«L’été passé, on a eu peur. C’était sec, et on a eu des problèmes: on a passé une semaine sans eau. Il fallait qu’il se passe quelque chose.»
Depuis un an, Sylvain Melançon dirige cette ferme qui produit fruits et légumes biologiques, tout en favorisant l’intégration sociale et au marché du travail de jeunes en difficulté. Il y a sept ans, la ferme était alimentée en eau par un puits de surface.
Son association au programme de paniers bio d’Équiterre, en 2001, a occasionné un plus grand besoin en eau, qu’on a voulu combler en creusant un puits profond. «On a frappé une veine d’eau très salée. Il ne faut pas oublier que nous sommes sur l’ancienne mer de Champlain, explique M. Melançon. La carrière [Simard-Beaudry] est aussi à proximité. C’est bien évident qu’il y a un impact sur la nappe phréatique.»
Couche blanche
La salinité de l’eau, couplée à sa rareté, en période de sécheresse, a conduit à une situation impossible, pour l’organisme à but non lucratif (OBNL) qui exploite la ferme du rang Haut-Saint-François.
Une heure après l’arrosage, par temps sec, une couche blanche se forme sur le sol, décrit le directeur. Dans la grande cuisine communautaire nouvellement aménagée, l’eau salée est en passe de venir à bout de la tuyauterie du lave-vaisselle flambant neuf, qui a coûté 8000$ à la modeste entreprise.
Factures salées en vue
Les solutions qui se profilent sont coûteuses. Pour régler le problème d’irrigation des cultures, la ferme optera fort probablement pour l’installation d’un marais filtrant et d’un bassin d’irrigation. Une opération qui coûtera entre 5000$ et 6000$.
«Mais ça ne règle pas le problème [d’alimentation en eau] des bâtiments, fait observer M. Melançon. Le seul traitement possible, c’est l’osmose inversée, mais ça occasionne une perte d’eau importante.» Cette option nécessiterait un déboursé de 3000$ à 4000$, et nécessiterait le stockage de l’eau dans des barils.
La solution ultime – et la plus coûteuse – consiste à faire creuser un autre puits. Il faudrait alors payer plus ou moins 15 000$, selon la profondeur de la nouvelle prise d’eau. «On est en santé financière, mais on est un OBNL, et l’agriculture, ça va bien certaines années; d’autres non. C’est une dépense importante», admet le directeur de la ferme.
Salinisation et irrigation
La salinisation de l’eau est un problème reconnu par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). L’irrigation des terres en agriculture est un des facteurs en cause: l’eau s’évapore, mais les sels restent dans le sol.
Selon le Centre d’information sur l’eau agricole et ses usages, les pays à faible revenu dans les régions sèches du monde ont beaucoup développé l’irrigation, au cours des trente dernières années, pour répondre au besoin alimentaire de leur population croissante. Les problèmes d’eau salée ont alors surgi.
Au Canada, le Service national d’information sur les terres et les eaux d’Agriculture Canada a établi une carte de la salinité des sols des Prairies. Selon cet organisme fédéral, la salinisation est le plus souvent attribuable à des facteurs physiques et environnementaux naturels.
Il cite cependant d’autres causes liées aux activités humaines, comme les pratiques agricoles et l’utilisation des sols.