Joëlle a commencé à vendre son corps dès l’âge de 18 ans. C’est par l’exemple de sa sœur aînée qu’elle a d’abord prêché, elle qui se prostituait déjà depuis quelques années. «J’ai pogné la touche assez vite, raconte-t-elle. J’ai travaillé à mon compte jusqu’à 35 ans, surtout à Laval. La plupart du temps, je mettais des annonces dans des journaux, et j’attendais qu’on me contacte.» «Mes pires années ont été vers la fin de ma carrière, poursuit-elle. J’ai vécu une rechute intense dans la drogue, qui m’a poussée à devoir travailler beaucoup plus. Je me suis même mise à faire de la prostitution de rue. Ça a été le bout le plus rough de ma vie.»
Jamais Joëlle n’a toutefois voulu fréquenter les piqueries, des endroits qui la dégoutaient, dit-elle. «C’est dans une piquerie que j’ai vu ma sœur mourir», raconte-t-elle, sans trop en dévoiler sur cet épisode de sa vie. «Je trouve aberrant que les gens associent les prostituées aux piqueries, ajoute-t-elle. Il y en a effectivement certaines que se tiennent dans ces endroits, mais ce sont les plus mal prises.»
VIH
Aujourd’hui âgée de 40 ans, Joëlle a préféré se retirer du métier, elle qui est atteinte du VIH.
«Je ne sais même pas comment je l’ai attrapé, lance-t-elle. Aujourd’hui, je consacre mon temps à aller chercher de l’aide et à m’occuper de ma fille de 23 ans, qui n’est pas dans l’industrie du sexe.»
Son aide, elle va surtout la chercher à l’organisme Sida-Vie Laval, par le biais de Vénus, un projet dont la mission est l’adoption de comportements sécuritaires chez toutes les travailleuses du sexe.
La coordonnatrice, Sophie Riopel, tente de sensibiliser les travailleuses du sexe en visitant, entre autres, les bars de danseuses, les agences d’escortes et les centres de massage érotique de Laval. «Présentement, on fait affaire avec un peu plus de 800 filles, relate Mme Riopel. On a même la collaboration d’un médecin, pour celles qui sont atteintes de maladies ou qui ont des questions.» «Notre philosophie est que la sensibilisation est beaucoup plus efficace que la répression, poursuit-elle. Par les années précédentes, il y a eu beaucoup d’arrestations et de contraventions distribuées, mais à long terme, ça ne règle rien.»
Statistiques
Une étude menée par le projet Vénus et l’Agence de santé et de services sociaux de Laval, en 2005, fait ressortir des statistiques intéressantes sur les travailleuses du sexe, à Laval. On y constate notamment que 41 % d’entre elles habitent Laval, que 64 % pratiquent dans les bars et les clubs, que 56 % affirment ne pas avoir de relations sexuelles en retour d’argent, que 30 % sont mariées, que plus de la moitié ont au moins un enfant, et que le tiers ne consomment aucune drogue. PHOTO DIGITALE fenetre.jpg PHOTO DIGITALE venus.jpg arrestation.jpg