Dernière mise à jour: 5 janvier, 16h00
Laval affiche le 5e pire bilan des 10 grandes villes du Québec en termes d’indice d’intensité des déversements des eaux usées par habitant.
Voilà ce qui ressort du «triste palmarès 2020» que dresse Fondation Rivières au moyen d’un indice qui tient compte à la fois de la taille des ouvrages de surverses qui ont débordé, du nombre et de la durée de chacun des déversements recensés.
Du pire au meilleur
N’eût été d’un bris majeur au système d’assainissement des eaux survenu en septembre 2020 à Trois-Rivières, ce qui a provoqué un déversement continu durant 16 jours, Longueuil aurait conservé son titre de «la pire ville au Québec» en matière de rejets d’eaux usées non traitées. À l’autre bout du spectre, Sherbrooke affichait pour une seconde année consécutive le meilleur bilan au prorata de la population, suivie toujours de près par Montréal.
La performance de la Ville de Sherbrooke est toutefois à prendre avec un grain de sel puisqu’elle n’a toujours pas complété l’installation des enregistreurs électroniques sur près de la moitié de ses ouvrages qui débordent. Cette négligence lui a d’ailleurs valu la note D en ce qui a trait à la qualité de la mesure. À cet égard, les villes de Québec, Lévis et Trois-Rivières ont déjà équipé 100 % de leurs ouvrages de surverses (OS) d’enregistreurs électroniques de débordements (EED). À Laval, 146 des 150 ouvrages en service en sont équipés. Quant aux quatre autres, un seul serait requis d’être doté d’un enregistreur de débordements selon la réglementation en vigueur.
Portrait lavallois
Si Fondation Rivières constate une dégradation importante de la situation à Lévis et Trois-Rivières, l’organisme observe une nette amélioration à Laval, Québec, Gatineau et Saguenay.
À Laval, malgré une hausse de 4 % du nombre des débordements recensés en 2020 (2073 rejets comparativement à 1999 l’année précédente), la durée totale de ces déversements d’égout dans la nature a diminué de 19 %, passant de 10 738 à 8676 heures.
En clair, le réseau d’égout de l’île Jésus a débordé l’équivalent de 362 jours en continu en 2020 contrairement à 477 jours en 2019.
Chacun des 2073 épisodes de surverse répertoriés a duré en moyenne 4 heures et 11 minutes, soit plus d’une heure (71 minutes plus précisément) de moins qu’en 2019.
Dans la majorité des cas, ces rejets surviennent lors de fortes pluies où le débit excède ce que le réseau d’égout est capable d’absorber. Or, à Laval, le système d’assainissement des eaux comporte 150 ouvrages de surverses, équivalant à autant de disjoncteurs pour protéger les trois stations d’épuration contre les surcharges d’eau.
Selon l’indice d’intensité des déversements des eaux usées développé par Fondation Rivières, l’ampleur relative de ces rejets est estimée à 3,6 millions de mètres cubes d’eau (1 m3 équivaut à 1000 litres). Il s’agit ici d’un ordre de grandeur de la quantité d’eau usée qui pourrait avoir potentiellement débordé des ouvrages en territoire lavallois en 2020.
En comparaison aux 5,8 millions de mètres cubes d’eau souillé possiblement déversés dans l’environnement en 2019, Laval aurait ainsi réduit de près de 40 % la pollution de ses cours d’eau et des rivières qui la ceinturent.
Un leurre
Pour Fondation Rivières, cette diminution observée à Laval se traduit essentiellement par des précipitations moindres en 2020. Même explication pour la baisse de 13 % des déversements d’eaux usées recensés à travers quelque 700 Municipalités au Québec, lesquels ont chuté de 60 663 à 52 794 en l’espace d’un an.
«La météo plus clémente a aussi permis une réduction globale de l’intensité des déversements, mais ces réductions ne sont pas structurelles, puisqu’on autorise encore et toujours la construction domiciliaire sans exiger une augmentation de la capacité des infrastructures, comme on a pu le constater avec le cas de Saint-Lin-des-Laurentides», déplorait l’organisme au moment de rendre public son palmarès l’automne dernier.
Mollesse ministérielle
Et la situation n’est pas près de s’améliorer, jugeait-on tout en dénonçant l’incurie du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) qui donne aux Municipalités jusqu’au 1er janvier 2030 pour atteindre l’objectif de ne pas augmenter le nombre des déversements au-delà des niveaux de 2014.
«Autrement dit, les Municipalités ont la permission d’augmenter la pollution dans nos rivières pour les dix prochaines années. Le MELCC annonce que dans dix ans, il sévira contre celles qui n’auront pas ramené leur niveau de pollution à celui de 2014. Pourquoi attendre 2030?» se désole le directeur général de Fondation Rivières, André Bélanger.
Ce dernier rappelle que l’on sait exactement aujourd’hui où se trouvent les brèches les plus importantes à colmater. «Pourquoi ne pas cibler les Municipalités délinquantes et s’attaquer maintenant aux problèmes les plus criants? Ça n’a aucun sens […] Le premier ministre Legault aime à se qualifier de pragmatique. En quoi une telle mesure mur-à-mur est-elle pragmatique?» terminait-il.
Pour consulter le classement de quelque 700 municipalités québécoises, cliquez ici.
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