Le Nico-Bar s’est arrêté à Laval le 12 octobre à l’École hôtelière et d’administration de Laval, afin de sensibiliser les jeunes à la toxicité de la cigarette et du vapotage.
Créée par la Société canadienne du cancer (SCC) en 2018, la tournée fait le tour du Québec ciblant les 18 à 24 ans, avec ses animateurs à l’allure de savants fous servant des shooters au cyanure avec arrière-goût de naphtalène.
L’activité inclut autant le tabac que la vapoteuse devenue très répandue chez les jeunes. Selon une étude faite en 2021, 30% des jeunes de 15 à 24 ans ont déclaré avoir vapoté au moins une fois au cours des 30 jours précédant le sondage.
La tournée s’arrête principalement dans des centres de formation professionnelle (CFP).
Cocktail au goudron
À la manière d’Astérix avec son pudding à l’arsenic, les animateurs du Nico-Bar mixent des shooters selon les habitudes de consommation du participant.
L’idée est de sensibiliser les jeunes aux produits toxiques qu’ils consomment quand ils prennent une bouffée de cigarette ou vapoteuse.
Les shooters imitent, entre autres, le mercure, qui est aussi utile dans les thermomètres; ou encore l’ammoniac, qu’on retrouve dans le détergent. Le résultat a un goût répugnant qui marque l’esprit des participants.
Un filtre prend aussi l’apparence d’un rat – comprendre ici que les jeunes qui vapotent sont des cobayes de laboratoire devant le manque de recherches et d’études concernant les conséquences du vapotage.
L’activité de sensibilisation se décline aussi sur le web depuis la pandémie. La tournée propose aussi un défi de cessation de fumer. Le but «ce n’est pas qu’ils arrêtent d’un coup mais «qu’il prennent leur temps et quand ils sont prêts, ils ont toutes les ressources», note Camille Meunier, coordonnatrice de la tournée.
Cibler les besoins
Par cette approche, la Société canadienne du cancer «voulait trouver un concept qui allait vraiment avoir un impact», explique Michèle Fyfe, gestionnaire de projet. L’idée d’un bar ambulant collait avec la réalité des jeunes auxquelles elle s’adressait. «C’est une campagne qui est dynamique et attire la curiosité», ajoute-t-elle.
Selon l’animatrice Victoria Léon, les participants s’amusent avec le concept qui est plus marquant qu’«une conférence où les jeunes auraient plus tendance à être sur leur cell».
Le choix de faire la tournée dans des CFP avait aussi pour but d’aller chercher une clientèle en particulier.
Les études montrent que le «taux de tabagisme sur le marché du travail dans les métiers manuels comme la construction, cuisine, foresterie, est plus élevé que les autres types de corps de métier», relate Michèle Fyfe.
Le projet a évolué au fil des années, la vapoteuse ayant pris plus de place qu’auparavant. «Ils l’ont rajouté plus récemment et ça va encore être plus poussé une fois qu’il va y avoir plus de recherches», souligne Camille Meunier.
Même si plusieurs effets sont encore méconnus, l’inquiétude de la SCC demeure. C’est aussi «pour protéger les jeunes et qu’ils ne deviennent pas dépendants à la nicotine et transfèrent à la cigarette ensuite», affirme Michèle Fyfe. Cette addiction peut venir avec des conséquences psychologiques et physiques même avec la cigarette électronique.
L’image du bar pourrait aussi éventuellement être retravaillée. «On ne veut pas faire la promotion d’une autre dépendance», explique Michèle Fyfe.
Concept apprécié
Que les participants consomment ou pas, «tout le monde apprend quelque chose» au Nico-Bar, dit Victoria Léon.
Le ton non moralisateur et sarcastique en surprend plus d’un. «Il y en a qui prennent vraiment ça au sérieux et qui pensent qu’on leur sert vraiment des produits toxiques», raconte Camille Meunier.
L’étonnement vient aussi de la découverte de la nature des produits qu’ils consomment. «Il y a en a beaucoup qui sont dégoûtés par le fait qu’ils ne savaient pas ce qu’étaient les ingrédients qu’il y avait dans la vapoteuse», ajoute-t-elle.
La SCC est très heureuse de voir que la sensibilisation, depuis plusieurs années, fonctionne et entend bien continuer la tournée. «Le projet fonctionne très bien, les inscriptions se remplissent en une semaine», souligne Michèle Fyfe, en spécifiant que c’est une des rares activités clé en main qui se déplace dans toutes les régions.
La nouvelle loi autorisant uniquement les vapoteuses à saveur de tabac ravit la SCC. «On espère que ça va freiner les jeunes à essayer le vapotage, on sait que c’est un gros incitatif», affirme Michèle Fyfe.