Depuis le lancement du protocole gratuit pour les femmes en situation de handicap victimes de violence conjugale en mai 2021, seulement 2 lavalloises ont fait appel au service.
La nouvelle est tombée pour une première fois au Colloque régional 2023 de la Table de concertation de Laval en condition féminine (TCLCF), puis une seconde lors du lancement de la deuxième phase du projet Femmes, violences et handicaps.
Aux deux reprises, la réaction de l’audience a été la même: tous et toutes étaient estomaqués par l’utilisation presque nulle d’un programme qui, pourtant, répond à un besoin dans la région.
Statistiques
Selon l’Office des personnes handicapées du Québec, Laval comptait environ 29 000 femmes en situation de handicap en 2017.
Malheureusement, en moyenne, 39% de ces femmes vivent de la violence conjugale.
En 2017, on pouvait donc estimer le nombre de femmes pouvant bénéficier du protocole à 11 310.
De 2016 à 2021, la population lavalloise s’est majorée de 3,6%. On peut supposer que la population de femmes handicapées victimes de violence conjugale a également augmenté.
Si le bassin de population ayant besoin du protocole de transport adapté est aussi large, pourquoi les femmes en faisant partie n’y font pas appel?
Pourquoi?
Selon Isabelle Cadotte Lemay, agente de projet à l’Association Lavalloise pour le Transport Adapté (ALTA), le manque d’utilisation du protocole découlerait d’une problématique plus large d’accessibilité dans les ressources.
«On remarque que les programmes d’aide aux femmes victimes de violences ou d’abus manquent souvent de services adaptés pour les femmes en situation de handicap», soulève Héloïse Landry, femme handicapée membre du groupe de discussion impliqué dans l’initiative féministe.
Le manque de représentation des femmes handicapées en situation de violence conjugale ainsi que le manque de connaissances sur ce qui s’y apparente pourrait également être en cause.
«Présenter le protocole, c’est essentiel, mais ça ne suffit pas, témoigne Isabelle Cadotte Lemay. Il est aussi important de sensibiliser les partenaires à la violence conjugale, parce que, c’est bien beau de connaître le protocole, mais si les partenaires ne sont pas en mesure de reconnaitre la violence conjugale, les femmes ne seront jamais référées pour l’utiliser.»
La raison principale avancée est cependant le manque de visibilité du protocole auprès de la clientèle cible.
«C’est la crainte, c’est toujours la crainte, expose Martine Bédard, Lavalloise en situation de handicap visuel. La crainte d’être seule au bout de la ligne et de ne pas se faire croire. Il ne faut pas oublier, qu’encore une fois, les personnes avec un handicap ont encore plus d’isolement que les autres femmes et je pense que c’est probablement l’une des raisons.»
Solutions
Dans le but de faire mousser les demandes, l’ALTA a démarré une campagne de sensibilisation. Des affiches seront posées un peu partout sur le territoire et un site web dédié à l’initiative a été mis sur pied.
«On est dans la phase deux du projet et on s’est donné quelques objectifs, mais on se rend compte que ça pourrait être tellement large […], exprime l’agente de projet de l’ALTA. D’autant plus que ce groupe de femmes en situation de handicap est très hétérogène; il y a plusieurs situations de handicaps qui existent, donc les besoins ne sont pas toujours les mêmes et les façons de sensibiliser sont différentes. À ce niveau-là, ce serait très important d’agrandir le projet et nous sommes malheureusement limitées par faute de financement insuffisant.»
L’organisme a profité du lancement pour lancer un appel aux représentant.e.s politiques en vue d’amasser suffisamment d’argent pour soutenir le projet.
L’ALTA fera également une tournée des organismes partenaires afin de discuter de violence conjugale et de mettre en place des moyens de visibilité adaptés à la clientèle visée.
Protocole
L’affiche réalisée dans le cadre de la campagne de sensibilisation rappelle notamment les étapes à suivre afin de bénéficier du service.
Les femmes en situation de handicap vivant de la violence conjugale doivent premièrement appeler l’une des trois maisons d’hébergement lavalloises ou SOS violence conjugale, puis un transport adapté viendra les chercher de façon gratuite, confidentielle et sécuritaire.
Rappelons que le protocole a été créé par l’ALTA en collaboration avec la Société de transport de Laval (STL), la Maison de Lina, la Maison L’Esther et la Maison Le Prélude. Le projet est financé par la Ville de Laval et le Secrétariat à la condition féminine.
Information: https://altalaval.ca/fshlaval/index.htm