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Jean-Pierre Hamel et Sylvie Beaudet n’auront pas vu grandir leur garçon. Il a d’abord été accueilli par une tante et sa petite famille, arrivant dans un nouveau milieu à l’école Des Ormeaux.
« Malgré tout ce qu’il a vécu, il est devenu un jeune homme responsable avec une bonne tête sur les épaules, de confier Sylvain Archambault, fortement ému. Mes enfants s’étaient liés avec lui à l’école, alors qu’une tante de Laval l’avait accueilli chez elle. Je ne sais pas s’il était fort avant ce drame ou si ça l’a changé, mais on voit qu’il est plus mature que la majorité des gars de 18 ans. C’est un vrai gentleman. »
Hasard de la vie, M. Archambault avait connu le père de l’orphelin du côté de Montréal-Nord. Joueur, arbitre, entraîneur, comme lui, Jean-Pierre Hamel était un passionné de baseball.
« C’était un grand bénévole, très impliqué, toujours respectueux et souriant, souligne le résident de 51 ans de Duvernay qui travaille en tant que représentant syndical pour la fonction publique fédérale. Nous voyons moins son fils aujourd’hui, mais nous le considérons encore comme un membre de la famille. »
Voisins directs
Installé sur le boulevard de la Concorde, tout juste à l’ouest de l’autoroute 19, depuis son arrivée de France au début des années 1980, Claude Canton a entendu un « épouvantable boum alors que j’étais à repeindre la porte de mon garage, se souvient le propriétaire du Centre Dermo-Hygiène Lilian Morel. Puis c’était la surprise totale de voir ces 750 tonnes de béton par terre, une fois que je suis descendu en bas, en apercevant le tablier du viaduc effondré. »
M. Canton se souvient d’une conductrice étant sortie de son véhicule pour stopper la circulation. « Rapidement, nous avons eu des demandes de reporters de s’installer dans notre stationnement, en plus de la visite de l’ancien maire Vaillancourt qui y donnait des entrevues. Ç’a duré une bonne semaine. »
Du côté Est, une Maria Rego paniquée a cru vivre un tremblement de terre, morte de peur de savoir son fils et son mari bientôt de retour du travail. « Je m’affairais au ménage de ma chambre, en préparant le dîner tranquillement, comme tous les samedis, raconte la citoyenne habitant cette résidence de Duvernay depuis 1999. Je suis sortie pour voir. Ma voisine a traversé la clôture de nos terrains pour me rejoindre. »
Mme Rego n’a jamais oublié le viaduc sectionné en deux, le « L » d’une cabine de camion lourd ayant freiné tout juste avant la coupure, un autobus et un motocycliste immobilisés, ainsi qu’une masse de gens incrédules affluant aux abords des décombres.
Bonjour les curieux
À quelques mètres du drame, sur le Croissant Hameury qui borde le muret est de l’autoroute 19, à l’angle du boulevard de la Concorde, la stupeur n’a eu d’égal que l’effroi et l’incrédulité devant l’ampleur du désastre.
« Je m’étais levé tôt et déjeunais pendant que mes parents se reposaient encore au lit, confie Léo Lopez qui avait 15 ans lors de ce jour funeste. J’ai senti une secousse et pensé que notre nouvelle piscine venait de céder comme l’ancienne. Il y avait beaucoup de vent. Je me suis approché de la fenêtre du solarium où je vois le bout de muret qui est dans notre cour. Il manquait le viaduc, un autobus était immobile et des gens courraient! »
Le jeune Léo se souvient que ses parents étaient ébranlés, eux qui avaient décidé de faire des courses et avaient changé leur routine la veille, en empruntant le boulevard Lévesque plutôt que le viaduc de la Concorde. Lui et son voisin ont également accepté de prêter des échelles aux gens des médias voulant observer la scène de leur propriété.
Bien qu’à cet instant, Nada Zouenawad coupait des cheveux dans un salon de coiffure situé derrière le centre Duvernay, elle a bien entendu le bruit infernal de l’écroulement.
« C’est mémorable, déclare la Lavalloise avec peine. L’électricité était coupée. Tout le monde venait dans notre jardin pour espérer apercevoir ça. Moi, je pensais que sous ce béton affaissé, il y avait des gens. Chaque fois que je passe par là, je me demande : va-t-il tomber à nouveau? »
« Quand je pense que deux viaducs se sont écroulés en dedans de six ans, ajoute Claude Canton. Faut espérer que ça ne se reproduise jamais. »