Le regroupement régional pour la défense des droits et intérêts des personnes en situation de handicap juge discriminatoires les capsules vidéo du maire Marc Demers envers la population sourde lavalloise.
Trois mois depuis le décret de l’état d’urgence sanitaire au Québec, le Regroupement des organismes de promotion des personnes handicapées de Laval (ROPPHL) et ses membres oeuvrant auprès de la communauté sourde déplorent l’absence d’interprète pour traduire en langue des signes les messages que le maire diffuse sur sa page Facebook en lien avec les mesures prises dans la foulée de l’actuelle pandémie.
Dans une lettre datée du 7 mai, ils lui demandaient de rendre ses points de presse et allocutions accessibles aux personnes sourdes, rappelant que «le milieu associatif des Sourds réclame depuis plusieurs années, sans succès, la présence d’interprète dans les mesures d’urgence».
Effort insuffisant
La Ville a beau sous-titrer les capsules vidéo, cette mesure demeure vaine pour ceux qui communiquent avec la langue des signes québécoise (LSQ), mentionne la directrice générale du ROPPHL, Josée Massicotte, qui n’en reconnaît pas moins l’effort.
À la différence des personnes malentendantes, les personnes sourdes de naissance ou qui ont perdu l’usage de l’ouïe avant l’acquisition de la parole «ne peuvent lire les sous-titres car leur langue maternelle est la LSQ, qui a des codes grammaticaux totalement différents du français oral», précisait le Regroupement dans la lettre adressée au maire Demers.
Conférence de presse seulement
Porte-parole du cabinet du maire, Valérie Sauvé explique qu’il a été convenu qu’à l’avenir, les conférences de presse organisées par la Ville mettraient en scène un interprète en langue des signes, mais qu’une telle logistique ne se prêtait malheureusement pas pour les vidéos.
«Compte tenu qu’on en fait en moyenne trois par semaine et qu’on doit communiquer les directives de la Santé publique le plus vite possible, ça prendrait trop de temps et la mise en ligne s’en trouverait trop décalée par rapport aux nouvelles», mentionne-t-elle, estimant les délais en termes de journées.
«Montréal et Québec le font pour les conférences de presse aussi, précise Mme Sauvé, ajoutant que le Service des communications est à monter une banque d’interprètes. On va l’intégrer dans nos pratiques.»
Incompréhension
Cette explication apparaît un peu courte aux yeux de Josée Massicotte.
«Nous, on est capables de faire des vidéo-conférences sur Zoom avec des interprètes à distance. Des interprètes traduisent en direct les conférences de presse. Pourquoi ils ne sont pas capables de le faire pour une captation vidéo?» questionne celle qui déplore le fait que la décision ait été prise sans que son organisme ne soit consulté.
La déception est d’autant plus vive que «depuis le début de la pandémie, les capsules vidéo ont remplacé les conférences de presse», ne manque-t-elle pas de rappeler tout en précisant que la situation exceptionnelle que l’on vit affecte tout le monde, y compris les personnes sourdes.
«Ce qu’il y a de plus anxiogène, c’est de ne pas savoir ce que les gens disent, d’être obligé de se tourner vers un conjoint, des parents ou amis pour s’informer. Ça amène une distorsion dans le message […] Il faut que tout le monde ait accès à la même information. C’est une question d’équité», termine la directrice du Regroupement des organismes de promotion des personnes handicapées de Laval (ROPPHL).