Dans la foulée du projet de loi 40 modifiant l’organisation et la gouvernance scolaires, quatre élus de la Commission scolaire de Laval (CSDL) dont sa présidente, Louise Lortie, ont pris la parole à la dernière séance du conseil municipal en 2019, sollicitant l’appui du maire et des élus municipaux.
En clair, ils étaient venus demander à leurs vis-à-vis municipaux de voter en faveur de la motion – que l’opposition officielle allait déposer plus tard en soirée – pour le maintien des commissions scolaires et de leurs élus. Comme l’avait fait à l’unanimité le conseil municipal de la ville de Montréal, deux semaines plus tôt.
Deux poids deux mesures
Commissaire de la circonscription de Sainte-Rose et membre de l’exécutif du conseil des commissaires à la CSDL, Jonathan Dale Woo a jugé «discriminatoire» ce projet de loi qui reconduit à la communauté anglophone ses droits d’être représentée par des élus scolaires tout en retirant ces mêmes droits à la majorité francophone.
Indépendamment de leur langue maternelle, les Lavallois devraient avoir le droit d’élire démocratiquement leurs représentants scolaires, a-t-il mentionné.
Appel aux conseillères
Élue scolaire dans Laval-Ouest, Lyne Lapensée a directement interpellé les conseillères municipales Christiane Yoakim, Virginie Dufour, Sandra Desmeules, Aline Dib, Sandra El-Helou, Jocelyne Frédéric-Gauthier, Aglaia Revelakis et Isabella Tassoni.
«Je suis persuadée que vous ne souhaitez aucun recul des femmes en politique», a-t-elle lancé tout en soulignant que 51 % des élus scolaires sont des femmes au Québec, ce qui en fait «le seul palier démocratique paritaire».
À la CSDL, 10 des 17 commissaires sont des femmes élues au suffrage universel, soit près de 60 % du conseil, n’a pas manqué de préciser Mme Lapensée.
«Vous le savez, être une femme en politique n’est pas toujours facile», a terminé la commissaire, demandant à ses consoeurs de leur permettre de «continuer à représenter les citoyens pour offrir le meilleur service possible aux élèves, jeunes et adultes, ainsi qu’à la communauté».
Troisième commissaire à intervenir au micro, Roxane Borgès Da Silva a pour sa part exprimé son inquiétude envers «la centralisation des pouvoirs» entre les mains du ministre de l’Éducation qui découle du projet de loi. «Si c’est adopté, ce ne sera plus avec les élus scolaires que vous aurez à travailler», a-t-elle souligné au maire tout en évoquant une éventuelle «imposition» ministérielle dans le choix des terrains à retenir pour la construction de nouvelles écoles.
Ouverture
De son côté, la présidente de la CSDL, Louise Lortie, a fait valoir «qu’il a tant d’enjeux importants à régler avant même de penser au changement de structure proposé».
Cela dit, en matière d’élections scolaires, elle s’est dite «ouverte aux changement», concédant «qu’une réflexion s’impose quant à l’ensemble du système d’éducation au Québec».
Pour elle, la démocratie scolaire locale demeure le meilleur moyen pour «s’assurer que nos écoles ne soient pas seulement des établissements scolaires, mais des lieux rassembleurs au service de toute la communauté».
Enjeu trop important
Le maire Marc Demers, son vice-président Stéphane Boyer et Virginie Dufour, également membre du comité exécutif, ont chacun opposé la complexité du dossier à la demande conjointe de Louise Lortie, du chef de l’opposition officielle, Michel Trottier (le proposeur) et du coleader de la seconde opposition, David De Cotis, de traiter séance tenante la motion, prétextant l’urgence de la situation.
«Plus l’enjeu est important et complexe, plus on a besoin de temps pour y réfléchir», a d’abord indiqué M. Demers après avoir confié qu’«à l’heure actuelle, j’aurais une difficulté à me positionner».
Finalement, il a été décidé à 13 voix contre 6 de remettre le débat en janvier comme le prévoit d’ailleurs la règle d’usage.
En réponse aux points soulevés
À la période de questions réservée aux citoyens, le maire avait toutefois pris soin de répondre à certains points soulevés par les quatre élus scolaires, soulignant au passage que «l’endroit où faire des représentations, c’est en commission parlementaire».
Concédant que rien ne soit «irréversible», il a aussi mentionné que «certains pourraient prétendre que la démocratie» a parlé lors du dernier scrutin provincial en faisant référence à la position très campée de la Coalition avenir Québec (CAQ) en matière d’élections scolaires.
Enfin, Marc Demers a désamorcé la perspective selon laquelle la Ville risquerait de se voir «imposer des terrains et des enjeux» advenant la disparition du palier scolaire, rappelant que son administration a l’habitude de transiger au quotidien avec les différents Ministères à Québec.
Motion
Quant à Michel Trottier, il a justifié sa motion par la pertinence, voire la nécessité du rôle que jouent les commissaires scolaires dont la gouvernance dame le pion à celle des élus municipaux en termes de proximité, affirme-t-il.
Directeur d’école à la retraite, M. Trottier soutient que, malgré la bonne volonté qui les anime, les décisions prises par les administrateurs ne vont pas nécessairement dans le meilleur intérêt des enfants et de leurs parents.
De par leur présence assidue aux différents conseils d’établissement d’école et du fait qu’ils côtoient les parents sur une base régulière, ces élus sont à même de prendre «le pouls», dit-il, pour mieux éclairer d’importants enjeux liés aussi bien au transport scolaire, à la construction d’écoles, au déplacement d’élèves qu’aux services d’éducation spécialisée dispensés dans leurs établissements.
«Moi, je crois en les commissions scolaires», a dit le leader de l’opposition tout en reconnaissant qu’il fallait les moderniser.
Voici donc le libellé de la motion qui sera débattue à la séance du conseil municipal du 14 janvier prochain: «Que la Ville de Laval exprime l’importance de maintenir des commissaires scolaires élus représentant un territoire donné et demeurant imputables à leurs citoyens des orientations et décisions prises en matière d’éducation publique.»