Avec un taux de mortalité de 523 victimes de la COVID-19 pour un million d’habitants, Laval est la région la plus sinistrée au Québec, devant l’agglomération de Montréal qui affiche un taux de 454.
L’île de Montréal a beau recenser plus de la moitié (61 %) des décès au Québec, le ratio de morts au prorata de la population demeure 15 % plus élevé à Laval.
Cas confirmés
Le même constat s’observe au chapitre des cas confirmés, alors que l’île Jésus affichait, dimanche, un taux de 614 personnes infectées par tranche de 100 000 habitants contre 563 à Montréal, soit 9 % de plus.
231 morts
Selon les données publiées le 26 avril, la région de Laval comptait 231 morts dont 90 % dans les CHSLD, ressources intermédiaires (RI) et résidences privées pour aînés (RPA).
En termes de cas déclarés, ce sont 2711 Lavallois qui avaient été contaminés.
Cette hécatombe, le directeur de santé publique au Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de Laval, Dr Jean-Pierre Trépanier, l’explique en partie par la très forte intégration des marchés de Montréal et Laval où le navettage est constant.
Incidemment, les deux régions totalisaient plus de 75 % des 1515 victimes de la COVID et 60 % des 24 107 cas confirmés à l’échelle de la province.
CHSLD
«Autant à Montréal qu’à Laval, on a eu certaines situations difficiles dans des CHSLD», rappelle Dr Trépanier, qui distingue les foyers d’éclosion dans les milieux de vie pour personnes âgées de l’épidémie dans la communauté qui, elle, ne pose pas réellement problème jusqu’ici.
Qu’il suffise à penser aux centres d’hébergement de soins de longue durée de Sainte-Dorothée (78), La Pinière (37) et Fernand-Larocque (20) qui ont à eux seuls perdu 135 pensionnaires ces 4 dernières semaines et où 323 résidents combattent actuellement la COVID-19.
Comment expliquer un tel dérapage?
«Les cas sont survenus à un moment où il n’était absolument pas question de transmission par des gens asymptomatiques, dit-il en évoquant le personnel soignant. Quand ç’a commencé, les visites avaient déjà été interdites.»
Sans commenter le recours collectif déposé le 20 avril contre le CHSLD de Sainte-Dorothée et les allégations de maltraitance organisationnelle visant cet établissement, le directeur de la santé publique à Laval parle d’«une situation exceptionnelle» face à laquelle le CISSS «a mis tous les efforts nécessaires» pour freiner la propagation et protéger les résidents, affirme-t-il.
À la suite de la première éclosion au centre de Sainte-Dorothée, l’équipe de prévention et contrôle des infections a déployé «des mesures de contrôle très strictes» et entrepris de dépister tous les résidents et employés. «On a été le premier établissement à le faire», poursuit Dr Trépanier.
Dépistage systématique
Le médecin spécialiste en santé publique et médecine préventive précise par ailleurs que cette opération dépistage systématique «devenue un peu la norme dans le réseau» s’est imposée dans d’autres CHSLD publics et privés du territoire.
«Ç’a un impact [sur les chiffres], mentionne-t-il lorsqu’on aborde le fait que Laval domine pour le nombre de cas confirmés par habitant. On a enquêté pas loin de 2500 cas en l’espace d’un mois, c’est probablement plus en termes d’enquêtes que ce qu’on a l’habitude faire en un an.»
État de la situation
Les équipe du Centre hospitalier universitaire (CHU) de Québec-Université Laval et des Forces armées canadiennes venues prêter main-forte dans deux CHSLD privés non conventionnés – L’Eden de Laval et Villa Val des Arbres – ont été salutaires, soutient Jean-Pierre Trépanier.
«On peut dire que la situation est en train de se stabiliser un peu partout sur le territoire», s’encourageait-il vendredi dernier. Il n’en demeure pas moins réaliste pour la suite des choses. «Ça ne veut pas dire qu’il n’y aura plus de décès, car malheureusement beaucoup de personnes ont été atteintes», enchaînait-il d’un ton compatissant.
Déconfinement
Par ailleurs, la Direction régionale de la santé publique se prépare en vue d’une réouverture progressive des écoles, des centres de la petite enfance et de certains secteurs de l’économie.
«On va être appelé à tester davantage les gens dans la population, alors qu’au cours des dernières semaines, on a surtout testé dans les CHSLD et le personnel de la santé», mentionne le directeur de la DSP.
L’objectif est de mesurer l’impact que le plan de déconfinement du gouvernement Legault aura sur l’épidémie dans la communauté.
«Actuellement, il y a très peu de personnes qui ont été en contact avec le coronavirus malgré la situation à Laval, fait-il valoir. Peut-être 5 % maximum des Lavallois a développé l’immunité. Dans d’autres régions, c’est bien moins que ça.»
Faudra s’armer de patience, prévient Dr Trépanier.
«Ça va prendre du temps avant d’atteindre le minimum de 60 % d’immunité collective pour commencer à protéger un peu mieux les gens. Ce qui est important, c’est que tout ça se fasse graduellement en respectant la distanciation sociale parce que c’est la seule façon de s’en sortir ensemble.»