C’est à contrecoeur qu’un couple de septuagénaires de la rue Sillery, dans Place Renaud, devra composer avec une station de trottinette électrique en libre-service devant l’entrée piétonne menant à leur logement.
Normand Boies et Diane Leroux, âgés de 74 ans, ont suggéré en vain de relocaliser cette zone réservée aux trottinettes sur des rues voisines donnant face à un restaurant ou encore sur la rue Fleetwood, qui se trouve au sud du boulevard Saint-Martin, un secteur industriel.
«Personne ne souhaiterait ça devant chez eux», se désole le couple qui déplore avoir été mis devant le fait accompli.
Déjà privés de trottoir, ils perdent un accès de 15 mètres en bordure de rue où disposer les bacs pour la collecte à trois voies. «Avec les autos stationnés, c’est souvent difficile d’y mettre nos bacs la journée de la cueillette», fait valoir le couple qui habite un immeuble de six logements, qui voisine avec deux autres 6-plex tout juste au nord du boulevard Saint-Martin.
La présence d’une garderie en face amène également beaucoup de circulation sur cette rue desservie par la ligne d’autobus 33, ce qui pourrait compromettre la sécurité des utilisateurs des trottinettes électriques en libre-service, jugent M. Boies et Mme Leroux. Ces derniers y voient aussi une entrave pour l’accès aux services d’urgence.
Sécuritaire, dit la Ville
Vingt-cinq jours après avoir logé une première plainte à la Ville, M. Boies recevait finalement une réponse par courriel le 4 juillet. La veille, le Courrier Laval avait courriellé à la Municipalité une série de questions en lien avec les doléances du citoyen dont les requêtes via le site mondossier.ca et les appels à la centrale 311 étaient demeurés sans écho.
Au terme d’un long courriel qu’il nous a partagé, on lui indique que «la station ne causant pas d’enjeu de sécurité, elle ne fera pas l’objet d’un déplacement».
Il est entre autres expliqué que «les trottinettes seront en libre accès sans ancrage, ce qui signifie qu’elles peuvent être déplacées par les services de secours lorsque cela est justifié».
On souligne également qu’il s’agit d’un projet pilote qui «ne concerne pour l’heure que la saison estivale 2023 jusqu’au 14 novembre», ajoutant qu’«il y a de fortes chances que la station ne soit jamais remplie au maximum de capacité [30 trottinettes], ce qui signifie que le ramassage des poubelles ne sera pas entravé».
Quant au choix de l’emplacement, il se justifie par sa localisation au «croisement d’un quartier résidentiel et d’un quartier industriel, ce qui permet de desservir l’ensemble des travailleurs et habitants» de ces deux secteurs.
Pas de consultation ni communication
Les Lavallois directement concernés n’ont été ni consultés ni avisés avant l’implantation des 33 stations du projet-pilote.
Ils l’ont appris au moment où la Ville procédait au marquage au sol, délimitant la zone réservée aux trottinettes qui seront offertes en libre-service devant ou à proximité de leur résidence.
«La Ville n’a pas effectué de communication écrite avec les riverains», explique le chef aux affaires publiques, Philippe Déry, considérant que «les interventions s’effectuent sur l’espace public et qu’aucune entrée charretière privée n’est entravée. Nous procédons de la même façon pour le déploiement des stations BIXI».
En date du 6 juillet, ce déploiement surprise n’aurait suscité que quatre signalements de la part des citoyens.
Quadrilatère restreint
Ce projet-pilote est restreint à une zone couvrant quelque 20 kilomètres carrés, circonscrit entre les boulevards Curé-Labelle et des Laurentides, l’autoroute 440 et la rivière des Prairies.
«Les trottinettes seront dotées d’un GPS et si elles sortent de cette zone, l’alimentation électrique sera coupée et l’équipement freinera doucement. Il ne sera donc pas possible de les utiliser en dehors de cette zone», informe M. Déry dans un échange de courriels.
La sécurité des usagers, la facilité d’accès et la proximité avec des intersections ont guidé le choix de l’emplacement des stations. «Le tout, en visant un maillage du réseau de stations avec les générateurs de déplacements, tels que les stations de métro, parcs, services publics ou centres commerciaux, mais aussi en proposant des stations dans des quartiers résidentiels.»
Mobilité active et intermodalité
Ce projet-pilote vise à la fois à encourager la mobilité active et à favoriser l’intermodalité en mettant à la disposition des Lavallois «une nouvelle option de déplacement, électrique et silencieuse, contribuant ainsi à la réduction des émissions de GES [gaz à effet de serre] sur le territoire», ajoute M. Déry tout en faisant valoir que ce mode de transport avait fait ses preuves dans plusieurs grandes villes.
Mise en service
S’il est trop tôt pour avancer la date de la mise en service des trottinettes électriques en libre-service, la Ville affirme «procéder en mode accéléré pour permettre de lancer le projet pilote cet été».
L’arrêté ministériel adopté le 6 juillet par la ministre des Transports et de la Mobilité durable, Geneviève Guilbault, permettant à ces engins de circuler sur les routes de 50 km/h et moins, nécessite certaines modifications à la réglementation municipale.
«Nos 33 stations sont déjà déployées et un permis [d’exploitation] a déjà été octroyé à un premier fournisseur, Bird Canada. Nous en sommes donc dans le dernier droit », termine Philippe Déry.