Le professeur Laurent Chatel-Chaix du Centre Armand-Frappier Santé Biotechnologie de Laval a reçu une subvention de 700 000 $ des Instituts de recherche en santé du Canada pour tenter de comprendre la stratégie d’infection du virus du Nil occidental, de la dengue et du Zika.
Pour le moment, aucun traitement n’est efficace contre ses flavivirus transmis par des piqûres d’insectes qui constituent un problème de santé publique majeur dans le monde.
«Des variations dans la démographie des insectes, dues entre autres aux changements climatiques, entraînent la circulation de flavivirus dont on ignore l’existence, précise celui qui dirige le laboratoire de niveau de confinement 3 de l’Institut national de la recherche scientifique qui se trouve à Laval. Il y a donc un besoin urgent d’identifier de nouvelles cibles et thérapies antivirales. Le tout passe par une meilleure compréhension au niveau moléculaire.»
Il s’intéresse notamment à ce qui se passe à l’intérieur de la cellule infectée, tentant de comprendre comment ce genre de virus parasite les organites de la cellule à son avantage.
«Lorsque le flavivirus entre dans la cellule pour se répliquer, il remodèle plusieurs compartiments cellulaires et va même jusqu’à reprogrammer les mitochondries à ses propres fins, poursuit le chercheur spécialisé en virologie moléculaire. Or, ces dernières servent d’usines de production d’énergie. C’est un peu comme si un voleur entrait dans votre maison, désactivait tous les systèmes d’alarme, réarrangeait votre mobilier et vidait votre frigo.»
Cette stratégie permet au virus de gagner du temps avant que la cellule ne se rende compte de son infiltration. Déchiffrer ce processus de détournement des ressources intracellulaires permettrait éventuellement de trouver des cibles thérapeutiques avec un large spectre.
Protéine NS4B
L’équipe du professeur Chatel-Chaix travaille d’ailleurs sur la protéine NS4B présente chez les flavivirus.
«Cette protéine joue un rôle critique dans la réplication du génome du virus dans la cellule, mais aussi dans les processus de modification impliquant la mitochondrie, rapporte-t-il. Réussir à mieux comprendre comment la protéine favorise la réplication virale permettra de comprendre comment fonctionnent les médicaments qui ciblent NS4B et qui sont actuellement en essais cliniques.»
Le déchiffrement des mécanismes moléculaires qui régulent le fonctionnement de ces usines virales pourrait également aider les scientifiques à identifier de nouvelles stratégies thérapeutiques pour réduire le risque d’infection chez les personnes touchées par ces maladies infectieuses au Canada et ailleurs.
Notons que le virus du Nil occidental est endémique et peut causer une encéphalite grave qui peut s’avérer mortelle au Canada. En 2018, le Québec a d’ailleurs connu un nombre record de cas d’infections au virus du Nil avec 201 cas et 15 décès répertoriés.
De son côté, le virus de la dengue cause la maladie virale transmise par les insectes la plus répandue au monde. L’infection par le virus Zika in utero peut quant à lui entraîner de graves anomalies neurodéveloppementales chez les nouveau-nés, y compris une microcéphalie congénitale. (N.P.)