Une nouvelle étude révèle un taux de détresse psychologique considérablement plus élevé chez les pères québécois ayant des enfants à besoins particuliers comparativement à l’ensemble des pères québécois.
L’étude qui pose un rare regard sur l’expérience de ces pères montre que ceux-ci connaissent un parcours jalonné de difficultés qui rend plus compliqué l’exercice du rôle de parent.
Ces constats sont issus d’une enquête réalisée par la firme de recherche SOM en mars 2022 pour le compte du Regroupement pour la Valorisation de la Paternité (RVP), auprès d’un échantillon de 907 pères québécois d’enfants ayant déjà été aux prises avec un ou des problèmes comme une incapacité physique ou un problème de santé chronique, un retard de développement global, un trouble de langage ou de la parole, un trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité, un trouble anxieux ou dépressif, un handicap physique ou sensoriel ou un trouble du comportement.
Selon l’enquête, 17% de ces pères présentent un indice de détresse psychologique élevé, alors que la moyenne pour l’ensemble des sujets se situe à 13%, un écart statistiquement important.
Autre écart préoccupant, 11% de ces pères mentionnent avoir eu des idées suicidaires dans la dernière année, alors que la moyenne se situe à 7% pour l’ensemble des pères. L’idéation suicidaire est généralement considérée comme le signe d’une grande détresse.
Problèmes plus difficiles
L’enquête, l’une des plus vastes du genre jamais réalisée auprès des pères québécois, décortique une variété de déterminants de la vulnérabilité.
Pour les pères d’enfants à besoins particuliers, comparativement à l’ensemble des pères, l’aiguille oscille à la hausse sur pratiquement tous ces indicateurs, suggérant un parcours plus difficile.
Cela se reflète entre autres par une confiance parentale moins grande et une difficulté accrue, pour ces pères, à résoudre les problèmes liés à l’éducation de leurs enfants.
Dans l’ensemble, 39% des pères ayant des enfants à besoins particuliers mentionnent cet enjeu, comparativement à 28% chez l’ensemble des pères.
Leur relation coparentale semble aussi être davantage mise au défi.
Les taux d’insatisfaction vont de 19% à 23% selon les dimensions de la coparentalité, alors qu’ils varient entre 13% et 18% chez l’ensemble des pères.
En outre, ces pères rapportent bénéficier d’un moins bon soutien de leur entourage.
«Les données nous suggèrent qu’avoir des enfants à besoins particuliers complique l’exercice du rôle de parent pour ces pères, et cela se répercute non seulement sur leur sentiment de confiance personnelle en tant que parent, mais également sur la qualité de leur relation avec leur coparent et même leur entourage. Avec, pour conséquence, un plus grand risque de détresse psychologique et une résilience plus faible», explique le professeur Carl Lacharité (UQTR) par voie de communiqué. Carl Lacharité a assuré la direction scientifique de l’étude.
Réalités à démystifier
Rare éclairage positif de l’enquête, les pères d’enfants à besoins particuliers semblent plus proches du dispositif de services psychosociaux.
Le taux de consultation au cours de la dernière année s’élève à 21%, comparativement à 14% parmi l’ensemble des pères.
Cela constitue une opportunité de resserrer le filet de protection autour d’eux, encore là faut-il que le dispositif de services soit sensible à leur réalité, souligne Carl Lacharité.
«Il semble clair que ces pères ont besoin d’être davantage soutenus afin de pouvoir résoudre plus facilement les difficultés qu’ils rencontrent et pour favoriser une plus grande résilience chez eux. Cela renforce l’importance, comme le fait cette étude, de mieux documenter leur réalité, car on possède très peu de données sur ces pères. Ces connaissances sont un préalable essentiel à l’adaptation des pratiques dans les milieux d’intervention», affirme le chercheur, dans la même communication aux médias.
(É.B./IJL)