Le lundi 29 mai, à l’occasion de la Journée mondiale sans tabac 2023, des organismes antitabac demandent aux gouvernements provinciaux de profiter de l’occasion historique présentée par l’insolvabilité des manufacturiers de tabac pour mettre fin aux activités de ces derniers au Canada.
Ils recommandent vivement aux gouvernements de reconnaître qu’une entente financière qui permettrait à l’industrie du tabac de continuer ses opérations ne constitue pas une solution convenable vu les torts causés par ce secteur.
«Ça fait plus de trois ans que les provinces sont en négociation secrète avec les sociétés de tabac afin de recouvrer cinq cents milliards de dollars en frais de santé découlant du mauvais comportement de ces entreprises au cours des cent dernières années, déclare Michael DeRosenroll, vice-président d’Action on Smoking & Health (ASH), via communiqué. Le temps est venu pour que ces gouvernements se concentrent plutôt sur la prévention de dommages et de dépendance futurs en provoquant l’élimination progressive de l’industrie commerciale du tabac.»
Historique
Les négociations en lien avec ces litiges ont commencé au mois de mars 2019 lorsque les principales sociétés canadiennes de tabac ont eu recours à la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies.
Après que la Cour d’appel du Québec ait maintenu le jugement de quinze milliards de dollars à leur égard, les sociétés ont déclaré que la faillite les attendait si les recours engagés par d’autres provinces se retrouvaient devant les tribunaux.
Le mauvais comportement dénoncé par le tribunal québécois comprend le fait d’avoir failli à la tâche d’avertir les consommateurs, la publicité trompeuse, les torts causés et l’atteinte aux droits de la personne.
«Aucune compensation financière ne sera suffisante, possible ou convenable vu ces méfaits historiques, soutient Flory Doucas, porte-parole de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac, dans la même communication aux médias. Les cinq cents milliards de dollars réclamés par les provinces ne pourront pas remettre la vie à ceux qui sont décédés à cause des produits de l’industrie du tabac et n’empêcheront pas la création de nouvelles victimes. De plus, le remboursement complet de ce montant est totalement irréaliste puisque, compte tenu de leurs profits actuels, les sociétés de tabac nécessiteront plus de 200 années pour rembourser le coût des traitements pour ceux dont la santé a été endommagée. Permettre à ces sociétés de maintenir leurs néfastes opérations en vue de financer même une fraction de ces montants mènera à plus de dépendance, maladie et décès.»
Entente
Les groupes antitabac s’inquiètent que ceux ou celles qui pourraient bénéficier d’une telle approche tentent de convaincre le public et les décideurs politiques qu’une entente financière, accompagnée de quelques modestes mesures de santé, serait une victoire pour la santé publique.
Le docteur Atul Kapur, président de l’organisme Médecins pour un Canada sans fumée, se déclare contre toute entente avec l’industrie qui dirigerait certaines sommes vers les programmes de santé, sommes qui seraient conditionnelles à la vente future de produits de tabac.
«Même si une telle façade pourrait sembler positive pour certains, elle ne peut occulter l’inhérente injustice qui consiste à faire payer les futurs fumeurs tout en permettant à ce commerce mortel de subsister, explique-t-il, par voie de communiqué. Le Canada peut tirer la leçon émanant des États-Unis où une telle approche a eu lieu il y a 25 ans sans produire un effet structurel appréciable sur le commerce du tabac. Il est temps de mettre fin aux discussions centrées sur la compensation financière et viser une entente qui permettrait aux tribunaux d’encadrer un processus pour progressivement éliminer ce secteur voyou de façon ordonnée et expéditive. La nicotine pourrait continuer à être disponible, sous surveillance médicale, à ceux et à celles qui demeurent en situation de dépendance par rapport aux produits de cette industrie.» (C.P./IJL)