Le président de la Société nationale du Québec à Laval (SNQL), Jean Desautels, a envoyé une requête au ministère de la Culture pour la préservation d’un immeuble patrimonial du XVIIIe siècle, la maison Charbonneau, située sur le boulevard des Milles-Îles.
Dans la demande, que le Ministère a confirmé avoir reçue, M. Desautels mentionne un «manque d’entretien évident et un désintérêt marqué de son actuel propriétaire», tel qu’indiqué dans un article du Devoir.
Il souhaite éviter un sort semblable à la maison Boileau, à Chambly, qui a croulé sous la pelle mécanique le mois dernier, étant jugée dangereuse en raison de son état.
Aussi appelée maison Pierre-Thibault, du nom d’un ancien propriétaire, le bâtiment historique de Saint-François est devenu une priorité de la SNQL car son état devient critique. Des fissures dans la brique et du bois brûlé indiquent une détérioration de la structure.
«C’est une urgence, explique le président. Il faut que le ministère intervienne rapidement. La plupart des immeubles patrimoniaux sont la propriété de gens qui s’en occupent, donc nous n’avons généralement pas besoin d’agir.»
Historique
Une inscription sur la pierre devant la maison indique qu’elle aurait été construite en 1736, ce qui en fait vraisemblablement l’un des derniers immeubles datant du régime français à Laval.
«Notre réflexe est de raser et construire du moderne, déplore M. Desautels. Quand on fait cela, Je me souviens ne veut plus rien dire.»
Pour le résident de Sainte-Rose, avec sa forme carrée et sa dimension d’un étage et demi, l’architecture typiquement française est rare sur l’île Jésus.
La préservation d’un tel bien permettrait de développer une fierté lavalloise et un sentiment d’appartenance fort. «Si on détruit les racines à mesure qu’elles poussent, on va être un peuple déraciné», résume-t-il.
Classée immeuble patrimonial depuis 1977 en vertu de la Loi sur le patrimoine culturel, la maison Pierre-Thibault a obtenu une aire de protection deux années plus tard.
Isolée
Une problématique soulevée par le président de la SNQL est la distance de l’immeuble patrimonial avec d’autres sites protégés.
«Si on voulait détruire une maison historique dans Saint-Vincent-de-Paul, les gens lèveraient leur bouclier.»
Solutions
Officiellement, Elena Agostino est propriétaire du lot, mais son père Vincenzo Agostino est celui qui a été rejoint par les médias et le Ministère.
Dans un échange de courriels, ce dernier a affirmé être «intervenu auprès du propriétaire à plusieurs reprises afin de lui rappeler les exigences de la Loi sur le patrimoine culturel à l’égard d’un bien classé et les obligations qui en découlent.»
Selon la porte-parole du ministère de la Culture, Annie LeGruiec, on souhaite minimalement une consolidation de sa structure, se gardant d’«exiger une rénovation complète du bâtiment».
Elle ajoute que «le Ministère évalue présentement divers scénarios afin d’assurer la préservation de ce bien classé et qui pourraient notamment mener à des démarches judiciaires.»
Des recours en justice sont possibles, mais non favorisés. Pour le moment, Mme LeGruiec précise que l’approche privilégiée «en est une de sensibilisation dans l’objectif d’encourager le propriétaire à entreprendre les travaux nécessaires».
De son côté, Vincenzo Agostino est réticent à investir pour restaurer l’immeuble.
En 2014, le propriétaire a adressé au Ministère une requête d’autorisation pour sa démolition. À la suite d’une inspection par un ingénieur en structure spécialisé en patrimoine, cette demande a été refusée.
«C’est pas que je veux la démolir parce que je l’aime pas, a-t-il mentionné au Devoir. C’est que je veux pas mettre 300 000 $ ou 400 000 $ là-dedans et juste récupérer 60 % du Ministère.»
Support
Jean Desautels a envoyé la lettre à la Ville de Laval et quelques députés provinciaux et municipaux. Il affirme recevoir du support de chacun.
«Notre but doit être que cette maison puisse avoir son sens dans l’histoire, raconte Francine Charbonneau, députée de Mille-Îles. Éventuellement, des personnes qui font un tour de l’île devraient pouvoir reconnaître des endroits qui témoignent de ses débuts.»
La porte-parole de la Ville de Laval, Sarah Bensadoun, a confirmé la volonté de collaborer pour que «ce bâtiment puisse rester longtemps et être mis en valeur». Elle ajoute cependant que «la première étape doit se faire par le Ministère».