Le Québec est la province dont les ménages dépensent le plus en soins dentaires au pays. La mise à jour récente d’une étude publiée par l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) révèle qu’en 2019, les ménages québécois ont déboursé en moyenne 461$ pour les dépenses directes associées aux soins dentaires, un montant de 14,1% plus élevé qu’en 2010.
En parallèle, la Chambre des communes à Ottawa vient d’adopter le projet de loi C-31 qui offrira des chèques pouvant atteindre 650$ aux familles admissibles ayant des enfants de 12 ans et moins pour défrayer les coûts de soins dentaires.
Pour le comité de lutte en santé de la Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles, il s’agit d’une mesure nettement insuffisante. Compte tenu de l’augmentation fulgurante du prix des soins dentaires pour les enfants. Selon ce même comité, ce chèque démontre à quel point le gouvernement fédéral est déconnecté de la réalité.
À titre d’exemple, en se basant sur la grille de tarifs émise par l’Association des chirurgiens-dentistes du Québec, un parent doit débourser pour son enfant de 11 ans plus de 600 $ pour couvrir un nettoyage (incluant l’application du fluor et la radiographie), la réparation d’une carie et la pose de scellant sur quatre molaires. Cet exemple ne contient que des soins dentaires de base et n’inclut aucun traitement plus spécifique et plus dispendieux, souvent essentiel pour un jeune préadolescent.
«Ce n’est pas d’un chèque de 650 $ dont ont besoin les parents au Québec, mais plutôt d’un plan dentaire pour tous les enfants de moins de 18 ans couvert par le régime public de l’assurance maladie, affirme Stéphane Defoy, organisateur communautaire à la Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles. Si le premier ministre Trudeau veut vraiment venir en aide aux familles à faible et moyen revenu, il doit impérativement transférer des fonds aux provinces qui seront utilisés exclusivement pour élargir la couverture publique des soins buccodentaires. Nous rappelons que la santé est un champ de compétence provincial. En ce sens, un partenariat avec le gouvernement du Québec est indispensable. Pour l’instant, ce chèque acheminé éventuellement aux familles, c’est de la poudre aux yeux».
De plus, la mesure découlant de l’adoption du projet de loi C-31 présente certaines similitudes avec la Prestation canadienne d’urgence (PCU). Les familles admissibles au chèque de 650$ devront par la suite attester auprès de l’Agence du revenu du Canada (ARC) qu’elles n’ont pas d’assurance privée, qu’elles ont les frais dentaires à leur charge et elles devront aussi conserver leurs reçus à titre de preuves.
«Si les preuves et les documents fournis apparaissent insuffisants et incomplets aux yeux de l’ARC, des familles devront-elles rembourser le montant du chèque reçu comme ce fut le cas pour la PCU? se questionne William Archambault, membre du comité de lutte en santé de la Clinique communautaire. Force est de constater que le gouvernement fédéral n’a rien appris des erreurs commises avec la PCU et cette fois, ce seront des familles marginalisées qui subiront les conséquences d’une mesure mal ficelée.»
La Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles continue d’exiger des soins buccodentaires au Québec défrayés par la RAMQ, dans un premier temps pour les enfants de moins de 18 ans ainsi que pour les aînés de 65 ans et plus.
«Il faut comprendre que la dépense engagée pour l’élargissement de la couverture publique des soins dentaires réduira des coûts futurs en soins de santé. Il est toujours préférable de prévenir que de devoir guérir à fort prix par la suite», conclut Stéphane Defoy. (J.L-B\IJL)