Maintenant que le changement d’affectation du territoire est adopté, seul le retrait des investisseurs pourrait faire dérailler le projet Trudel Studios.
C’est d’ailleurs l’appel que leur lance l’écosociologue et cofondatrice d’Équiterre Laure Waridel dans sa chronique coiffée du titre Du «passé date» à Laval, publiée dans l’édition du Journal de Montréal du 3 février.
En entrevue au Courrier Laval, la réputée environnementaliste condamne ce projet d’investissement de studios de cinéma qu’elle qualifie d’éléphant blanc.
«Si on a une vision économique à courte vue, on peut le justifier. Mais le moindrement qu’on regarde les intérêts économiques à moyen et long terme de Laval, ça me semble absolument ridicule. Surtout quand on voit les développements de l’intelligence artificielle. [Ça] va vraiment remplacer les grands studios de cinéma. C’est l’évidence même.»
Quant aux investisseurs derrière le promoteur Michel Trudel, Laure Waridel ne comprend pas l’intérêt qu’ils portent à ce projet qui coûtera 200 M$ à sortir de terre.
«Honnêtement, qui est assez nono pour aller investir autant de millions dans quelque chose qui va être désuet dans peu de temps. J’espère de tout coeur que le Fondaction [fonds d’investissement de la CSN], Investissement Québec et le Fonds de solidarité [FTQ] ne sont pas derrière ça», lâche-t-elle.
Échange avec le maire
À la fin de la dernière année, Mme Waridel s’est permise d’écrire au maire Stéphane Boyer après avoir été alertée par des citoyens lavallois dont les Mères au front, un réseau dont elle est cofondatrice investi dans la lutte contre la crise climatique.
«Mon conseil, c’était de faire autre chose avec ce terrain de grande valeur», dit-elle au sujet de ces 20 hectares de terres cultivables en bordure de l’avenue Marcel-Villeneuve dans l’est de Laval. Comme un écoquartier nourricier, par exemple.
S’en est suivi un appel en visioconférence en janvier au cours duquel le maire s’était montré «ouvert et à l’écoute», se rappelle la porte-étendard du mouvement écologique au Québec.
Quant à la dénonciation publique dans sa dernière chronique, elle était d’autant inévitable, dit-elle, que certains citoyens croyaient à tort qu’elle agissait à titre de conseillère à la transition écologique auprès du maire de Laval.
Laure Waridel rappelle qu’à l’automne 2021, à la demande d’Alexandre Warnet, un ami, elle avait «accepté de jouer le rôle de conseillère» en matière d’environnement pour le Mouvement lavallois – Équipe Stéphane Boyer durant la campagne électorale.
«Je trouvais important de lever un drapeau rouge pendant qu’il est encore temps», poursuit celle qui garde espoir que «les investisseurs retirent leurs billes ou que la Ville s’ouvre les yeux et réalise que c’est une grave erreur».
Cela dit, elle ne manque pas de souligner l’intégrité et le courage politique dont fait montre le maire Boyer depuis son élection. «Tant que le béton n’est pas coulé, il y a de l’espoir», termine-t-elle.
Réaction
Appelé à réagir, le cabinet du maire nous a transmis cette déclaration par courriel en après-midi:
«Nous souhaitons être leader partout: faire du développement économique, mieux protéger nos terres agricoles et milieux naturels tout en urbanisant plus efficacement nos centres-villes avec des logements abordables.
D’un côté, le projet de la Cité du cinéma vise à accueillir sur notre territoire une nouvelle industrie culturelle avec des retombées économiques importantes pour les Lavallois et les citoyens de l’Est. Il y a une forte acceptabilité sociale en faveur du projet. De l’autre, nous sommes très actifs en matière d’acquisition et de protection des milieux naturels et nous avons énoncé clairement notre volonté de mieux protéger les terres agricoles existantes, voire augmenter la zone verte, une première dans l’histoire de Laval.»