Dans un communiqué publié le 14 février visant à dissiper la confusion entourant la demande adressée à Québec de modifier la charte de la Ville, le cabinet du maire semait une certaine confusion autour du statut des dissidents du parti au pouvoir en les qualifiant d’«élus indépendants».
On parle ici de David De Cotis, Paolo Galati, Daniel Hébert, Michel Poissant et Isabella Tassoni qui figurent parmi les six signataires d’une lettre expédiée la semaine dernière à la ministre des Affaires municipales afin qu’elle rejette la demande de la Ville.
À ce jour, ces cinq conseillers élus sous la bannière du Mouvement lavallois – Équipe Marc Demers n’ont pourtant jamais démissionné du parti ni été expulsés par celui-ci.
Pour éviter toute confusion, pourquoi ne pas les exclure officiellement du caucus?
«Dans la perspective où tout au long de l’été [dernier] il y a eu un processus de médiation auquel ces élus ont participé et que leur décision a été de ne pas revenir dans l’équipe du maire, je crois qu’en toute bonne foi, on peut dire qu’ils s’en sont exclus eux-mêmes», écrit Robert-Charles Longpré, conseiller spécial au cabinet du maire et comité exécutif.
C’est d’ailleurs à la suite de cette médiation qu’ont réintégré le caucus 5 des 10 élus du parti qui avaient mené la fronde contre leur chef Marc Demers, à qui ils reprochaient d’avoir posé des gestes antidémocratiques lors du dépouillement d’un vote à l’interne au printemps 2018.
Qu’en disent les dissidents?
De leur côté, quatre des cinq dissidents affirment être toujours membre du Mouvement lavallois, et ce, même s’ils ne sont «plus invités» aux rencontres du caucus depuis huit mois.
Michel Poissant, lui, rejette d’emblée les étiquettes d’élu dissident et indépendant. «C’est bien beau les partis politiques, mais moi, je suis un administrateur au sens du Code civil. Peu importe le titre qu’on me donne, l’important c’est que je puisse gérer le bien collectif en bon père de famille», dit celui qui se définit davantage comme membre d’une coalition formée d’élus n’ayant plus à se soumettre à «une ligne de parti rigide».
Pour sa part, David De Cotis justifie ainsi la raison pour laquelle il n’a toujours pas claqué la porte d’un parti auquel il ne croit plus et avec lequel tous les ponts sont coupés: «J’ai pris ça un jour à la fois. Je suis le fondateur du parti et j’espérais toujours m’asseoir avec Marc Demers pour régler les choses d’homme à homme, mais il a choisi une voie différente […] Le jour où on va quitter officiellement le parti, ce sera pour annoncer nos orientations pour 2021.»
Carte expirée
Quant au fait que leur carte de membre du ML serait expirée, Daniel Hébert et Paolo Galati ne semblaient pas au courant. «Je ne sais pas, indique M. Galati. Je n’ai rien reçu.»
Généralement, le parti envoie-t-il à ses membres un avis de renouvellement à l’approche ou dans les semaines suivant l’expiration de leur carte de membre?
«Il n’existe pas de mécanisme systématique par lequel les membres du parti sont mis au courant de l’expiration de leur adhésion à l’issue de celle-ci», répond Christian Fortin, coordonnateur du Mouvement lavallois.
Garder une porte ouverte
Professeure associée à l’UQÀM spécialisée, entre autres, en gestion municipale et métropolitaine, Danielle Pilette estime que de maintenir le flou artistique autour du statut des récalcitrants fait l’affaire de tous.
«Ce qu’ils veulent, c’est préserver l’avenir le plus longtemps possible, dit-elle à propos du chef et de ses opposants. Pourquoi démissionner et pourquoi le parti les exclurait-il, alors que rien ne dit qu’ils ne rentreront pas au bercail un moment donné.» Comme l’ont déjà fait à tour de rôle les ex-frondeurs Sandra El-Helou, Aram Elagoz, Aline Dib, Vasilios Karidogiannis et Jocelyne Frédéric-Gauthier dans la foulée de la médiation de l’été dernier.
Rappelant que 6 mois en politique sont une éternité, l’universitaire est d’avis que personne n’a intérêt à «se peinturer dans le coin» et qu’en ce sens, il est toujours plus prudent de garder une porte ouverte à un peu moins de trois ans de l’échéancier électoral.