Les contrôles exercés par le Service de police de Laval sur les cartes d’essence sont «nettement insuffisants pour le volume d’achats, qui s’est élevé à 1,5 million $ en 2022».
C’est ce que conclut la vérificatrice générale de la Ville, Véronique Boily, dans son rapport 2022 dévoilé le 13 septembre.
«La manque de rigueur, écrit-elle. Aucun mécanisme ne permet de s’assurer que les cartes actives sont associées à des véhicules en service».
L’audit de performance réalisé l’année dernière ciblait les Services de police et de sécurité incendie, dont les employés sont à quelques exceptions près les seuls utilisateurs de ces cartes fournies par la Ville. Ces transactions à la pompe ont totalisé plus de 2.1 M$ en 2022.
«Dans ces deux services, nous avons détecté des situations où plus d’une carte était active pour un même véhicule», note Mme Boily. En juin 2022, on recensait 336 cartes d’essence associées à un véhicule de police et 106 au Service de sécurité incendie.
Laxisme et négligence
Le Service de police va jusqu’à ignorer les «rapports d’exception» détectant des transactions potentiellement frauduleuses. Ces rapports transmis par courriel par le fournisseur de cartes n’ont pas été analysés entre juin 2020 à mai 2022, période couverte par les travaux d’audit.
La direction du Service de police explique ne pas en tenir compte en raison d’un trop grand volume. Pour la période auditée, ce sont 1618 rapports qui ont été acheminés au Service, soit une moyenne de 2 rapports par jour. «Si certaines exceptions programmées signalent des transactions normales pour les activités de la police, d’autres sont pertinentes et mériteraient une investigation», fait valoir la vérificatrice générale.
Parmi celles-ci, elle cite des transactions à l’extérieur de la province, dont une en Alberta et une autre en Ontario à moins de 24h d’intervalle; trois achats consécutifs de plus de 30 litres de carburant à 2 minutes d’intervalle sur la même carte; achats d’essence excédant la capacité du réservoir du véhicule associé à la carte, dont 3 transactions de plus de 90 litres pour un véhicule ayant une capacité de 72 litres; achats d’essence super avec une carte associée à un véhicule utilisant de l’essence ordinaire (60 exceptions signalées).
Frais de retard
Entre 2020 et 2022, la mauvaise gestion des cartes d’essence a coûté plus de 17 000 $ en frais d’intérêt en raison des retards de paiement des soldes, et ce, «sans que la situation [ne] soit prise en main» par les autorités municipales, ne manque pas de souligner Véronique Boily. Ces frais de retard concernent l’ensemble des cartes en circulation sur le territoire.
Cartes de réserve
Le Bureau de la vérificatrice générale s’est aussi penché sur les cartes de réserve destinées à une utilisation temporaire lors de la perte d’une carte, par exemple.
On y apprend que «la gendarmerie n’a pas mis en place de registre pour recenser les utilisateurs et les véhicules concernés lors de l’emprunt d’une carte de réserve, bien que 90 000 $ y aient été portés de juin 2020 à mai 2022».
Même qu’au moment du décompte, deux des cinq cartes attribuées à la division de la gendarmerie étaient introuvables alors que des transactions récentes avaient pourtant été portées sur l’une d’elles, précise Mme Boily dans son accablant rapport.
«De plus, aucune mesure de sécurité physique n’était en place: les cartes se trouvaient dans un bureau accessible à tout le personnel autorisé à se déplacer dans la gendarmerie», ajoute-t-elle.
Quant au Service de sécurité incendie, s’il «tient un registre des prêts de cartes de réserve […], il n’en a pas fait un suivi rigoureux visant à ce que leur utilisation soit temporaire».
Commentaires
Les six recommandations formulées par Mme Boily visant à assurer une saine gestion des activités liées aux cartes de crédit ont été acceptées par la direction des services audités.
«Le Service des finances publiera annuellement la reddition de compte sur l’utilisation [des cartes d’essence] afin d’informer le conseil municipal sur l’utilisation des fonds publics. Nous recommanderons aux services utilisateurs de faire préapprouver en début d’année le montant d’achat prévisionnel pour l’année subséquente», commente la direction des Finances.
Du côté du Service de police, on affirme que les travaux pour «formaliser un plan d’action» à la lumière des recommandations de la vérificatrice générale ont cours et que «ces actions seront mises en place le plus rapidement possible».
Pour ce qui est du Service de sécurité incendie, la direction avait déjà mis en place des mesures pour resserrer les contrôles avant la fin de l’audit, mentionne Mme Boily.
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