«Cette année, c’est une exception. Ça fait quatre ou cinq fois que ça arrive», témoignait M. Zuccaro mardi dernier, en montrant des photos des crues printanières de 2002. Sur le cliché, l’eau atteint la carrosserie d’une voiture qui circule devant sa résidence.
Cette semaine, l’eau ne s’est pas aventurée si loin, mais immergeait tout de même totalement le fer à cheval qui relie la 9e à la 8e avenue.
Débris
À chaque nouvel épisode, le problème d’accès aux résidences de la partie riveraine de la rue n’est pas le seul impair auquel les propriétaires doivent faire face. Des débris de toutes sortes; branches, carcasses de canards, sont charriés par le courant et empoisonnent leur vie depuis des années. La Ville ne procède pas au nettoyage dans des délais raisonnables, selon eux.
«Ça amène des bactéries, j’imagine» avance M. Zuccaro, qui habite le 1075 depuis 23 ans. Même son de cloche chez son voisin d’en face, Jean-Luc Perras, qui habite au 1068 depuis trois ans. «Il y a sept ou huit ans, on a demandé à la Ville de remonter le niveau de la rue, mais on nous a dit que le ministère de l’Environnement ne le permettait plus.»
Remblayer la rue et éliminer le tronçon en «U» qui relie la 9e à la 8e avenue régleraient non seulement le problème des crues, soutient M. Perras, mais également le flânage estival des jeunes qui viennent faire la fête sur la berge, après avoir stationné leur véhicule devant les propriétés des résidents du coin.
Zone inondable
«On a déjà fait des redressements de rue dans le passé, à l’ouest du boulevard Arthur-Sauvé», se souvient Jean-Jacques Beldié, conseiller du district Laval-les-Îles, qui comprend Laval-Ouest. «Mais les subventions ont été éliminées.»
Avec l’adoption de sa Politique de protection des rives, du littoral et des plaines inondables, en 1987, Québec a effectivement restreint sérieusement le type de travaux qui peuvent être effectués en zone inondable.
Les propriétaires des maisons du voisinage de MM. Zuccaro et Perras, situées en zone de grand courant, c’est-à-dire dans l’espace occupé par la rivière des Mille Îles lors d’une crue de récurrence de vingt ans, bénéficient d’un droit acquis.
Tous les terrains situés dans une zone où les services d’aqueduc et d’égout ont été installés avant 1995 jouissent de ce privilège, précise Jean-Claude Beaudry, porte-parole de la Ville de Laval. Les constructions doivent toutefois satisfaire à des normes sévères.
M. Perras, qui a construit sa maison selon les exigences de la réglementation municipale sur l’aménagement dans la bande riveraine et le littoral, a utilisé des matériaux hydrofuges pour sceller les fondations de la maison, conçues «comme une coque de paquebot», souligne-t-il. La plupart de ses voisins ont pour leur part renoncé à avoir un sous-sol et ont construit leur maison au-dessus de la cote d’inondation.
Selon M. Beaudry, il serait compliqué, pour ne pas dire impossible, d’obtenir l’autorisation du ministère pour relever le niveau de la rue. «Ça ne veut pas dire qu’on ne pourrait pas faire la demande; on n’a rien à perdre», dit-il. Quant aux inconvénients vécus par les citoyens du coin, il s’agit de continuer à téléphoner à la Ville, qui envoie des cols bleus sur place quand c’est possible, pour nettoyer les débris apportés par les flots, indique le porte-parole.
La municipalité fait ses devoirs en mettant en garde les gens qui décident de construire si près de l’eau, plaide M. Beaudry: avant de prendre une telle décision, ils ne sont pas sans savoir qu’à la vue magnifique, s’ajoutent certains désagréments.