La multinationale Couche-Tard touchera en 2019 et pour les quatre années à venir «un incitatif au développement économique» récurrent de 80 000 $ par année.
Cette somme représente le tiers d’un montant annuel maximal établi à 250 000 $ que les Municipalités peuvent désormais octroyer à des entreprises privées, un pouvoir prévu à la Loi sur les compétences municipales.
Toutefois, considérant les normes comptables liées aux subventions pluriannuelles, le montant total doit être imputé durant l’exercice financier où l’aide est consentie. C’est ainsi que cette dépense de 400 000 $ non-budgétée sera financée à la hauteur de 150 000 $ à même la réserve dédiée aux dépenses imprévues, peut-on lire dans le sommaire décisionnel préparé par le Service du développement économique.
Malaise
Seul élu à s’opposer à cette résolution, le conseiller municipal de Fabreville représentant l’opposition officielle, Claude Larochelle, a questionné la pertinence de soutenir financièrement une multinationale au chiffres d’affaires annuel dépassant les 59 milliards US. Pour lui, ces fonds publics auraient été mieux investis auprès d’entreprises en démarrage ou en difficulté.
Chargé des dossiers économiques au comité exécutif, Stéphane Boyer a justifié la décision en signifiant qu’il ne fallait rien prendre pour acquis. «On a voulu consolider les emplois que Couche-Tard créait ici à Laval, a-t-il dit en rappelant que le géant de l’industrie du commerce de l’accommodation avait beau jeu, lui qui occupe des bureaux un peu partout au pays, en Amérique et ailleurs dans le monde. C’est sûr que si d’autres entreprises sont prêtes à venir s’installer à Laval et créer 200 emplois, on va les appuyer de toutes les façons qu’on peut.»
M. Boyer évoquait ainsi l’ajout de 200 postes annoncés au printemps 2017 dans la foulée de l’agrandissement du siège social dans Sainte-Rose.
«Si on l’a fait, c’est que c’est payant pour les citoyens de la ville de Laval, a enchaîné le maire Marc Demers. C’est un investissement qui va rapporter beaucoup plus».
Quant à Ray Khalil, également membre du comité exécutif, il s’est levé pour déclamer qu’il était «fier que Laval se batte pour garder des sièges sociaux à Laval, fier que Laval travaille pour avoir des emplois à Laval pour les lavallois».
Pour M. Larochelle, ces explications demeurent des accroires, convaincu que «Couche-Tard n’aurait pas déménagé son siège social aux îles Moukmouk ou ailleurs s’il n’avait pas eu ce bonbon-là non budgété».
Balise
Claude Larochelle a aussi déploré l’absence de critères d’éligibilité, lesquels permettraient d’encadrer objectivement l’analyse des projets et qualifier une entreprise pour ce type d’aide financière versé à titre d’«incitatif au développement économique».
Un avis partagé par le leader de la seconde opposition et représentant d’Action Laval, Michel Poissant. «Le reste de l’argent va-t-il être utilisé pour des entreprises en démarrage, attirer une entreprise de l’extérieur, un siège social, des emplois à valeur ajoutée?» a questionné le conseiller de Vimont.
Quant au Service du développement économique, il étayait sa recommandation en indiquant avoir obtenu l’assurance de la direction de Couche-Tard qu’elle ne touchait pas d’aide gouvernementale aux fins de réduction de taxes foncières et que son siège social regroupait à Laval tous les employés au Québec affectés aux différentes tâches relevant des activités du centre de services. En clair, on parle ici des départements de la finance, comptabilité, technologies des communications et de l’information (TIC) et distribution. L’entreprise s’engage également à tenir informer la Ville de tout changement à ces égards. «Ces déclarations et cet engagement permettent de respecter les critères prévus au versement d’un incitatif au développement économique», précise-t-on dans le sommaire décisionnel qui recommandait le versement au géant lavallois d’un montant de 400 000 $ réparti sur 5 ans.
En 2018, Couche-Tard a réalisé des profits de 1,8 G$ US.