Un conte de Noël pour adultes signé Micheline Duff. L’an dernier, une affreuse pandémie avait gravement affecté notre société. À cause du confinement obligé et la vaccination non encore amorcée, aucune fête et rassemblement n’étaient permis pour célébrer Noël.
Ainsi, il ne fut pas question de nous réunir tous ensemble, avec nos enfants, nos petits-enfants, frères et sœurs et amis comme de coutume.
Fort déçus, mon mari et moi avons pris la décision de visiter les familles de nos 4 enfants et 15 petits-enfants, une à la fois, afin d’apporter à chacun ses étrennes.
Masques sur nos visages, sans trop les approcher, encore moins les embrasser, soit dans leur sous-sol, dans leur garage ou pire, dehors, au moins nous les verrions tous.
Histoire de mettre de l’ambiance dans ce genre de rencontre bien particulière et de stimuler les fous rires, mon époux pourrait se déguiser en père Noël.
Cette solution sembla convenir à tous sauf à notre fils Charles, père de nos trois plus jeunes petits-enfants, les seuls qui croyaient encore, «dur comme fer», à l’existence réelle du vrai père Noël.
Idée originale
– Papa, tu ne peux pas agir de la sorte, affirma notre garçon, mes enfants risqueraient trop de te reconnaître sous ton déguisement. Cela risquerait de jeter à jamais par terre leurs naïves croyances.
– Ne t’en fais pas, mon fils, lui répondis-je, je vais tout arranger cela. J’ai une bonne idée, fais-moi confiance. La veille de Noël, lorsque tes petits feront dodo, toi et ta femme déposerez sous l’arbre les cadeaux que vous destinez à vos petits. Le lendemain matin, quand ils se réveilleront, lis-leur un mot que le père Noël t’aura soi-disant laissé au cours de la nuit, te demandant de venir toi-même les remettre à chacun au cours de la journée. Ils seront probablement tout excités et se tordront d’impatience.
Effectivement, en fin de matinée, le lendemain, Yves et moi avons sonné à leur porte avec, en main, un sac rempli des surprises que nous-mêmes leur avions préparées pour Noël.
Ne tenant plus en place, les petits nous sautèrent dans les bras. Je leur expliquai alors qu’en nous levant, le matin même, nous aussi avions trouvé ces cadeaux avec leurs noms dessus sous notre arbre de Noël.
Bien sûr, les enfants s’énervèrent encore davantage.
Complicité filiale
C’est alors que je leur annonçai que, juste au moment de partir pour venir chez eux, le père Noël m’avait téléphoné pour nous aviser qu’en fin de compte, il ne pourrait pas venir faire la distribution, à cause du trop grand danger dû à la pandémie. Il nous incombait donc, à grand-papa et grand-maman, de le remplacer pour leur remettre tous les cadeaux au grand complet.
C’est le moment que choisit mon mari pour sortir un autre sac de derrière son dos.
– Vous savez quoi, les enfants? J’ai trouvé chez-nous, au sous-sol, une boîte de déguisements de l’Halloween contenant un habit du père NoëI. Que diriez-vous si je me déguisais, avec votre aide? Ce serait le fun hein? Exceptionnellement, le «vrai» père Noël, cette année, ce sera moi, votre grand-père. Trouvez-vous qu’il s’agit d’une bonne idée?
Les enfants, qui avaient écouté religieusement, se mirent à rire. Bien sûr qu’ils étaient d’accord. Ils n’hésitèrent pas une seconde à fouiller dans le sac pour en sortir l’habit.
En quelques secondes, Gabrielle aida son pépé à enfiler le costume tout rouge, Jacob à ajuster minutieusement sa perruque et sa moustache, et la petite Joanie à poser l’épaisse tuque sur sa tête.
Le grand-père, lui, ne ménageait pas ses Ha! Ha! Ha! Ils n’hésitèrent pas, évidemment, à lui sauter sur les genoux et à caresser sa barbe.
Heureusement, son épaisse barbe et son lourd habillement le protégeaient de tous les méchants virus de la pandémie.
Et demain?
Les photos de Noël de cette année-là furent magnifiques.
On aurait dit que pendant un court espace de temps, le «vrai» père Noël se trouvait réellement parmi nous.
Un bonhomme déguisé par les enfants eux-mêmes, ce qui ne les empêcherait pas de continuer à croire à l’existence du «vrai» père Noël.
Ensemble, par la suite et malgré la distance qui nous séparait, notre fils, son épouse et nous avons levé un verre de vin en criant: Santé!
Convaincus que l’an prochain, la santé serait revenue dans notre société, de même qu’un nouveau «vrai» père Noël.
Qui vivra verra…