Le CPE n’a plus assez d’argent pour en acheter et offre des menus végétariens aux enfants de la garderie lavalloise depuis plus de trois mois.
Les 105 enfants, qui fréquentent la garderie du boulevard Jolibourg dans le quartier Sainte-Dorothée, peuvent dorénavant dire adieu aux pâtés chinois, ragoût, pâté au poulet, boulettes suédoises, pains de viande à la sauce tomate et dindon à la thaïe qu’ils pouvaient manger avant ces changements trois à quatre fois par semaine.
«C’est très frustrant de couper la viande aux enfants. La viande est maintenant servie une seule fois par semaine. Notre conseil d’administration n’a pas eu le choix avec les compressions budgétaires d’opter pour un menu végétarien qui coûte beaucoup moins cher», explique la directrice générale, Sylvette Mousset.
50 000 $ en moins
Celle-ci admet que son CPE a été amputé de 50 000 $ pour la prochaine année en plus de 80 000 $ au cours des dernières années. Elle croit aussi qu’il y en aura d’autres compressions dans les prochaines années.
«Nos subventions diminuent et le coût de l’épicerie augmente drastiquement. Il faut aussi penser aux salaires de nos 30 employés qui augmentent», admet-elle.
Mme Mousset considère avoir tout essayé avant d’en arriver là. D’ailleurs, un poste de cadre a été supprimé tout comme les heures et le matériel pédagogiques. Une aide-éducatrice s’occupe des enfants plutôt qu’une éducatrice durant les temps de pause.
«Nous avons organisé des levées de fonds pour payer notre matériel pédagogique, car il a fallu couper l’équivalent de 15 000 $. C’est simple, on ne peut en faire davantage», mentionne la directrice générale de l’établissement.
«La nourriture est une bonne partie de notre budget annuel de 1 M$, soit 70 000 $ par année. Quand on remplace la viande par des substituts comme des pois chiches et des lentilles, on réalise des économies. On ne veut pas faire pitié, mais c’est la réalité», enchaîne celle qui croit que d’autres CPE emboîteront le pas en privant les enfants de viande.
Dénonciation
Le 19 juin, l’Association québécoise des centres de la petite enfance (AQCPE) a dénoncé les compressions de 74 M$ imposées cette année aux services de garde et qui s’ajoutaient aux coupes de plus de 400 M$ que le réseau a dû absorber depuis 2006.
«Ces compressions font mal au réseau des services de garde. Le CPE n’est pas juste une question d’argent, c’est l’avenir du Québec axé sur les enfants. Nous ne sommes pas là pour faire de l’argent, mais nous avons une mission éducative. Nous voulons que les enfants soient le moins touchés», insiste-t-elle.
«Le gouvernement est entrain de tout détruire avec ses coupures et pas juste dans les CPE, mais aussi dans l’éducation, la santé et les services communautaires. C’est très inquiétant», ajoute-t-elle.
Un pilier
Mme Mousset a qualifié la responsable de l’alimentation Suzanne Klockars de véritable pilier avec les nombreux changements apportés au menu.
«Suzanne a une ouverture d’esprit. Elle a su s’adapter rapidement. Elle a accompli un travail colossal en essayant de trouver des idées pour que les enfants prennent goût à ses nouveautés. Elle a dit aux enfants que le jus de betterave servait pour faire du sucre, aliment qu’ils adorent, afin de les inciter à manger la salade de betterave», termine-t-elle.
Ce qu’ils ont dit
Francine Charbonneau, ministre et députée de Mille-îles: «C’est inacceptable et inexplicable. Je ne comprends pas comment on peut prendre une telle décision. Ce CPE doit remettre en question sa gestion et non le service alimentaire aux enfants. Ils reçoivent toujours le même budget, soit 60 $ par jour pour le volet alimentaire.»
Sylvie Mousset, directrice générale du CPE: «Nous avons l’équivalent d’une personne et demie à temps plein pour gérer le service de garde, sans secrétaire ou réceptionniste. La ministre doit savoir que mon salaire ne dépasse pas les normes ministérielles. Et les parents sont derrière nous. Ils n’étaient pas d’accord au départ, mais ils ont compris.»
Ce qu’en pensent les parents
Sabrina Plourde: «Je n’ai aucun problème que l’on fasse découvrir de nouveaux mets à mon enfant. Il peut en manger à la maison de la viande, alors ça me va. Ce qui me dérange, c’est que le CPE soit obligé d’en arriver là.»
Julie Labonté: «Mes jumeaux de quatre ans continuent de manger les portions habituelles. À la maison, on ne mange pas beaucoup de viande alors ce n’est pas trop un changement pour eux.»
Albert Claudisson: «Ça ouvre leur horizon. Mon gars ne mange pas de légumes, c’est une bonne chose.»
Alisson Kousaie: «Je trouve l’idée bonne, la variété de la nourriture est excellente pour mes enfants. Mon plus jeune de 20 mois a eu des problèmes d’estomac avec ce changement, mais je comprends qu’un menu végétarien coûte moins cher.»
Nicholas Borne: «Pourvu que les enfants trouvent leurs protéines et qu’ils soient bien nourris. Je comprends que les responsables du CPE doivent prendre des mesures face aux coupures et c’est une idée originale.»