En moins de 48 heures, l’Unité permanente anticorruption (UPAC) a perquisitionné pas moins de huit firmes lavalloises de génie-conseil dans la poursuite d’une vaste enquête sur la corruption municipale et la collusion dans l’octroi des contrats publics, à Laval.
Dans une première vague, les géants Dessau, Cima+, Génivar et Aecom (jadis Gendron Lefebvre/Tecsult) ont occupé près d’une centaine de policiers enquêteurs, qui ont fait irruption à leur bureau respectif sur le coup matinal de 7h, le 6 novembre.
Deux jours plus tard, une cinquantaine de limiers de l’UPAC débarquaient à nouveau à Laval, perquisitionnant cette fois le siège social d’Equiluqs Ingénierie, Filiatrault Mcneil & Associés inc., MLC Associés et Les Consultants BaFa inc.
Chaque fois, l’UPAC a frappé conjointement avec le Bureau de la concurrence sans jamais recourir au soutien du Service de police de Laval.
Gens d’affaires bien connus
Le président d’Equiluqs Ingénierie, Guy Jobin, est avantageusement connu pour avoir présidé, ces dernières années, le conseil d’administration de la Fondation Cité de la Santé. À ce titre, il avait d’ailleurs piloté la campagne majeure de financement, qui a rapporté pas moins de 25 M$.
Le PDG de Cima+, Kazimir Olechnowicz, est également très impliqué à Laval, lui qui préside depuis de nombreuses années aux destinées de la Fondation Marcel Vaillancourt, du nom du défunt père du maire de Laval, Gilles Vaillancourt, venant en aide à l’enfance lavalloise.
Tout comme M. Olechnowicz, le président et chef de la direction de Dessau, Jean-Pierre Sauriol, appartient aux clubs sélects des Méritas de la Chambre de commerce et d’industrie de Laval et des Amabassadeurs émérites de Tourisme Laval.
Le président de MLC Associés, Robert N. Cloutier, a été quant à lui très impliqué auprès de la communauté d’affaires dans les années 90, alors qu’il fut notamment président de la Chambre de commerce et d’industrie de Laval pour un terme d’un an.
Gilles Vaillancourt
Ces deux dernières frappes s’inscrivent dans la poursuite d’une vaste enquête, dont les premières perquisitions ont été effectuées simultanément le 4 octobre à l’hôtel de ville, à la résidence principale du maire Gilles Vaillancourt et dans deux bureaux administratifs municipaux, dont le Service de l’ingénierie.
Au lendemain des perquisitions à son bureau à l’hôtel de ville et à sa résidence, le maire de Laval se trouvait à nouveau dans la mire de l’UPAC, qui perquisitionnait un condo et un local de rangement dont dispose M. Vaillancourt sur chemin des Cageux, tout près de son domicile.
Le premier magistrat lavallois n’était pas au bout de ses peines, puisque l’escouade anticorruption revenait à la charge le 24 octobre en saisissant, cette fois, le contenu d’une dizaine de coffrets de sûreté qu’il détient dans différentes institutions financières. Le soir même, Gilles Vaillancourt annonçait son retrait temporaire de ses fonctions à la mairie pour des raisons de santé.
Construction
Deux semaines plus tôt, le 11 octobre, l’UPAC avaient visité six entreprises de construction reconnues pour décrocher leur large part de contrats auprès de l’administration Vaillancourt depuis une dizaine d’années.
Construction Louisbourg et Simard Beaudry, Construction Mergad, J. Dufresne Asphalte, Nepcon, Poly-Excavation et Valmont Nadon étaient alors perquisitionnées.
Celles-ci avaient défrayé la manchette en octobre 2009, à la suite d’une enquête du quotidien La Presse, qui révélait qu’un petit groupe de huit entrepreneurs se partageait près de 75 % de la valeur des contrats de voirie et d’infrastructures octroyés par la Ville de Laval.
L’enquête couvrait les soumissions et appels d’offres mis en ligne sur le système électronique du gouvernement du Québec pour la période de 2001 à 2008.
À elles seules, Construction Louisbourg et Simard Beaudry, deux sociétés liées à Tony Accurso, avaient obtenu le quart de la valeur totale des contrats municipaux, soit 97 M$ des 388 M$ compilés.
Le mois dernier, devant la Commission Charbonneau, l’ex-entrepreneur Lino Zambito avait levé le voile sur un système de collusion qui existerait à Laval. Selon ses dires, les entrepreneurs devaient verser un montant équivalent à 2,5 % de la valeur du contrat au maire Vaillancourt.
Par la voix de son attachée de presse, Gilles Vaillancourt avait aussitôt nié les allégations de M. Zambito.