S’il n’en tenait qu’au Conseil régional de l’environnement (CRE) de Laval, la quasi-totalité des milieux humides recensés sur le territoire seraient à jamais protégés.
Dans un mémoire intitulé Le grand intérêt des derniers milieux humides de Laval, l’organisme présente une étude détaillée des 461 hectares de ces écosystèmes qui ne figurent pas au Règlement de contrôle intérimaire (RCI) adopté à l’été par le conseil municipal.
Rappelons que ce règlement vise à protéger des milieux humides jugés d’intérêt d’ici à ce que Laval se dote d’un Plan régional des milieux humides et hydriques (PRMHH), tel qu’exigé par le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) avant l’été 2022.
95 plutôt que 67 %
Co-auteur du mémoire d’une centaine de pages, le biologiste Alexandre Choquet reconnaît en le RCI «un pas dans la bonne direction», mais soutient d’un même souffle que c’est plutôt 96 % des milieux humides recensés sur le territoire dont la valeur écologique justifierait leur conservation.
«On a atteint un point de rupture», dit-il en évoquant la perte de 700 hectares ces 30 dernières années. Cela représente une superficie équivalant à 1000 terrains de soccer de milieux humides sacrifiés au profit du développement.
Depuis le mois de juillet, sous réserve de certaines exceptions, la Ville protège 1062 hectares, à savoir 67 % de l’ensemble des étangs, marais, marécages et tourbières de l’île Jésus.
«Alors que la planète fait face aux crises simultanées de la perte de biodiversité, des
changements climatiques et des inondations, il est étonnant de constater que 534 hectares de milieux humides sont considérés par la Ville de Laval comme possédant une trop faible valeur écologique pour justifier qu’on leur attribue un statut de protection», dénonçait le CRE au moment de publier son mémoire.
Critères à réviser
En dressant le portait des milieux humides «oubliés», Alexandre Choquet et ses collègues Nathalie Gendron, chargée de projets en milieux naturels, et Thierry LeCorff, technicien en bio-écologie, disent avoir relevé «plusieurs lacunes» dans la grille d’évaluation utilisée par la Ville, nommément «une surévaluation de la superficie nécessaire à l’obtention d’une note parfaite» et le fait que «la diversité floristique» n’ait nullement été considérée au moment de déterminer les milieux humides à protéger.
«Il n’y a pas de critère évaluant les espèces floristiques pour qualifier un milieux humide, se désole le biologiste Alexandre Choquet, précisant que l’administration Demers confiait au CRE en 2016 le mandat d’inventorier la flore des milieux humides sur l’ensemble du territoire.
Incidemment, l’organisme détaille dans son mémoire toutes les espèces recensées pour chacun des 22 grands complexes de milieux humides qu’il souhaite voir intégrer au RCI en raison de leur grand intérêt en termes de biodiversité.
Plan de gestion
Par ailleurs, le CRE offre à la Ville sa collaboration pour l’élaboration de plans d’action et cadres de gestion afin de pérenniser et bonifier les fonctions écologiques des milieux humides, selon qu’ils se trouvent en zone blanche, en zone agricole ou en terrain privé ou qu’il s’agisse de bassins anthropiques.
«Outre la préservation de la biodiversité, les services écosystémiques que les milieux humides nous rendent vont de l’approvisionnement en eau de qualité aux bienfaits sur la santé des populations humaines», rappelle le Conseil régional de l’environnement.
L’organisme termine en faisant valoir que ces écosystèmes ont «une valeur inestimable qui a longtemps été occultée par les impératifs du développement et que «les gouvernements de tous les paliers ont aujourd’hui le devoir moral d’agir pour assurer [leur] intégrité au bénéfice de la population et de la biodiversité».