«C’est un pari à moyen et long terme qui n’est pas gagné», convient le professeur titulaire à la Faculté de l’aménagement à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal, Gérard Beaudet.
Le pari dont il parle est celui des promoteurs d’Espace Montmorency qui misent sur la migration massive des automobilistes vers le transport collectif. Ils prévoient 1400 cases de stationnement pour desservir 1,3 million de pieds carrés d’espaces locatifs, soit un centre-ville créé de toutes pièces où quelque 3200 travailleurs seraient appelés à accueillir des milliers de clients et visiteurs quotidiennement.
«Une grosse partie de ce secteur-là est relativement mal desservie en transport collectif, constate l’universitaire. Ce n’est pas donné que les gens qui vont le fréquenter vont massivement être en provenance de Montréal, là où le niveau de service et le rabattement sur les stations de métro est très bon.»
Il en donne pour preuve l’encombrement des espaces de stationnement au pourtour de la station Montmorency, essentiellement dû à ses usagers qui s’y rendent en voiture.
Conscient que la desserte en transport en commun sera bonifiée d’ici 2022, il rappelle toutefois ce phénomène observable dans toutes les grandes agglomérations nord-américaines. «La déconcentration de l’emploi vers les banlieues favorise l’étalement urbain, nous rendant encore plus dépendants de la voiture.»
N’empêche, l’expert en aménagement du territoire et développement urbain et immobilier demeure formel: «L’automobile n’est plus la solution. Il faut en sortir.»
Et si jamais…
Quel serait le prix à payer si l’aire de stationnement s’avérait nettement insuffisante pour répondre à la demande?
«Si les promoteurs surestiment le passage au transport collectif, ça pourrait handicaper la valeur locative ou la valeur d’occupation des bâtiments. Il pourrait y a voir un prix à payer pour ça»
– Gérard Beaudet
Au besoin, ils pourraient toujours se tourner vers l’option des stationnements étagés.
«Une solution possible qui pourrait aussi venir des pressions des citoyens des quartiers environnants, laisse-t-il entendre en n’écartant pas la possibilité que «pour acheter la paix», les autorités municipales puissent éventuellement «leur donner raison en limitant le stationnement sur rue au sud de la Concorde».
Beaudet réfère ici aux demandes en ce sens rejetées d’emblée par l’administration Demers depuis l’ouverture de la Place Bell en septembre 2017.
Pour un centre-ville digne de ce nom
Celui qui connaît bien Laval pour y avoir vécu les 25 premières années de sa vie commente le nouveau centre-ville qu’on nous promet depuis 20 ans au quadrilatère Concorde-Montmorency.
«Je dirais à la blague que Laval semble avoir trouvé enfin son centre-ville, mais manifestement, jusqu’à maintenant, c’est un centre-ville de banlieue. Il n’est pas agréable à marcher pour l’instant. On a beau avoir aménagé des trottoirs surdimensionnés, une placette à l’angle du pavillon de l’Université de Montréal, en termes de design urbain, c’est assez moche. Si on veut que tout ça se transforme, cette sur-occupation automobile du territoire doit s’estomper.»