Mise à jour: 13h25, 23 juin
Connue pour abriter l’ex-manoir du couple Dion-Angélil, l’île Gagnon du Parc de la Rivière-des-Mille-Îles (PRMI) pourrait devenir un «centre de villégiature international», principal attrait de deux projets d’investissement privé estimés à 800 M$ dans le quartier Sainte-Rose.
L’instigateur du projet, François Duplantie, projette y construire pas moins 660 unités de condos en plus d’un hôtel cinq étoiles et d’un centre de santé/bien-être, alors que le Manoir serait annexé au complexe hôtelier et converti en cinq suites, salles de réception et restaurant haut de gamme.
Revitalisation
Tout aussi ambitieux, l’autre projet mené de front en est un de redéveloppement urbain au quadrant nord-ouest des boulevards Sainte-Rose et Curé-Labelle, comprenant la construction d’un pont de 80 mètres de long qui donnerait un 2e accès à l’île Gagnon (dans sa portion nord) par la route 117.
Boutiques, salle de spectacle, hôtel et immeubles d’habitation jusqu’à 12 étages revitaliseraient l’actuel mail commercial.
En retrait, les propriétés bordant de part et d’autre la rue résidentielle Thérèse-Casgrain crouleraient sous le pic du démolisseur pour faire place à des immeubles locatifs, une résidence privée pour aînés de 245 unités et un CHSLD de 110 places.
Baptisé Place Sainte-Rose, ce projet déposé à la Ville en 2018 totaliserait près d’un millier d’unités d’habitation et 1500 cases de stationnement construites en sous-sol.
Allié de taille
Quant au développement de l’île Gagnon, le promoteur insiste pour dire qu’il s’agit d’«un projet écoresponsable en synergie avec la nature et inspiré des meilleures pratiques en matière de protection de l’environnement».
Il a d’ailleurs trouvé en Dr François Reeves un allié de taille. Selon le cardiologue d’intervention au CHUM/Cité de la Santé et expert en matière de santé environnementale, le projet de l’île répond en tous points au concept de cité cardio-protectrice. «Au Québec, sincèrement, je ne connais pas d’équivalent», a-t-il témoigné en vantant le «souci réel» de conservation de l’habitat naturel et d’intégration au milieu où il s’implante.
À peine 30 % d’une superficie de quelque 900 000 pieds carrés serait développée, les 1550 cases de stationnement prévues étant principalement souterraines. «À terme, sur l’ensemble de l’île, nous atteindrons près de 85 % d’espaces verts en surface, incluant les toits verts», a entre autres fait valoir le promoteur.
Six étages sur l’ìle
De la rive, l’impact visuel serait nul en été, assure M. Duplantie. Les immeubles projetés de six étages n’excéderaient pas le couvert forestier, poursuit celui qui s’engage à planter des conifères pour améliorer l’écran végétal en hiver.
Six étages, c’est la hauteur limite permise par l’affectation «urbaine» apparaissant au nouveau schéma d’aménagement et de développement révisé (SADR) adopté à l’automne 2017.
Incidemment, la société immobilière Olymbec, propriétaire de l’île, avait réussi à convaincre l’administration Demers de retirer l’affectation «protection», telle que proposée dans ses deux premières versions du projet de schéma révisé soumises à la consultation publique. Dans un mémoire de 17 pages déposé au printemps 2017, Olymbec plaidait que cette affectation aurait trop limité le potentiel de développement de l’île Gagnon, acquise un an plus tôt.
Éco-Nature sollicité
La semaine dernière, à la demande de la Ville, le promoteur derrière ces projets en a livré tous les détails lors d’un webinaire tenu à l’intention des Lavallois vivant à proximité du Parc de la Rivière-des-Mille-Îles.
Partenaire d’affaires d’Olymbec, M. Duplantie en a profité pour exprimer son désir de développer un partenariat avec Éco-Nature, l’organisme chargé de la gestion de ce parc reconnu depuis plus de 20 ans comme refuge faunique.
«On n’en est pas à notre premier projet sur les îles», a réagi à la fin de la présentation, le sourire dans la voix, Jean Lauzon, directeur de la mise en valeur du parc et cofondateur d’Éco-Nature, il y a 35 ans. Il s’est toutefois bien gardé de commenter le projet, affirmant que le conseil d’administration y regarderait de près avant de réagir publiquement dans les prochaines semaines.
Sondage
Reste que les projets sont assez sérieux et avancés pour que la Ville de Laval sonde actuellement – et ce, jusqu’au 12 juillet – des résidents du secteur afin d’en évaluer l’acceptabilité sociale.
À la lumière de ce coup de sonde, le comité exécutif statuera à savoir si les changements à la réglementation municipale que nécessitent ces mégaprojets pourraient être intégrés à la révision réglementaire en cours, a indiqué le chef aux demandes de services municipaux à la Ville, Martin Gratton, en ouverture du webinaire.
Pour sa part, François Duplantie souhaite une mise en chantier dès le début 2022.
Tollé
Si la soirée d’information citoyenne avait été plutôt bien reçue des quelque 200 participants en ligne le 17 juin, la résistance suscitée par ces projets allait s’exprimer à retardement.
D’abord, sur la page Facebook de la conseillère municipale de Sainte-Rose, Virginie Dufour, qui – le lendemain – annonçait la mise en ligne par le promoteur des brochures détaillées et la captation vidéo de la veille, rappelant au passage «qu’aucune décision n’a été prise à ce jour par la Ville ou les élus».
Des 160 commentaires épinglés en quatre jours, on pouvait compter sur les doigts d’une seule main ceux favorables aux projets. Essentiellement, les gens estiment qu’ils dénatureraient le caractère champêtre du Vieux Sainte-Rose, menaceraient l’aire protégée du Parc de la Rivière-des-Milles-Îles et perturberaient la quiétude des lieux.
Hier, lundi, sous l’impulsion d’Ariane Gagnon, le groupe Citoyen•ne•s CONTRE les projets Place Sainte-Rose et Île Gagnon était créé sur Facebook, regroupant déjà plus de 170 membres.
Au même moment, l’équipe derrière les projets de l’île Gagnon et de la Place Sainte-Rose lançait sa page Facebook officielle afin «d’ouvrir le dialogue» avec les citoyens et organismes du secteur et «répondre directement aux questions et commentaires».