La rue des Piverts est collée au chantier Villas Champfleury, à Sainte-Rose. Pourtant, seuls quatre propriétaires ont été informés à l’avance du dynamitage qui a provoqué des intoxications au monoxyde de carbone, quelques rues plus loin, le 13 avril. Chez Piché Dynamitage, on dit avoir respecté les règles.
À l’extrémité de cette rue, le cul-de-sac donne en plein centre de la mince bande de terrain en développement, enclavée entre le boulevard des Oiseaux et le chemin de la Petite-Côte. Le constructeur Devco coulera les fondations de quelque 70 nouvelles maisons à cet endroit.
Ici, les résidents n’ont pas souffert d’intoxication au monoxyde de carbone (CO), mais cela ne les empêche pas d’être inquiets et un peu frustrés.
Frontière
«J’aurais aimé avoir plus d’information», dit la propriétaire d’une maison qui donne directement sur le chantier. Elle fait partie des quatre résidences visitées par l’entreprise Piché Dynamitage, avant les premières détonations, le 28 mars.
Comme ses voisins immédiats, elle a reçu un petit feuillet informatif réalisé par le ministère de la Santé et des Services sociaux. On a également installé un détecteur de monoxyde de carbone (CO) dans son sous-sol. Dans son cas, on a même été jusqu’à inspecter les fondations de sa maison et y installer un sismographe.
Son voisin d’en face montre des morceaux d’agrégat détachés du revêtement de sa maison, tombés sur le pas de sa porte. Les dynamitages sont pour l’instant interrompus, mais il s’inquiète pour la suite des choses. «Ils ont dynamité à l’autre bout du chantier et c’était déjà très violent. Ils vont venir plus près.»
À deux maisons de là, une frontière fictive a été tracée, entre les citoyens qui ont reçu ou pas un feuillet informatif et un détecteur de CO. «Je me demande comment ils sélectionnent les citoyens qui reçoivent de l’information», déplore M. Shali Liu. «J’ai reçu un détecteur et de l’info, mais après [les intoxications au CO]», dit un autre résident.
50 mètres
«Nous, on se base sur la Régie du bâtiment du Québec (RBQ), qui suggère 50 mètres, pour la distribution d’information et de détecteurs», explique David Habib, vice-président de Piché Dynamitage, mandatée par Devco. Ce périmètre n’est pas obligatoire, mais fait partie des «bonnes pratiques» recommandées, indique Sylvain Lamothe, porte-parole de la RBQ.
«Pour les personnes intoxiquées, c’est dramatique. Personne n’aime se faire réveiller la nuit pour se faire dire qu’un enfant est hospitalisé. Moi aussi, je suis un père de famille, dit M. Habib. Mais c’est pas comme si on n’avait pas fait des efforts.»
Une des maisons où des personnes ont été intoxiquées a été visitée à trois reprises, afin d’y installer un détecteur de CO, sans succès, affirme-t-il.
Quand les problèmes ont été signalés, le périmètre de distribution de détecteurs a été élargi, dit M. Habib.
Plus sévère
Le chantier ne montrait a priori aucun facteur de risque particulier, indique le vice-président de Piché Dynamitage. «Habituellement, la migration des gaz vers les habitations se fait par les conduites souterraines. Mais il n’y a pas de conduites près du site.»
David Habib s’avance: le gaz aurait migré par une fissure naturelle dans le roc, à 13 pieds de profondeur, et filtré ensuite vers la zone habitée grâce à la porosité de la roche. Des expertises menées dans le cadre de l’enquête policière en cours valideront peut-être cette hypothèse.
Quant au périmètre de précaution recommandé par la Régie du bâtiment, il pourrait être rehaussé, admet M. Habib. «Je sais que certaines études prônent 100 mètres. Nous, on n’est pas contre, on est prêts à le faire, si demain matin, c’est 100 mètres pour tout le monde.»
À Laval, où les activités de dynamitage sont plutôt rares, la sensibilité des citoyens et leurs inquiétudes sont plus grandes, reconnaît M. Habib. «Peut-être qu’il serait bon que la municipalité demande au promoteur d’informer les gens dans un périmètre plus grand.»