En réponse à l’appel pour un débat sur la santé mentale par le maire Régis Labeaume, le maire Marc Demers soutient qu’une telle démarche est nécessaire et que «cette question outrepasse les services de police, alors que les gouvernements du Québec et du Canada ont un grand rôle à jouer pour cet enjeu de santé et sécurité publiques.»
Rappelons que le maire Labeaume a fait cette sortie publique au lendemain de la tragédie meurtrière du 31 octobre dans le Vieux-Québec.
Durant l’Halloween, un homme en costume médiéval a utilisé un sabre japonais pour tuer deux personnes et blesser plusieurs autres.
«Notamment, nos instances médicales doivent être mieux équipées», revendique déjà le maire Demers qui a souvent eu affaire à des cas de santé mentale durant sa carrière de policier en sol lavallois. «Bien des situations relevaient plus de la santé mentale que de la criminalité», précise-t-il.
«La santé mentale, c’est une grande responsabilité de société. Faudra toujours se remettre en question là-dessus.»
– Marc Demers, maire de Laval
Expérience de terrain
S’il reconnaît qu’il y a eu une évolution, «heureusement, nous ne sommes plus au Far-West quand on utilisait la force envers des gens qu’on jugeait selon les apparences», le maire Demers prévient que «ça nous guette tous sans exception.»
L’ancien lieutenant-détective se remémore un citoyen de Chomedey reconnu comme une grande sommité mondiale de la médecine.
Soudainement, l’homme a montré des signaux inquiétants, tenant des propos scientifiques incohérents lors d’événements publics, touchant les femmes à des endroits inappropriés. Il a été le fruit de nombreuses interventions policières. « On le remettait toujours chez lui, sans autre suivi ni surveillance.»
Une nuit, Marc Demers patrouille et reçoit un appel pour vol d’essence à une station située à l’angle des boulevards Lévesque et Curé-Labelle. L’ancien médecin s’y tient debout, une pompe à essence dans la bouche. M. Demers le poursuit à pieds, slalomant entre les voitures du boulevard animé.
«Je ne savais pas trop comment réagir, n’ayant pas les connaissances médicales appropriées, se souvient-il. Je l’ai amené à l’Hôpital du Sacré-Cœur. Puis j’ai décidé de l’accuser. Je l’ai amené en cour municipale pour vol d’essence. Le juge m’a regardé: « Êtes-vous certain? » Or d’obtenir une ordonnance pour qu’il soit évalué, pris en charge, était le dernier moyen afin de lui venir en aide pour sa sécurité et celle des autres.»
Pandémie et services
N’empêche, ces jours-ci, Marc Demers sait surtout que la pandémie actuelle exacerbe, sinon amplifie la détresse psychologique de personnes déjà très vulnérables.
«À Laval, nous avons une section d’urgence sociale, des travailleurs sociaux qui interviennent avec la police quand on évalue que la violence résulte de la santé mentale, souligne le maire. Ces intervenants accompagnent la personne qui a besoin d’aide à l’hôpital. Ce peut être des situations de violence conjugale, sinistre, psychose, d’itinérance ou insalubrité.»
L’idée est de rediriger rapidement ces gens dans le réseau de la santé. L’urgence sociale procède à 2400 interventions en moyenne chaque année.
L’autre grand vecteur demeure l’appui aux organismes communautaires en soutien psycho-social et sécurité alimentaire.
Une somme supplémentaire de 400 000 $ a été débloquée et confiée à Centraide.
«Cette organisation sait déjà mieux évaluer la qualité des missions sur le terrain et répartir l’argent parmi les organismes reconnus par la Ville.»
Après avoir fait mention des différents programmes d’aide aux employés des divers services municipaux, dont les policiers qui sont sous pression depuis le début de la crise sanitaire, le maire Demers confie finalement que la direction générale évalue actuellement une enveloppe de 1,5 M$ à distribuer aux organismes desservant les principalement les citoyens les plus vulnérables du territoire.
«La santé mentale, c’est un défi constant, ajoute-t-il. Il faut en rester conscient et trouver une façon de gérer ça.»