L’administration Boyer entend ne plus publier dans les journaux ses avis publics, ce qui se traduirait par une économie annuelle estimée à quelque 100 000 dollars pour la municipalité.
Un avis de motion à cet effet a été déposé en janvier et doit être débattu et adopté lors de la prochaine assemblée du conseil, ce mardi 4 février.
«Ce règlement nous permettra donc de diffuser les avis publics uniquement sur la télévision à l’entrée de l’hôtel de ville et sur notre site Internet, sans devoir publier dans un journal local», écrit le Service du greffe dans sa recommandation auprès du comité exécutif de la Ville.
Rappelons que depuis l’adoption du projet de loi 122 sur l’autonomie municipale par le gouvernement Couillard, les Villes ne sont plus tenues de faire paraître leurs avis publics dans un journal diffusé sur le territoire de la municipalité.
«[…] comme le permet la Loi sur les cités et villes depuis 2017, les Municipalités ont le droit de se soustraire de l’obligation légale de publier dans le journal local en adoptant un règlement à cet effet», indique dans un échange de courriels le conseiller aux affaires publiques à la Ville, Jonathan Lévesque.
Ces avis publics dont il est question informent les citoyens de décisions municipales, notamment celles liées au processus d’adoption des règlements et de la procédure d’approbation référendaire dans le cas d’un changement de zonage, par exemple.
Motifs
«Cette décision de la Ville de Laval permettra plus d’agilité pour la diffusion des avis, lesquels sont d’ailleurs accessibles à la population en tout temps via notre site web. Elle s’inscrit dans un contexte d’optimisation des ressources budgétaires afin de rationaliser nos dépenses et dégager des économies nous permettant de faire face aux pressions exercées, notamment par l’augmentation des coûts des biens et services», fait valoir M. Lévesque.
«Gatineau, Terrebonne, Saint-Jean-sur-Richelieu, Québec et plusieurs autres villes de plus petites tailles procèdent de cette façon pour la diffusion de leurs avis publics», précise-t-il.
Cela dit, «les appels d’offres [préparés par le Service du greffe] continueront d’être publiés dans le Courrier Laval», soutient le porte-parole de la Ville tout en ajoutant «que depuis 2020, le Service des communications et du marketing a augmenté de 75 % ses investissements annuels dans l’ensemble des médias locaux et de 63 % dans le Courrier Laval».
FNCC-CSN stupéfaite
La présidente de la Fédération nationale des communications et de la culture (FNCC-CSN), Annick Charette, n’a pas caché sa stupéfaction face à cette décision de l’administration lavalloise.
«Ça me surprend tout le temps de voir [des Municipalités] avoir ce genre de comportements et se désengager du maintien de l’information locale», précise au téléphone celle dont l’organisation a entrepris en 2024 une tournée québécoise sous le thème L’information, un bien public.
«C’est vraiment contreproductif; on se bat sur tous les fronts pour maintenir l’information locale et soutenir les médias locaux. Je trouve ça complètement inconséquent […] c’est manquer de conscience et de vision», peste Mme Charette, qui invite au passage le maire Stéphane Boyer à venir discuter de l’avenir de l’information locale le lundi 24 février alors que la tournée de la FNCC s’arrêtera au Cosmodôme de Laval.
Sa prédécesseur, Pascale St-Onge, aujourd’hui ministre fédérale, partageait en 2017 l’inquiétude de la Coalition pour la pérennité de la presse d’information au Québec liée à l’adoption du projet de loi 122 qui devait, entre autres, abolir la publication obligatoire des avis publics dans les journaux de la province. «Cette nouvelle coupure dans les revenus des médias écrits accélèrera cette tendance marquée de fermetures des journaux régionaux», avait-elle déclaré lors des auditions publiques entourant le projet de loi.
Coalition syndicale et patronale
En juin dernier, alors que la crise des médias sévit déjà depuis 15 ans, la FNCC et la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) faisaient cause commune, publiant une lettre ouverte où ils appelaient les 3 paliers de gouvernement et les communautés à se mobiliser pour renverser la tendance. Cette coalition syndicale et patronale exhortait notamment les Municipalités à adopter des gestes concrets pour favoriser la distribution et le rayonnement des médias de leur territoire.
«C’est la responsabilité de tous de faire en sorte que les médias retrouvent une santé», soutient encore aujourd’hui Annick Charette, sans quoi des régions entières risquent de se transformer en «déserts d’information» prévient-elle.
Coup dur
Vice-président aux opérations chez 2M.Media, l’agence possédant le Courrier Laval, Patrick Marsan accuse le coup, lui qui n’a rien vu venir.
«C’est d’autant plus surprenant que, récemment, la Ville a démontré son soutien envers les médias locaux en augmentant ses achats publicitaires. Ce geste avait envoyé un message fort sur l’importance de préserver une presse locale dynamique et accessible à tous», mentionne M. Marsan tout en rappelant les «défis financiers importants» auxquels font face les médias avec l’exode des revenus publicitaires vers les géants du web.
Le retrait des avis de règlement, c’est un manque à gagner de 127 000 dollars par rapport à l’an dernier, ce qui représente une moyenne de quatre pages par semaine dont deux consacrées au service de la rédaction. «C’est énorme, considérant que notre édition imprimée publie en moyenne 20 pages», ajoute celui qui poursuit les investissements dans le soutien et le développement des infrastructures numériques.
Décision difficile
Cette décision économique n’a pas été prise de gaieté de cœur, soutient le maire Stéphane Boyer.
«Je suis très sensible au besoin d’avoir des médias qui sont forts, surtout dans un contexte lavallois où on est parfois dans l’ombre médiatique de Montréal», enchaîne le maire au téléphone.
Quant au choix de sortir les avis publics des journaux, il s’inscrit dans la foulée d’«un exercice budgétaire» où la direction de tous les services municipaux devait revoir leurs pratiques et dégager des économies.
«On sait que les finances publiques, c’est plus difficile avec l’inflation qu’on vit. Dans la dernière année, il y a eu un effort important de contrôler les dépenses», termine Stéphane Boyer, qui en donne pour preuve le gel des embauches.
Le budget de fonctionnement de la Ville de Laval en 2025 s’élève à 1,2 milliard de dollars, soit 4,5 % de plus qu’en 2024.
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