Dès le lundi 1er mai jusqu’au jeudi 4 mai, les citoyens des rues Gobeil et Bourgeois, situées dans le quartier Sainte-Dorothée, ont observé l’eau inonder petit à petit leurs résidences alors que la Ville de Laval assurait de ne pas s’inquiéter.
Les parents de Thomas Spoormakers résident sur la rue Bourgeois depuis 35 ans. À la suite des vives inondations survenues en 1998, ils ont investi des centaines de milliers de dollars afin de rendre leur maison imperméable.
Cependant, ce n’est pas le cas de tous leurs voisins, qui écopent cette année de beaucoup de dommages en raison d’une gestion des inondations jugée médiocre.
Situation prévisible
Presque tous les ans, les rues dans ce coin de Sainte-Dorothée sont inondées. Par le passé, la municipalité aurait déployé des mesures préventives afin d’éviter que les citoyens n’en subissent les conséquences.
En 2023, de telles mesures n’ont été mises en place qu’après le début des dommages, à la suite de nombreuses demandes des citoyens.
«J’étais fâché de constater que la Ville ne faisait rien, clamait que rien n’allait se produire et que l’eau allait redescendre, affirme Thomas Spoormakers, contrarié par la situation. Les citoyens pouvaient clairement voir que le niveau d’eau augmentait et qu’il fallait agir.»
Le mercredi 3 mai, Thomas est allé aider son père, car l’eau entrait dans la cour arrière. Au point culminant, l’eau atteignait environ 14 pouces de hauteur sur le terrain de ses parents.
En fin d’après-midi, se sentant ignoré par la municipalité, Thomas a décidé d’exprimer son désarroi via une publication sur Facebook en identifiant la Ville de Laval ainsi que certains médias.
Dès le lendemain matin, des travailleurs municipaux étaient à l’ouvrage afin de construire une digue pour tenter de contenir l’inondation. Le vendredi 5 mai, presque toute l’eau avait disparu des cours arrière. C’est à ce moment que le travail de longue haleine a commencé pour la vingtaine de citoyens impliqués: remettre les maisons et terrains en bon état après plusieurs jours passés sous l’eau.
«Chaque citoyen qui a vu sa maison infiltrée par l’eau doit maintenant payer des milliers de dollars pour remettre sa propriété en bon état, déplore Thomas. Je trouve ça inacceptable quand la Ville sait ce qu’elle doit faire afin d’éviter que les citoyens ne soient affectés par les inondations. Elle choisit la réaction plutôt que la prévention et c’est très décevant quand on sait que par le passé, elle a agi autrement.»
Plan d’intervention
Une digue linéaire temporaire anti-inondation de 1,2 kilomètres a été installée plus tôt ce printemps par la Ville aux abords de la rivière des Mille Îles, le long de la rue Riviera et de la 20e rue.
Outre cette digue, la Ville indique avoir «mis en place plusieurs stratégies de surveillance et d’intervention afin de gérer les impacts des crues printanières ainsi qu’un mécanisme d’appels automatisés déployé dès qu’un risque d’inondation se présente dans une zone de surveillance.»
Selon la mère de Thomas Spoormakers, Louise Britton, l’appel automatisé concernant son secteur aurait été envoyé le vendredi 5 mai en avant-midi, alors que la rue était déjà inondée depuis trois jours.
La page web de la Ville de Laval intitulée Mesures d’adaptation et de résilience aux inondations diffuse plus de détails sur le plan d’intervention en vigueur, mais la dernière mesure qui y est indiquée date de 2020.
Afin de prioriser les mesures préventives à déployer en cas d’inondations, la Ville utilise les zones de planification d’inondations. Le territoire est ainsi subdivisé en quatre catégories, de A à D, en fonction du risque d’augmentation du niveau d’eau.
La zone touchée par la digue de 1,2 kilomètres est catégorisée A (zone la plus prioritaire) tandis que les rues Gobeil et Bourgeois se trouvent en catégorie B.
Mesures permanentes
Comme les risques d’inondations sont élevés chaque année dans le secteur, Thomas Spoormakers s’interroge quant aux mesures temporaires employées par la municipalité.
«Laval est une île entourée d’eau, rappelle-t-il. La Ville sait que les inondations et leurs effets vont prendre plus d’ampleur avec les années. Elle devrait prendre le temps d’analyser et d’investir dans des mesures permanentes afin de prévenir et d’aider les citoyens à éviter les dégâts.»
Interrogée à ce sujet, la Ville affirme poursuivre ses démarches en vue de développer «une stratégie d’intervention pour mettre en œuvre des projets d’aménagement qui réduiront la vulnérabilité face aux inondations et de diminuer les impacts récurrents.» Les digues font partie des aménagements analysés.
Chacune de ces mesures devra être acceptée par le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs au préalable. La Ville indique effectuer actuellement les études demandées par ce dernier en lien avec la stratégie d’intervention. Cette première étape devrait être complétée d’ici la fin de l’année 2023.