Les pharmaciens d’établissement du Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de Laval ont dû revoir leurs pratiques en raison de la pandémie de la COVID-19.
Parmi les changements apportés, notons une redirection des ressources du département vers les centres d’hébergement et de soins longue durée (CHSLD) qui étaient particulièrement affectés au cours de la première vague.
«Les pharmaciens ont beaucoup contribué à mettre en place des protocoles, précise Roxane Therrien, cheffe du département de pharmacie du CISSS de Laval. La maladie était très agressive. Les gens en fin de vie devaient être mieux soignés pour des choses que nous n’avions jamais vues.»
Elle précise aussi que l’augmentation de la demande aux soins intensifs a permis aux pharmaciens de développer «un rôle un peu plus grand» dans les installations de santé lavalloises.
«Nous faisions une prescription autonome et le suivi de certains médicaments, alors qu’il y avait souvent une contrevérification avec le médecin par le passé, poursuit Mme Therrien. Maintenant, nous faisons plus de choses de manière autonome, donc nous nous sommes impliqués à des endroits où nous étions moins présents.»
Nouveaux lieux
La pandémie a aussi mené à l’ouverture de sites non traditionnels de soins, que ce soit dans un hôtel lavallois, à la Place Bell ou l’aréna Cartier. Encore une fois, les pharmaciens étaient très impliqués.
«Nous nous assurions que le service de médicaments se faisait de manière sécuritaire, poursuit la cheffe du département de pharmacie au CISSS de Laval. On faisait aussi quelques soins pharmaceutiques pour assurer la sécurité, puis qu’il n’y aurait pas de problème à l’admission et au congé, car ce sont des endroits avec des risques d’erreur.»
Par ailleurs, une pharmacienne avait été attitrée au site non traditionnel de soins de la Place Bell pour assurer un meilleur service. Cela a toutefois impliqué de délaisser certains secteurs d’activités durant la pandémie, tels que les groupes de médecine de famille.
Effectifs réduits
Malgré ces nouvelles initiatives, le département de pharmacie du CISSS de Laval faisait face à un manque de ressources à la fin de l’année 2020.
Selon une enquête réalisée par l’Association des pharmaciens de santé du Québec (APES), cinq postes n’étaient pas comblés au sein de cette équipe, ce qui représentait un taux de pénurie de 12 %. Le CISSS de Laval assure que le problème est maintenant réglé. Au Québec, le taux de pénurie demeure de 19 %.
«Nous avons la chance d’être bien situés et d’avoir un département attractif, note Roxane Therrien. Ça peut toutefois changer du jour au lendemain si certains membres de notre équipe sont intéressés d’aller dans des régions qui offrent des primes d’installation avec un salaire plus alléchant. On se divise une ressource très rare dans la province.»
Mme Therrien précise que son effectif actuel lui permet seulement de combler les besoins du moment. Elle ne peut donc pas développer de nouveaux services pour les usagers.
Mesures temporaires
Les ressources humaines sont limitées pour plusieurs raisons. Selon Linda Vaillant, directrice générale de l’APES, l’incertitude salariale joue pour beaucoup.
«Nous sommes en compétition avec le privé, assure-t-elle. Le gouvernement a mis en place des mesures temporaires sur le salaire qui nous permettent d’être compétitifs, mais, comme elles viennent à échéance, ça nuit beaucoup à l’augmentation de la relève. Cela fait plus de 10 ans que ces mesures sont en place. Il est temps qu’elles ne soient plus temporaires.»
À Laval, près de 20 % du salaire des pharmaciens pourrait venir à échéance si le gouvernement provincial décide de ne pas renouveler ces mesures faisant partie d’une entente de travail échue depuis mars 2020.
Rappelons que les pharmaciens d’établissement doivent obtenir une maîtrise plutôt qu’un baccalauréat. Ces années supplémentaires de formation permettent d’apprendre des procédés plus spécifiques, tels que les préparations stériles, la chimiothérapie et les soins critiques.
«À la différence du privé, nous travaillons davantage en interdisciplinarité avec les autres équipes des établissements de santé, conclut Roxane Therrien. Habituellement, c’est la profession elle-même qui attire les gens: nous sommes dans un milieu plus critique et travaillons en équipe.»