Le 3 février, la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, Andrée Laforest, lançait le nouveau Programme d’habitation abordable Québec (PHAQ).
Une initiative qui met la table en prévision du budget de mars prochain, a d’abord réagi l’Union des municipalités du Québec (UMQ) qui s’attend à des mesures financières plus musclées.
«On doit aller plus loin»
«Le soutien financier de 200 M$ confirmé avec le nouveau programme constitue un premier pas nécessaire pour concrétiser des projets d’habitation cette année, a commenté le président de l’UMQ et maire de Gaspé, Daniel Côté. Toutefois, on doit aller plus loin. Les besoins sur le terrain sont très importants. C’est un constat partout au Québec. Pour le milieu municipal, le Québec doit être un modèle en matière d’habitation. C’est notre priorité pour 2022».
Deuxième vice-président de l’UMQ qui préside aux destinées du comité sur l’habitation, le maire de Mascouche, Guillaume Tremblay, a identifié l’abordabilité, l’accessibilité et l’équité parmi les priorités que le milieu municipal souhaite voir au cœur de l’action gouvernementale en matière d’habitation. «Pour nous, ce sont trois principes fondamentaux, car derrière l’habitation, il y a des vraies personnes.»
Cela dit, l’Union se montre satisfaite que le nouveau programme favorise financièrement les projets portés par des organismes à but non lucratif. Demain, lundi 7 février, l’UMQ profitera de sa rencontre avec le ministre des Finances, Eric Girard, dans le cadre des consultations prébudgétaires, pour présenter des propositions ciblées et structurantes au chapitre de l’habitation.
Pour davantage de ressources
Si d’emblée la Fédération québécoise des municipalités (FQM) souligne que le nouveau programme répond à plusieurs de ses demandes, elle réclame à Québec des ressources financières supplémentaires pour que le milieu municipal et le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation puissent répondre ensemble aux nombreux besoins en matière de logements abordables.
La Fédération salue notamment les nouvelles modalités qui, dit-elle, permettront la concrétisation de plus de logements abordables pour les personnes et les familles à revenus modestes, pour qui le marché n’est actuellement pas favorable.
Son président Jacques Demers, également maire de Sainte-Catherine-de-Hatley et préfet de la MRC de Memphrémagog: «À titre de porte-parole des régions, la FQM appuie également l’ajout d’une aide supplémentaire pour les projets qui ne peuvent être viables dans les régions où le prix des loyers est trop bas, ce qui est conforme à nos demandes en ce sens.»
Inquiétudes
Pour sa part, le Chantier de l’économie sociale reconnaît au gouvernement une volonté de répondre au besoin de logements abordables tout en pointant quelques «angles morts» sur lesquels il propose de travailler, notamment le soutien au démarrage de projets.
«Si l’intention du PHAQ est louable et qu’une partie de l’argent est au rendez-vous, les acteurs de l’économie sociale en habitation communautaire s’inquiètent que les nouvelles règles mettent en péril les projets en économie sociale», affirme Laurent Levesque, président du conseil d’administration du Chantier.
À cet égard, il souligne que plus de la moitié des quelque 160 000 unités que compte le Québec est sous le modèle de l’économie sociale, qui demeure la meilleure solution pour le logement abordable, plaide-t-il.
«Rappelons que les OBNL et les coopératives ont fait leur preuve ces dernières années, permettant qu’une majorité de logements abordables soit construite et gérée par l’économie sociale avec tous les avantages que cela représente. Seul ce modèle permet de pérenniser l’abordabilité et de freiner la course à la spéculation, favorisant de cette façon des milieux de vie inclusifs et de qualité», ajoute M. Lévesque.
Aide au démarrage
Organisation dont la mission est de favoriser la concertation pour la promotion et le développement de l’entrepreneuriat collectif au Québec, le Chantier de l’économie sociale déplore que «la phase de démarrage ne fera désormais plus partie des coûts admissibles à du financement, contrairement aux règles de l’ancien programme AccèsLogis»,
«Une décision qui aura des répercussions majeures sur les projets de logements abordables en économie sociale alors que la période de développement entre l’achat du terrain et le début du chantier est la plus dure à financer, fait-on valoir. Contraints d’éponger ces nouveaux coûts avant même d’avoir une réponse positive ou négative de la Société d’habitation du Québec (SHQ), les promoteurs en économie sociale devront composer avec l’incertitude et les risques, ce qui menacera la création de nouvelles unités.»
Manque à gagner de 550 M$
Le Chantier profitera des prochaines semaines pour s’assurer que le nouveau Programme d’habitation abordable mette en place les conditions gagnantes pour ce type de logement dans toutes les régions du Québec.
«10 000 unités répondant aux besoins des Québécois sont toujours en attente du financement nécessaire. Les 200 millions de dollars sont un pas dans la bonne direction, bien que les besoins sur le terrain soient plutôt autour de 750 millions. L’expertise de l’économie sociale est disponible. Ensemble, en se donnant les moyens, on peut résorber la pénurie de logements abordables», de conclure la directrice générale du Chantier, Béatrice Alain.