de la Ville de livrer une planification audacieuse et en tout respect de la capacité de support des écosystèmes de l’est de Laval».
À ce propos, l’organisme «exige que des aménagements de gestion durable des eaux pluviales (GDEP) soient intégrés au projet afin [notamment] de maintenir l’alimentation en eau du fossé en cour arrière du site […] qui constitue par ailleurs un habitat du poisson et abrite une grande population d’amphibiens».
À l’égard de ce «très long lit d’écoulement continu qui rejoint le cours d’eau #8 [se trouvant plus au sud dans la portion du secteur Val-des-Ruisseaux], le CRE exige aussi qu’on analyse l’ampleur de son bassin versant afin de préciser si nous sommes ici en présence d’un cours d’eau ou d’un fossé.
Prêcher par l’exemple
On réclame également de l’administration Boyer qu’elle «impose l’exemplarité des projets qu’elle promeut sur les terrains dont elle est propriétaire, notamment en termes de certification pour les bâtiments durables et [l’]efficacité énergétique».
Enfin, évoquant l’ancienne vocation agricole du site retenu pour le complexe de studios de cinéma, le CRE termine en insistant sur le besoin «impératif» de protéger les terres cultivées en zone blanche, lesquelles totalisent plus de 200 hectares de superficie dans le seul secteur de Saint-François. Le maire Stéphane Boyer a d’ailleurs fait une sortie publique cette semaine en lien avec cette demande.
Rappelons que le controversé projet de complexe cinématographique Trudel Studios connaîtra son sort mardi prochain, le 30 janvier, à l’occasion d’une séance extraordinaire du conseil municipal.
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