« Ce qu’on apprend avec les abeilles, c’est une façon de vivre, affirme celui qui a longtemps vécu dans la rue. On regarde les efforts qu’une petite abeille fait et on s’en inspire. »
Les abeilles sont sa nouvelle passion. Ces pollinisatrices noires et jaunes sont tellement devenues importantes pour lui qu’il a été difficile de connaître son passé. Pourtant, il a vécu tout un cheminement.
« C’est étonnant qu’il n’en ait pas parlé, rigole le directeur général de l’Accueil Bonneau, Aubin Boudreau. Il est connu pour sa facilité à raconter son histoire, à partager son expérience. Mais c’est bon signe. Ça montre qu’il pense à autre chose. Qu’il chemine bien. »
La descente vers la rue
C’est donc M. Boudreau qui a jugé important de raconter brièvement, au Courrier Laval, le passé de Roger Décarie.
Il y a quelques années, M. Décarie a vécu une séparation. Ensuite, il a perdu le contact avec ses enfants. Il s’est alors retrouvé à la rue où il a dû vivre avec une dépendance.
« Ça fait déjà cinq ans que j’ai commencé à fréquenter l’équipe de l’Accueil Bonneau », dit Roger Décarie.
Commence alors un important travail de réinsertion sociale qui se fait étape par étape. L’année 2015 sera marquante pour le cheminement de Roger Décarie : c’est l’année où il découvre le projet Miel de Bonneau.
« C’est la deuxième année que je m’occupe des abeilles, s’exclame-t-il. Ç’a changé ma vie. »
Une fois par semaine, ce qui n’est pas suffisant selon lui, il s’occupe d’une des 50 ruches de ce projet de l’Accueil Bonneau.
« À toutes les deux semaines, mon équipe et moi, on vérifie les ruches à Laval, explique-t-il. Seul, je vérifie que la reine se porte bien, que les œufs sont en état et que la ruche a l’air bien. »
Impliqué du début à la fin du processus, il développe des connaissances importantes sur l’apiculture.
« Il développe aussi, comme les autres gars du projet, des connaissances sociales, affirme M. Boudreau. Celles nécessaires au milieu du travail. »
Retrouver un sens à la vie
Le directeur général de l’organisme situé à Montréal pense que ce projet a permis à Roger Décarie de redécouvrir un sens à sa vie.
Le Miel de Bonneau a offert plusieurs connaissances à M. Décarie qui parle maintenant très savamment des insectes pollinisateurs.
« J’en ai tellement appris, affirme-t-il. Je n’en ai pas peur. Je joue avec les abeilles. Je travaille sans aucune protection. Les abeilles n’attaqueront pas si elles ne sont pas attaquées. Je fais donc des gestes calmes. »
C’est dans le respect qu’il effectue chaque vérification et qu’il s’implique dans toutes les étapes du cycle de la création du miel. Comme ses collègues, il a tellement ce projet à cœur qu’il en change ses habitudes de vie.
« On fait attention à la nourriture, assure le participant. On mange mieux. On cherche des fruits et des légumes plus biologiques. Ceux qui ont moins de pesticides qui tuent nos abeilles. Sans elles, les humains vont manger quoi tantôt? »
Depuis quelque temps, Roger Décarie vit maintenant dans une maison de transition où il commence à espérer des projets d’avenir. Il aurait même retrouvé ses enfants.
« C’est exactement ça, le processus [du projet Miel de Bonneau]. On amène les gars ailleurs », conclut fièrement Aubin Boudreau.