Il a renoncé, le 5 septembre, à la tenue de son procès, plaidant coupable aux chefs d’accusation de fraude, d’abus de confiance et de fabrication de faux.
Ex-gendre de Jocelyne Guertin, alors membre du comité exécutif sous l’administration Vaillancourt, Mathieu Lavoie a reconnu avoir fraudé l’OSBL pour 200 000 $ durant les 6 ans qu’il a été en poste.
Une somme d’autant plus considérable que Laval en fleurs, organisme chargé de la promotion de l’industrie horticole et de l’embellissement de la ville, disposait d’un budget annuel d’exploitation d’environ 240 000 $.
Ces fonds provenaient en bonne partie d’une subvention versée annuellement par Laval Technopole, le bras financier de Ville de Laval.
171 faux documents
L’exposé conjoint des faits, dont le Courrier Laval a obtenu copie devant la Cour du Québec, révèle la production de 171 documents contrefaits entre le 1er janvier 2005 et le 1er juillet 2011.
Fausses factures de fournisseurs, réels et fictifs, fausses paies libellées à des employés, réels et fictifs, et faux chèques ont permis à M. Lavoie de détourner des fonds totalisant 171 785 $.
Ces sommes ont été déposées en totalité dans des comptes bancaires lui appartenant.
La preuve fait également état de deux faux bordereaux de dépôt, en octobre 2010 et mai 2011. L’ancien patron avait ainsi dérobé une somme de 4500 $ en argent comptant.
Enfin, entre juillet 2005 et mai 2011, Mathieu Lavoie a fabriqué 74 rapports de dépenses frauduleux ou non justifiés pour un total de 23 189 $.
Facteurs aggravants
La fréquence, l’ampleur et la durée de la fraude, la préméditation et la planification de ces actes criminels, commis par appât du gain, ainsi que le fait qu’il ait agi seul figurent parmi les facteurs que jugeait aggravants le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP).
En sa qualité de directeur général et de responsable des finances de l’organisme, Mathieu Lavoie a abusé de la confiance dont il jouissait auprès des membres du conseil d’administration (CA).
Les graves répercussions causées à l’organisme, qui fut démantelé à la suite de la mise au jour de cette fraude, ont aussi été prises en compte au moment de négocier un règlement entre les parties.
Tout comme son ultime tentative de duper le CA et d’échapper à toute poursuite éventuelle en demandant à ses membres d’adopter une résolution, qui aurait eu pour effet de ratifier tous ses actes posés depuis son embauche et de le dégager de toute responsabilité.
Enfin, la poursuite a également fait valoir les importantes sommes investies et les mesures déployées dans la foulée de l’enquête policière qui a permis de déposer les accusations, nommément l’expertise juriscomptable et près d’une quarantaine de témoins interrogés.
Facteurs atténuants
En contrepartie, trois facteurs atténuants ont pu jouer en faveur de l’accusé dans les négociations avec le DPCP, à savoir l’absence d’antécédents judiciaires de Mathieu Lavoie, son plaidoyer de culpabilité prononcé tôt dans le processus judiciaire et le fait qu’il ait respecté ses conditions de remise en liberté, le 30 décembre 2013.
C’est d’ailleurs ce qu’a fait valoir sa procureure, dont le mandat était de négocier avec le Ministère public une sentence qui soit la plus clémente possible dans les circonstances
Sentence
Or, les parties se sont entendues sur une peine d’emprisonnement ferme de 18 mois et une ordonnance de restitution d’une somme de 70 000 $ au profit de la Ville de Laval.
À sa sortie de prison, Mathieu Lavoie s’est engagé pour une durée de deux ans à aviser au préalable le Service de police de Laval de tout changement d’adresse et le tenir informé, sans délai, de l’obtention d’un emploi, rémunéré ou bénévole, et de tout changement d’occupation.
Pendant cette probation de deux ans, M. Lavoie ne pourra chercher ni accepter un emploi ou un travail bénévole dans le cadre duquel il serait en mesure d’exercer un pouvoir sur des biens immeubles, de l’argent ou les valeurs d’autrui.
Dans la même foulée, il devra s’abstenir de prendre part à l’administration d’un autre portefeuille que le sien.
Recours au civil
Parallèlement, les recours au civil intentés par l’administration Demers pour récupérer les fonds détournés par l’ex-dirigeant Mathieu Lavoie se poursuivent.
Rappelons que le 31 juillet, l’ex-dirigeant de Laval en fleurs, une quinzaine de membres du conseil d’administration de l’organisme et la firme Intact Assurances, agissant alors à titre d’assureur responsabilité civile pour cette organisation, étaient sommés de rembourser solidairement le montant de 200 911.01 $.
Retour sur les événements
1er janvier 2005: embauche de Mathieu Lavoie, qui devient directeur général de Laval en fleurs.
1er juillet 2011: Mathieu Lavoie quitte volontairement Laval en fleurs.
20 février 2012: l’expert-comptable avise le président du conseil d’administration de l’organisme d’irrégularités liées à deux dépôts pour l’exercice financier 2011. S’ensuivra une vérification complète des finances de l’organisme depuis le 1er janvier 2005.
Décembre 2012: mandat confié à la firme juriscomptable Navigant.
Fin 2012: les activités de Laval en fleurs sont transférées à la Fondation du Centre de la nature.
15 janvier 2013: la section des crimes économiques du Service de police de Laval amorce une enquête.
30 août 2013: dépôt du rapport final de la firme Navigant au Service du contentieux de Ville de Laval, qui transmet le dossier au Service de police de Laval aux fins d’enquête criminelle.
Septembre 2013: la preuve est soumise au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP); des compléments de preuve suivront deux mois plus tard.
16 décembre 2013: un mandat d’arrestation pancanadien est émis par le juge Marc David de la Cour supérieure, puisque Mathieu Lavoie réside à Abudja, au Nigéria.
29 décembre 2013: à son retour au pays, M. Lavoie est mis en état d’arrestation.
30 décembre 2013: après sa comparution devant une juge de la Cour du Québec, il est remis en liberté sous certaines conditions.
20 janvier 2014: la communication de la preuve par le Ministère public à l’accusé est complétée.
2 mai 2014: l’accusé enregistre un plaidoyer de non-culpabilité et opte pour un procès devant juge seul avec enquête préliminaire.
5 septembre 2014: M. Lavoie renonce à la tenue de son procès et plaide coupable à trois des quatre chefs d’accusation qui pèsent contre lui. Il écope d’une peine de 18 mois d’emprisonnement ferme.