Louise Bégin est proche aidante pour son mari Michel St-Jacques, atteint d’apraxie. Elle-même diagnostiquée d’insuffisance rénale aiguë, elle a accepté de témoigner de sa réalité au Courrier dans le cadre de la Semaine nationale des proches aidantes.
Louise et Michel sont mariés depuis 52 ans et résident dans une lumineuse maison à Laval-sur-le-Lac, en bordure de la rivière des Mille Îles.
« On s’est rencontrés en cours de musique, se rappelle Louise en souriant. C’était le seul garçon et c’est moi qui ai mis le grapin dessus (rires). »
Excellent violoniste accompagné de sa femme au piano, le couple fit le tour des salles de spectacle et dynamisèrent les événements marquants de leurs proches.
« Je n’ai pas peur de le dire : j’ai marié l’homme le plus romantique du Québec, affirme Louise. On s’est mariés un 4 juillet et, par la suite, tous les 4 de chaque mois pendant 48 ans, il me surprenait d’un cadeau pour célébrer un mois de plus ensemble. »
Un jour, les cadeaux ont cessé. Ce fut un des signes précurseurs. Les petits oublis et les distractions mises sur sa personnalité d’artiste prirent finalement une tout autre signification.
Proche aidante
Il y a quatre ans, Michel fut diagnostiqué d’apraxie, une maladie dégénérative sous le chapeau de l’Alzheimer.
« Il ne sait plus comment faire des gestes du quotidien, comme mettre des bas ou se raser, explique Louise. »
Ce ne sont donc pas ses capacités langagières ou ses fonctions motrices qui sont principalement touchées par la maladie.
Malgré ce diagnostic bousculant, Michel, totalement conscient de sa situation, remis lui-même son permis de conduire au médecin.
« Le médecin n’avait jamais vu ça en plusieurs années de carrière, raconte Louise, les yeux brillants. Michel a cette capacité très rare d’être capable de mettre des mots sur ce qu’il vit. »
Depuis ce jour, Louise a ajouté les multiples tâches découlant du rôle de personne proche aidante à sa liste.
Cette fonction se définit officiellement par toute personne qui apporte un soutien à quelqu’un qui présente une incapacité permanente ou temporaire, peu importe la nature de cette-dernière.
Officieusement, il n’existe pas de définition précise de ce rôle précieux, même s’il y a près de 1 500 000 proches aidants au Québec.
« Il n’y a pas de description de tâches pour les proches aidants. Tu fais ce que tu as à faire et c’est tout. »
– Louise Bégin, proche aidante pour son mari Michel St-Jacques.
Outils
Les proches de Michel eurent beaucoup de difficulté à accepter le diagnostic. Étant donné la nature de la maladie, elle évolue sans préavis et l’entourage doit s’adapter rapidement.
« Plus ça va et moins il est capable de faire de choses, explique Louise. À chaque fois qu’il ne peut plus réaliser quelque chose, ça doit tomber dans la cour de quelqu’un. »
L’Association Lavalloise des Proches Aidants (ALPA) fut l’une des premières ressources à donner un coup de main au couple.
Le rôle de cette organisation est de soutenir, informer, accompagner et sensibiliser la population à la réalité des proches aidants. En offrant des services comme l’organisation d’activités sociales, de formations et l’offre de répit à domicile, ils changent la vie des personnes aidantes.
« Être proche aidant, c’est être obligé d’accepter qu’on devienne isolé, témoigne Louise. On voit moins certains amis, la famille, mais on passe tellement plus de temps de qualité ensemble. Cette réalité nous a beaucoup rapprochés. Je n’aurais pas pensé que ma vie me destinait à ça, mais je suis heureuse de le faire. »
Michel utilise aussi beaucoup Siri, l’assistante virtuelle de commande vocale, pour répondre à ses questions. Sa chambre est adaptée à ses besoins avec un cadran numérique qui précise la date ainsi que le moment de la journée afin de l’aider à se situer dans le temps.
Second diagnostic
Il y a deux ans, Louise a elle-même reçu un diagnostic surprenant : insuffisance rénale aiguë stade cinq (terminal). Pour continuer de vivre, elle doit faire des traitements d’hémodialyse plusieurs fois par semaine. L’hémodialyse consiste à suppléer les reins déficients en épurant le sang à l’aide d’une machine.
Pendant un an et demi, elle se déplaçait à l’hôpital trois fois par semaine très tôt le matin afin de recevoir son traitement et revenait en début d’après-midi, épuisée, à la maison, pour prendre soin de Michel.
Aujourd’hui, la machine de survie est dans sa chambre et Louise a suivi une formation de plusieurs heures pour pouvoir se traiter elle-même. Elle l’a baptisée affectueusement Alma, comme sa mère, puisqu’elles lui donnent toutes deux la vie.
« Je me sens revivre, confie Louise. Je suis allé marcher seule récemment et j’étais si heureuse de sentir le vent dans ma figure que j’en pleurais de joie. Je suis en survie et heureuse de l’être. »
Demander de l’aide
Le meilleur conseil de Louise pour les autres personnes aidantes, c’est de ne pas hésiter à demander de l’aide.
« On a de bons services, assure Louise. La seule chose qu’il faut que les gens apprennent, c’est demander, préciser quels sont leurs besoins pour obtenir de l’aide. Aujourd’hui, les préposés font pratiquement partie de la famille. Ce sont des anges. »
L’ALPA, la Société Alzheimer Laval et Centre intégré de santé et de services sociaux de Laval continuent aujourd’hui à contribuer au bien-être de l’heureux couple.