L’administration Boyer annonce qu’elle met fin au projet d’usine de biométhanisation qui figurait dans les plans de la Municipalité depuis une quinzaine d’années.
Par voie de communiqué, la Ville justifie cette volte-face par l’explosion des coûts et les risques financiers et techniques liés aux procédés du traitement des matières organiques.
Les conditions de sur-inflation et de surchauffe du marché de la construction auraient fait bondir les coûts de ce projet initialement prévu à 200 M$ à plus du double, explique-t-on.
«L’environnement est l’enjeu du XXIe siècle et chaque dollar doit être investi intelligemment dans la lutte aux GES [gaz à effet de serre], déclare le maire Stéphane Boyer. Dans le contexte actuel, la construction d’une usine de biométhanisation ne présente pas un rapport coût-bénéfice favorable.»
Sans garantie
Le maire ajoute qu’«une telle installation imposerait des coûts d’investissement et d’exploitation trop élevés, sans garantie sur les bénéfices, ce qui entraînerait des impacts négatifs pour l’organisation et un fardeau pour les contribuables lavallois».
À cet égard, la Ville dit avoir tiré des leçons de l’expérience acquise par d’autres organisations au Québec ces dernières années. Il appert que dans la majorité des projets, la double valorisation des matières organiques attendue de la biométhanisation est loin d’être assurée, à savoir le recyclage du digestat et la production de gaz naturel renouvelable.
Nouvelle stratégie
Désormais, à Laval, l’atteinte de la cible de réduction des GES et des objectifs de gestion des matières résiduelles (GMR) ne passe plus par la biométhanisation des boues produites par les usines d’épuration et des résidus alimentaires en provenance des bacs bruns.
L’administration municipale compte plutôt miser sur «un ensemble de mesures et d’actions en complémentarité avec les modes de valorisation déjà en place», explique-t-elle, affirmant que «la capacité de traitement des matières organiques est grandissante et suffisante à long terme pour répondre [à ses] besoins».
À ce titre, la Ville fait valoir que «les technologies de compostage se sont grandement améliorées» et qu’elle «affiche déjà une bonne performance pour sa gestion de matières organiques triées à la source». Elle en donne pour preuve l’augmentation constante du pourcentage de valorisation des matières putrescibles qui, l’an dernier, atteignait déjà 65 % avec la collecte des bacs bruns alors que la Stratégie lavalloise de gestion des matières résiduelles (SLGMR) fixait la cible à 60 % pour 2025.
Signe avant-coureur
La décision de tirer un trait sur ce projet phare était somme toute prévisible depuis cette opération comptable effectuée il y a 13 mois, laquelle impliquait la réserve de 50 M$ dédiée à la construction de l’usine de biométhanisation. Sur une recommandation du comité exécutif, le conseil municipal entérinait en janvier 2022 le transfert des 50 millions de dollars au fonds général sous prétexte qu’il n’y avait pas de projet à financer à brève échéance en matière de gestion des déchets organiques.
La somme ainsi libérée avait permis de payer au comptant le projet de complexe aquatique que la Ville venait de relancer après quatre années de tergiversations. Budgété à 61 M$ en 2018, le coût du projet allait finalement doubler à 125 M$.
Départ de Luc Bourbeau
Par ailleurs, le Courrier Laval a appris que le responsable de la gestion du développement, de l’implantation et de la construction de l’usine de biométhanisation, Luc Bourbeau, a quitté son poste en décembre dernier.
Le Bureau des grands projets avait procédé à son embauche à l’automne 2020, lui confiant aussitôt l’équipe d’une demi-douzaine de personnes déjà affectée à ce projet dont l’appel d’offres n’avait suscité aucune soumission.
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