Dans une lettre d’opinion publiée le 9 août, la conseillère municipale de Sainte-Rose responsable des dossiers liés à l’environnement au comité exécutif de la Ville, Virginie Dufour, revient sur le vote pris au conseil municipal – deux jours plus tôt – impliquant la protection intégrale du bois du Trait-Carré et les raisons pour lesquelles elle s’y est opposée.
«Il n’y avait nulle urgence de voter sur l’avenir du bois, écrit-elle. J’aurais bien aimé, avant de décider, recevoir et lire le rapport de 92 pages du Conseil régional de l’environnement et des Amis du Boisé du Souvenir qui traite précisément de la vision d’avenir du boisé Trait-Carré et qui devait être publié aujourd’hui même. Après tout, ce sont des experts en la matière et je trouve fort dommage qu’ils n’aient pas eu la chance de s’exprimer dans le cadre du comité [que le maire souhaitait mettre en place]».
D’entrée de jeu, Mme Dufour rappelle que lors de la séance du conseil du 7 août, le maire Marc Demers a proposé la création d’un comité de travail composé d’élus, représentants d’associations de boisés et/ou environnementalistes externes et spécialistes de la Ville.
«L’idée était d’analyser la situation, évaluer les alternatives et faire des recommandations quant à l’avenir du boisé dans les 60 jours à venir. Le maire s’est même engagé à appuyer la conservation totale du boisé si telle était la recommandation du comité.»
Litige en suspens
Elle enchaîne: «Le comité aurait aussi eu comme mandat d’analyser la meilleure alternative pour régler le litige avec le Fonds de solidarité de la FTQ […] Suite à l’adoption de la résolution pour la conservation intégrale du Trait-Carré, le litige demeure entier.»
De fait, l’entente qu’avait négociée la Ville avec ce promoteur immobilier à qui elle cédait 55 % du boisé pour 17,5 M$ est tombée à l’eau.
Au final, la Ville devra donc allonger près de 20 M$ pour compenser le Fonds FTQ qu’elle a expropriée de son terrain en 2012 afin d’y construire la Place Bell.
«Il est donc possible qu’un autre terrain soit proposé au Fonds de solidarité, ainsi l’éclairage du comité m’apparaissait souhaitable», poursuit Mme Dufour, qui craint que les «20 millions de dollars uniquement pour le Trait-Carré» ne retarde «l’acquisition de joyaux naturels», tel le Boisé du Totem qui abrite dans Saint-François des grottes et le plus grand marais de Laval.
«En bref, j’aurais aimé que nous prenions le temps de bien analyser le dossier avec les groupes environnementaux, dans le but d’identifier l’option optimale de conservation pour le boisé du Trait-Carré», termine-t-elle.
Trop peu, trop tard
«C’était une très bonne idée, mais trop tard, a réagi le chercheur en éthique de l’environnement, Daniel Desroches, au sujet de la proposition lancée par le maire Demers en début de séance du conseil du 7 août. Manifestement, c’est arrivée à la dernière minute.»
Ce geste improvisé a été posé 24 heures après la publication des conclusions tirées d’un volumineux rapport d’expertise en faveur de la conservation intégrale de ce dernier îlot de fraîcheur du centre-ville, rappelle le principal intéressé.
Pour le coauteur de l’étude «Vision d’avenir pour le bois du Trait-Carré», ce comité de travail aurait dû être mis en place bien avant de ficeler l’entente avec le Groupe immobilier FTQ, laquelle entente aurait été ratifiée à la séance du conseil de juillet n’eût été la crise politique qui a fait perdre au maire sa majorité au conseil.
Desroches rappelle que la décision de sacrifier au développement 6,6 hectares de ce «précieux» espace naturel était «prématurée» en ce sens qu’elle court-circuitait le mandat confié, en juin, aux services municipaux d’élaborer trois plans directeurs liés à la conservation et mise en valeur des milieux naturels, aux parcs et espaces publics et à la foresterie urbaine.
«Ç’a donné la joute à laquelle on a assisté tard mardi soir», a-t-il terminé.