Une ex-présidente de la Chambre de commerce et d’industrie de Laval (CCIL) était impliquée dans le système de collusion et de corruption, à Laval, a révélé l’ingénieur à la retraite Roger Desbois, devant la commission Charbonneau, le 22 mai.
Il s’agit de Chantal Morasse, ex-vice-présidente Environnement chez Tecsult et directrice générale du bureau que cette firme de génie exploitait à Laval.
En 1998-99, Chantal Morasse présidait aux destinées de la CCIL.
Jusqu’à ce qu’elle quitte Tecsult, au printemps 2005, Mme Morasse était notamment responsable des «relations avec la Ville de Laval», a mentionné le témoin, qui allait lui succéder comme directeur du bureau lavallois.
Registre de ristournes
Au moment de «récupérer son bureau», Roger Desbois dit avoir mis la main sur des registres que tenait Mme Morasse, indiquant les ristournes que l’entreprise avait versées au fil des ans au parti de l’ex-maire Gilles Vaillancourt, le PRO des Lavallois, en retour de contrats publics.
La firme retournait en argent comptant 2 % de la valeur des mandats professionnels obtenus par appel d’offres, alors que «pour le prêt de personnel» à la Ville, le taux de remise était réduit à 1 %.
À ces fins, entre 2006 et 2008, M. Desbois dit avoir remis au notaire Me Jean Gauthier, arrêté le 9 mai par l’UPAC, la somme de 75 000 $ en deux versements. Une première remise de 25 000 $ en espèces avait été précédée d’un appel de Me Jean Bertrand, alors agent officiel du PRO des Lavallois, lui signifiant qu’il y avait «lieu de faire un paiement».
Collecteur de fonds
Aujourd’hui âgé de 76 ans, Roger Desbois a été un collecteur de fonds attitré pour le parti politique de Gilles Vaillancourt entre 2003 et 2009.
Pendant ces années, à coup de 2 % de la valeur des contrats octroyés par l’administration Vaillancourt, il affirme avoir amassé la coquette somme de 2,7 M$ auprès de la vingtaine de firmes de construction collusionnaires, qui se partageaient plus de 80 % des contrats publics.
Les entrepreneurs venaient régler leur dû au bureau de Tecsult (devenu Aecom en 2008) au 1, Place Laval (Édifice GL). C’est également à cet endroit que Me Jean Bertrand et Me Pierre L. Lambert, proches de Gilles Vaillancourt, venaient cueillir les fruits de ce système de collusion.
MM. Bertrand et Lambert ont également tous deux été arrêtés lors de la rafle du 9 mai dernier.
20 complices arrêtés
Le 21 mai, toujours à la barre de la commission Charbonneau, Roger Desbois avait identifié chacun de ses répondants au sein des firmes de construction en présence desquelles, avec la complicité de hauts fonctionnaires de la Ville et de l’ex-maire Gilles Vaillancourt, il truquait les appels d’offres.
Treize d’entre eux figurent parmi la liste des 37 présumés complices qui sont tombés dans les filets de l’UPAC, il y a une quinzaine de jours.
Il s’agit de Giuseppe Molluso (Louisbourg Construction et Simard Beaudry), Ronnie Mergl (Nepcon), Marc Lefrançois (Poly Excavation), Jocelyn Dufresne (Jocelyn Dufresne inc.), Mario Desrochers (Sintra et Desjardins Asphalte), Giuliano Giuliani (Giuliani inc.), Mike Mergl (Construction Mergad), Carl Ladouceur (Carl Ladouceur Excavation), Daniel Lavallée (Lavallée & Frères), Léonardo Moscato (Construction Timberstone), Patrick Lavallée et Luc Lemay (J. Dufresne Asphalte) et Lyan Lavallée (Ciments Lavallée).
Le lendemain matin, le 22 mai, M. Desbois reprenait son témoignage en identifiant, cette fois, ses répondants des huit autres firmes de génie-conseil impliquées dans le système de collusion lavallois.
Par «ordre d’importance», selon les parts de contrats qu’elles obtenaient de Ville de Laval, ces sociétés collusionnaires étaient Dessau (Serge Duplessis), Cima+ (Laval Gagnon, Louis Farley et Michel Lavoie), Tecsult (Roger Desbois), Genivar (François Perreault et Yannick Bouchard), MLC Associés (Claude Chagnon), Filiatreault McNeil (Alain Filiatreault), Equilux connue jadis sous Jobin Courtemanche (Guy Jobin), Bafa Consultants (Bashar Ashkar), Triax (André de Maisonneuve et Rosaire Fontaine).
Sept d’entre eux comparaîtront devant le juge, le 10 juillet prochain, sous des chefs d’accusations de fraude, abus de confiance, corruption dans les affaires municipales et fraudes envers le gouvernement.
Précisons que bien que Roger Desbois ait échappé à la vague d’arrestations du 9 mai, son nom apparaît dans le mandat d’arrêt comme ayant été un acteur important de ce vaste complot érigé en système, de concert avec l’administration Vaillancourt.