Il y a 15 ans, l’animateur Marius Brisson présentait le nouveau maestro de l’Orchestre symphonique de Laval devant une chaleureuse assemblée réunie dans le foyer de la salle André-Mathieu. Le mardi 2 novembre, c’est à la Maison symphonique de Montréal que l’OSL convie son public pour un concert anniversaire des plus spécial.
«C’est une demande qui revient beaucoup depuis longtemps, confie le chef de l’OSL. Notre public veut apprécier la qualité de leur orchestre, qui est extraordinaire, dans cette salle montréalaise encore presque toute neuve avec une acoustique formidable. C’est aussi un lieu que nous connaissons bien pour y avoir souvent endisqué.»
Redonner à la communauté
En entrevue avec le Courrier Laval, Alain Trudel s’est remémoré l’audition passée en juillet 2006 avant d’accepter de diriger l’orchestre favori des Lavallois, fondé en 1984.
«Quand j’ai reçu l’invitation de l’OSL, j’étais en pleine convalescence, raconte-t-il. Je me demandais si je pouvais ou non accepter. Or j’aimais déjà énormément l’orchestre dirigé alors par Jean-François Rivest. J’avais joué comme soliste avec ses musiciens, en plus de l’avoir dirigé à une reprise. Je me souviens même que j’allais être chef invité pour l’un des concerts de la nouvelle saison.»
Le tromboniste de renommée mondiale venait tout juste de livrer avec succès une dure bataille contre un cancer rare au stade très avancé. À l’époque, il était déjà premier chef invité ou attitré de l’Orchestre de Radio-Canada, l’Orchestre symphonique de Victoria, l’Orchestre du Centre national des Arts (Ottawa), en plus de diriger quasi l’exclusivité des saisons de l’Orchestre symphonique de Toronto.
Depuis ses études musicales au Conservatoire de musique de Montréal, il rêve de partager avec les siens le don dont il a hérité et que le Québec lui a permis de faire briller partout sur la planète.
«C’était fou, se souvient-il. Je passais trois jours à Tokyo pour m’envoler vers l’Espagne, puis la Suède, avant de quitter pour Victoria et mes autres orchestres canadiens. Je rêvais d’être un jour dans une position pour aider à bâtir un groupe musical avec toute mon expérience acquise. C’est pourquoi une fois nommé à l’OSL, orchestre d’excellence grâce, notamment au travail de Jean-François, ma priorité fut d’ancrer le plus possible l’orchestre dans sa communauté, en œuvrant autant que possible avec les milieux lavallois.»
Collaborations avec les écoles, fonds de donation, visites dans les résidences, événements en plein air, musique de chambre, compositeur en résidence, reprise des enregistrements, Alain Trudel a multiplié les gestes concrets et significatifs. Et 15 ans plus tard, l’OSL est nommé aux prix JUNO, en compétition avec, entre autres, les orchestres symphoniques de la BBC et de Montréal.
«Une fois chef de l’OSL, mon but n’a jamais changé: prendre tout ce qu’il y a déjà d’extraordinaire dans cet orchestre, la grande qualité de ses musiciens et de l’équipe, pour devenir chaque jour des ambassadeurs de la ville de Laval»
Alain Trudel, maestro de l’Orchestre symphonique de Laval
Première mondiale
Une autre des grandes actions d’Alain Trudel sera illustrée lors de son concert anniversaire. «Oui, c’est beau, jouer Beethoven, Mozart, Tchaïkovski, ou Haendel lors de notre concert d’ouverture, mais j’ai aussi voulu un orchestre axé sur la création en parlant de notre musique à nous, comme en témoigne notre enregistrement en hommage à Jacques Hétu», souligne le Montréalais d’origine.
Le 2 novembre, c’est un concerto pour flûte signé par le compositeur québécois né en Russie, Airat Ichmouratov, qui sera offert en grande première mondiale. Invité partout dans le monde, celui qui vit à Montréal depuis 1998 a acquiescé sans hésiter à la commande du chef de l’OSL. «Airat est joué à Londres, Vienne, Paris, poursuit Alain Trudel. Son œuvre est très mélodique, se situant entre Prokofiev et Tchaïkovski. Et pour l’occasion, avec Robert Langevin comme soliste, les gens n’auront jamais entendu un plus beau son de flûte de toute leur vie.»
Soulignons que le Sherbrookois tient le poste de flûte solo de l’Orchestre philharmonique de New-York depuis 2000, en plus d’enseigner à la célèbre Juilliard School. Ce sera sa première prestation avec l’OSL.
Reste du programme
Les deux autres compositions au menu de la soirée seront en hors-d’œuvre, les Danses de Galánta, du Hongrois Kodály, que l’OSL a d’ailleurs enregistré plus tôt cet été; ainsi que les Métamorphoses symphoniques sur un thème de Carl Maria von Weber, signées par le musicien allemand Hindemith.
«Autant les airs de Kodály sont folkloriques, hyper festifs, autant les variations d’Hindemith donnent la chance à tous les musiciens, toutes les sections, vents, cordes, percussions, de briller devant le public de la Maison symphonique, résume Alain Trudel. Pour mes 15 ans, je voulais donner un cadeau à notre public et offrir à nos musiciens des œuvres où tout le monde joue un solo.»
Et l’avenir?
À 55 ans, Alain Trudel a désiré ralentir le rythme, tout en se donnant la latitude pour répondre aux offres qui l’intéressent, lui qui a refusé coup sur coup des invitations venant du Portugal, de l’Espagne, l’Estonie, la Finlande et l’Italie au cours du dernier mois.
Le père de quatre enfants compte plus que jamais se consacrer à ses proches et ses deux familles musicales que sont l’OSL et l’Orchestre symphonique de Toledo, dans la région de Détroit, aux États-Unis.
«Avec la pandémie, comme tout le monde, j’en ai profité pour faire le bilan et me remettre à la composition, dont un concerto pour piano, relate le premier Canadien à être nommé artiste international Yamaha, avant de continuer joyeusement: je sais que j’aime encore l’OSL et que j’ai encore à donner, alors comme je dis souvent aux membres du C.A. et aux musiciens, je vais rester aussi longtemps qu’ils voudront bien vouloir m’endurer!»
À ce propos, Winston McQuade, président du Conseil de l’OSL, a décrit son maestro en ces mots dans un communiqué de l’orchestre: «Le chef Alain Trudel: un créatif dans un monde classique. Il transgresse les genres et élargit les horizons pour le plus grand plaisir des mélomanes de Laval.»
L’Orchestre symphonique de Laval présente le concert 15e anniversaire de son chef Alain Trudel, le mardi 2 novembre, à 19h30, à la Maison symphonique de Montréal (1600, rue Saint-Urbain). Soliste invité: le flûtiste Robert Langevin. Information: www.osl.ca.