Collaboration spéciale de Jonathan Brien. Ce lundi 14 juin marque le 129e anniversaire d’un événement tragique et méconnu dans l’histoire de Laval: la tornade de Sainte-Rose de 1892.
À l’époque, Sainte-Rose était déjà reconnue par les Montréalais comme un lieu de tourisme et vacances. La tornade avait causé six décès, surtout des enfants.
Or, selon les journaux de l’époque, 15 personnes blessées par le phénomène d’une «force inouïe» sont décédées par la suite. La tornade aurait donc fait 21 morts en tout.
«La tornade de Sainte-Rose est la plus meurtrière jamais vue au Québec, confirme le météorologue Gilles Brien. Une tornade de la même force, avec des vents d’au moins 200 km/h, avait fait quatre morts dans la région de Drummondville en 1975.»
Journée d’enfer sur le Québec
Ce fameux jour du 14 juin 1892 avait été marqué par une éruption de tornades et d’orages de grêle et vents violents, non seulement au Québec, mais aussi aux États-Unis.
À Gatineau, Sainte-Thérèse, Saint-Vincent de Paul, les dégâts ont été sévères. Des arbres de plus d’«un pied de diamètre» ont été déracinés, dont des chênes immenses.
Des dizaines de granges avaient été déplacées sur plus d’un arpent. À Québec, un bateau à vapeur sur le fleuve a même été renversé par les rafales.
Le journal La Patrie rapporte que deux chaloupes ont été emportées dans l’air et projetées à une distance d’un mille! Partout, la nature s’était déchainée au Québec. Mais c’est à Sainte-Rose que la tornade avait été la plus dévastatrice.
Aucun avertissement
C’était jour de classe à l’école du Bas de la Grande Côte lorsque la tornade s’est abattue sur le bâtiment peu solide fait de planches de bois.
Il faisait très chaud en cet après-midi humide de juin. L’école, où environ 25 enfants terminaient leurs leçons, a été soufflée comme un fétu de paille.
Yvan Ouimet, un retraité de Sainte-Rose et historien amateur de 74 ans, raconte que son grand-père était sur place le jour fatidique.
«Mon grand-père disait que s’il était sourd, c’était à cause de la tornade, de raconter M. Ouimet. Le bruit était épouvantable. Les vitres et les portes ont été défoncées violemment. L’école a été soulevée de 50 pieds dans les airs avant d’être projetée de l’autre coté du chemin! Mon grand-père a eu la vie sauve car il disait s’être protégé des débris en cachant sous son pupitre de bois. Ses copains ont eu moins de chance. Trois enfants sont morts.»
Il n’existait pas encore de systèmes d’alertes précoce ou d’avertissements météorologique. Le tourbillon meurtrier était arrivé sans aucun avertissement.
Selon les témoignages et dommages subis, on estime que la tornade, décrite par les journaux du temps comme une nuée tourbillonnante, une trombe, ou encore, un cyclone, était en fait une EF-3 sur l’échelle des tornades.
«Pour démolir des maisons de pierre, les vents devaient dépasser les 200 km/h», explique Gilles Brien. Des témoignages sur de gros débris comme des chaloupes projetés très loin suggèrent des rafales de 250 km/h ou plus.»
La tornade s’était déplacée vers l’est car elle a été observée à Terrebonne, Repentigny, et à Varennes, ou elle a fauché la vie de deux enfants.
Phénomène rare
Les tornades sont rares au Québec. Environnement Canada ne tient compte que les tornades confirmées qui font des victimes ou des dégâts.
La dernière fois qu’une tornade d’une force comme celle de Sainte-Rose a frappé le Québec était le 21 septembre 2018, à Gatineau.
Les dommages aux véhicules, maisons et entreprises ont atteint les 300 millions$, selon le Bureau d’assurance du Canada. À ce jour, c’est la tornade la plus coûteuse jamais vue au Québec.
Avec les changements climatiques, les orages qui engendrent des tornades sont en train d’augmenter. Le quartier de Sainte-Rose risque-t-il d’être rayée de la carte un jour?
Pour les experts du climat, il est certain que la hausse des phénomènes météorologiques violents observés un peu partout dans le monde est inquiétante.
Quand au député de Sainte-Rose, Christopher Skeete, ce résident de longue date croit qu’il faut tout faire pour lutter contre le changement climatique.
«C’est une priorité pour la planète, les jeunes, pour les gens de Laval surtout, qui ne veulent pas revoir une tornade comme celle qui a frappé Sainte-Rose il y a un siècle. »
La saison des tornades au Québec s’étire du mois d’avril à septembre. Chaque année, Environnement Canada en détecte une demi-douzaine. Cette année, au 10 juin, quatre tornades ont déjà été confirmées, principalement en Abitibi.