Sous l’impulsion de l’opposition officielle, le conseil municipal – fortement divisé sur la question – a entrepris hier soir une démarche visant à se réapproprier certains pouvoirs dont il a été dépouillés au fil des ans au profit du comité exécutif.
À leur corps défendant, le maire Marc Demers et huit de ses élus, dont le conseiller dissident du district Renaud, Aram Elagoz, se sont vus imposer par un vote de 11 à 9 une résolution confirmant l’envoi d’une requête à Québec, demandant au gouvernement d’abroger par décret six dispositions prévues à la charte de la Ville.
«La charte actuelle de Laval retire aux élus des pouvoirs fondamentaux, alors que nous avons un devoir de représentation, a affirmé le conseiller de Fabreville, Claude Larochelle, lors du dépôt de son avis de proposition. Le conseil municipal est une instance démocratique qui a été négligée trop longtemps à Laval et nous devons aujourd’hui reprendre nos droits comme les autres municipalités du Québec.»
Liste
Essentiellement, la majorité des élus dénonce la trop grande concentration des pouvoirs entre les mains du maire et du comité exécutif qu’il préside.
Composé de cinq élus, ce comité servant d’intermédiaire entre le conseil municipal, la direction générale et les services municipaux a notamment le contrôle absolu en matière de préparation et soumission de règlements.
Il appartient également au seul comité exécutif d’établir la liste de candidats aux postes à pourvoir à la haute direction de la Ville, incluant les Services de la trésorerie et du greffe sans même que le conseil municipal ne puisse l’amender.
Pour illustrer la mainmise de ce comité sur les opérations courantes, l’opposition officielle souligne que le budget annuel de la Ville pourrait être adopté sans l’approbation du conseil.
«La nouvelle composition politique du conseil municipal nous permet d’adopter des propositions sans partisannerie, basées sur la saine gestion, déclare le chef de l’opposition Michel Trottier. C’est dans cet esprit que nous adressons notre requête au gouvernement.»
Jeu dangereux
Durant les échanges, le maire Demers s’en est pris à M. Larochelle, lui reprochant
de déposer à la sauvette un document de cette importance, puis demander d’en disposer séance tenante.
«Quand [on présente] un document crédible, sérieux et aussi fondamental que ça, tu donnes l’occasion à l’équipe juridique de l’étudier et aux élus de poser des questions lors des réunions d’avant conseil sur l’impact d’une décision. Vous essayez de prendre tout le monde par surprise. C’est un jeu très dangereux que de voter et d’accepter un tel document.»
À tour de rôle, les élus Aram Elazoz, Nicholas Borne, Virginie Dufour et Yannick Langlois ont questionné l’urgence d’ouvrir le débat en fin de séance et de voter en quelque minutes.
D’autant qu’en cette veille du déclenchement des élections provinciales, la requête ne serait de toute évidence pas traitée avant tard à l’automne, a précisé la conseillère et membre du comité exécutif, Mme Dufour.
Occasion en or
Claude Larochelle voit plutôt la période électorale à venir comme «une occasion extraordinaire pour les élus et citoyens de Laval d’aller voir les candidats de tous les partis» et faire pression auprès d’eux afin que la Ville puisse enfin tourner la page sur son passé.
Il fait ici référence au silence de Québec face aux demandes répétées de l’administration Demers, qui resollicitait en janvier son désir d’être accompagnée par le ministère des Affaires municipales dans la foulée de la refonte de sa charte entamée en 2014.
Tout comme elle l’a fait pour la protection intégrale du bois du Trait-Carré, l’opposition a réussi à rallier la majorité des élus derrière cette démarche visant à redonner au conseil ses droits démocratiques d’ici à ce que Laval se donne d’une charte digne de ce nom.