Moins de 48 heures après l’inauguration officielle de la première clinique spécialisée publique privée en chirurgie au Québec, Dre Isabelle Bessette ouvrait la clinique Avenir MD au second étage du même édifice.
Motivation
C’était pour s’offrir une meilleure qualité de vie que Dre Bessette s’est tournée vers la médecine privée en 2005, alors qu’elle joignait les rangs de la première clinique de médecine générale entièrement privée. «Ça m’a réconcilié avec la médecine», commente-t-elle cette expérience qui lui a été salutaire.
Depuis la naissance de ses jumeaux à l’été 2003, le rythme infernal imposé dans le domaine public ne lui convenait plus. «Le privé me permet de passer plus de temps avec mes patients et d’exercer une médecine de qualité sans m’essouffler», indique l’âme dirigeante de la «clinique sourire», pour reprendre son expression.
Dre Bessette se donne un an pour mettre sur pied une équipe multidisciplinaire. Elle aimerait s’adjoindre deux autres médecins, un psychologue, une inhalothérapeute et une diététicienne. Une ambition qui vise essentiellement à bonifier l’offre de services et à accélérer la prise de rendez-vous, tient-elle à préciser, rappelant les raisons qui l’ont amenée à rompre les liens avec la Régie d’assurance-maladie du Québec.
Actuellement, l’infirmière Marie-Louise Gosselin fait équipe avec Dre Isabelle Bessette, les deux professionnelles de la santé partageant la même vision humaniste de ce que devrait être la pratique médicale.
Quant aux honoraires professionnels, ils sont facturés par bloc de temps, à raison de 25 $ par tranche de cinq minutes. Ainsi, il faut prévoir entre 200 $ et 250 $ pour un examen annuel complet.
Pas de saignée
À la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, on ne craint pas une saignée. De fait, rien ne laisse entrevoir un transfert des membres vers le privé. «Depuis 2002, ils sont moins d’une dizaine de médecins à avoir choisi de se désengager», avance Dr Jean Rodrigue, porte-parole de la FMOQ. Il remonte ainsi à l’adoption, il y a 4 ans, de la politique qui contraint depuis les omnipraticiens à se consacrer à des activités médicales particulières (AMP), principalement en milieu hospitalier et dans les CHSLD.
Avant 2002, les omnipraticiens qui s’étaient désaffiliés se cantonnaient dans la médecine esthétique et dans les visites à domicile, informe Dr Rodrigue. Des 7800 omnipraticiens membres de la fédération, on estime à une quarantaine ceux qui ne participent plus à la RAMQ, une quantité bien négligeable.
Stress et détresse
Reste que la pratique de la médecine s’exerce dans des conditions de plus en plus difficiles et exigeantes en raison du manque criant d’effectifs. «Il manque actuellement 800 médecins omnipraticiens au Québec», concède Dr Jean Rodrigue.
Pas étonnant que près d’un Québécois sur trois n’ait pas de médecin de famille, selon ce que révélait un sondage mené plus tôt cet automne par la firme Decima. Une situation qui n’est pas sans contribuer à remplir à craquer les cliniques sans rendez-vous et les salles d’urgence, créant du coup une pression indue sur les professionnels de la santé qui doivent ainsi voir le maximum de patients dans le plus court laps de temps possible.
Le niveau de stress s’en trouve conséquemment beaucoup plus élevé, reconnaît Dr Rodrigue qui fait remarquer que pendant qu’on observait une hausse importante des besoins en santé, le gouvernement rationalisait les ressources.
Par exemple, du temps de son affiliation, Dre Isabelle Bessette pouvait doubler ses heures travaillées durant la semaine où elle était de faction en milieu hospitalier. «Je voyais parfois jusqu’à 30 patients par jour», se rappelle-t-elle. Qui plus est, elle était de garde 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et ce, à raison d’une semaine par mois.
Fort révélatrices, les statistiques compilées au Programme d’aide aux médecins du Québec (PAMQ) indiquent une explosion des demandes d’intervention qui ont décuplé depuis l’instauration du programme en 1991. En quinze ans, les demandes d’aide ont augmenté de plus de 700 %. Voilà, en partie, l’héritage du plan de mise à la retraite anticipée du personnel de la santé entrepris, sous le gouvernement Bouchard, dans la foulée du déficit zéro au milieu des années 90. Principalement, les demandes d’aide ont trait à des problèmes d’épuisement professionnel, d’anxiété et de stress, explique-t-on au PAMQ.